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Critique de dipari


"Si tu pars, je pars", écrit le 5 septembre 1914 Victor, gouverneur des colonies en retraite, à son fils unique Robert, journaliste et critique d'art. Les voici donc servant la même pièce d'artillerie pendant toute la durée de la guerre. Et aimant la même femme en parfaite complicité, lui envoyant plus de mille lettres accompagnées de photo, de caricatures, de fleurs séchées.
Ces lettres, Thierry Secrétan, petit-fils et arrière-petit-fils de Victor et de Robert, les a transcrites, puis est allé sur les lieux décrits par ses aïeux, localisant et photographiant leur périple. Aux lettres, s'ajoutent donc des photos, d'époque ou d'aujourd'hui, ainsi que quelques articles que Robert écrivit dans les journaux de l'époque (L'Intransigeant, le Journal).
Leurs lettres, souvent longues et détaillées, racontent leur quotidien au front ("tu connais maintenant aussi bien que moi les détails de ma vie d'artilleur" écrit Robert le 2 février 1915), derrière les tranchées occupées par les fantassins. Elles illustrent aussi leur idéal républicain et laïc, leur connaissance des arts et, surtout, leur amour pour cette femme, Kikite, que Robert a épousée en 1912.
Ce sont deux personnalités complexes et riches. Hédonistes (mâtiné de panthéisme chez Robert), ils célèbrent l'amitié, la conversation, les plaisirs de la table, la lecture (Robert passera toute la guerre avec « les Essais » de Montaigne sur lui), le savoir. Et, par-dessus tout, l'amour de Kikite qui leur permet de résister au carnage, sorte de bonne étoile qui les protège et leur donne le moral : « Petite femme chérie, c'est drôle ce que l'amour pour une petite maîtresse aimée comme tu es aimée fait supporter les choses » écrit Robert le 2 janvier 1917. Même si certains jours sont plus difficiles que d'autres : "Ma femme tant aimée, je te griffonne ce mot en ayant froid devant un maigre feu qui enfume le coin de la grotte où nous sommes. Il fait très froid. Une âpre bise balaye le plateau. Il tombe une pluie fine et cruelle, tout est boue. L'hiver est inséparable de la guerre et elle n'a pas de printemps. Nous tirons beaucoup et sans arrêt. Une moyenne de mille obus par batterie et par jour. [...] Je suis surtout bien déprimé par ce froid. Ici, pas une minute de soleil ou de tiédeur." [Picardie, 18 avril 1918]. Encore quelques mois à tenir pour sortir de la « der des Ders ».
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