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Critique de Cancie


Si personne n'ignore l'existence de Albert Einstein qui reçut le prix Nobel de physique en 1921 et dont le travail est notamment connu du grand public pour l'équation E=mc2, beaucoup plus rares sont ceux qui connaissent les enfants qu'il a eu avec Mileva Maric, une jeune physicienne brillante serbe dont il se sépare en 1914.
C'est sur le cas du fils cadet, Eduard, né le 23 juillet 1910 à Zurich dont la santé va se détériorer brutalement alors qu'il est âgé de vingt ans que Laurent Seksik se penche.
Tout comme son frère aîné Hans-Albert, Eduard a beaucoup souffert de la séparation de ses parents. Très intelligent, il est en première année de médecine, compte s'orienter vers la psychiatrie quand la maladie se déclenche et que son état devient ingérable.
Sa mère n'a d'autre choix que de le conduire à l'asile, dans la clinique psychiatrique Burghölzli de Zurich.
La lourde porte de l'établissement se referme quand débute le roman…
C'est donc la chronique de la vie et de la maladie incurable de Eduard, la schizophrénie, avec en fond, la plongée de l'Europe dans le nazisme.
Trois destins s'entrecroisent dans le roman.
Celui de la mère dont la vie a chaviré et dont le monde s'est obscurci depuis l'internement de son fils. Son univers est depuis délimité par le tracé de la route qui va de sa maison à la porte du Burghölzli. Sa douleur résonne tout au long du roman.
Celui du père, ce père absent, ce père complètement désarmé et désemparé devant la maladie de son fils et qui depuis Princeton où il vit en exil depuis 1933 avouera l'ampleur de son désespoir et son impuissance en écrivant : « Mon fils est le seul problème qui demeure sans solution. »
Une troisième voix est celle d'Eduard lui-même, que Laurent Seksik a parfaitement su imaginer et rendre plus que crédible, n'hésitant pas à le faire dialoguer avec un infirmier.
Nous entendons alors tous les questionnements qui ont pu le traverser, son admiration pour sa mère, la nostalgie de la belle époque quand ils vivaient encore tous les quatre, ses hallucinations, ses sentiments, ses souffrances évidemment et son immense douleur liée à l'abandon de son père.
Eduard va subir de nombreux électrochocs, sera enserré dans une camisole lors de ses accès de violence. Seront également expérimentés sur lui des chocs à l'insuline, des heures terribles à vivre qui détruisent Eduard plus qu'ils ne le guérissent.
Parallèlement à ce monde inhumain des soins psychiatriques d'alors, c'est à la montée du nazisme et de l'antisémitisme que nous assistons et au climat de terreur qui s'installe en Allemagne.
Après avoir été vénéré pour ses travaux, alors qu'en son honneur, avait été élevée à Potsdam la tour Einstein dont l'immense télescope était destiné à vérifier la validité de ses théories, Albert Einstein subit des attaques visant ses origines juives, sa sécurité est menacée. Devenu une cible ambulante, il doit quitter l'Allemagne et part s'installer en Amérique.
Mais contrairement à l'opinion répandue, l'Amérique n'accueille pas Einstein à bras ouverts. Il est accusé de sympathies communistes, on lui reproche son pacifisme et son engagement en faveur des Noirs américains ne plaide pas en sa faveur. le FBI enquête et Edgar Hoover, le nouvel homme fort de l'Agence pense qu'Einstein est un agent à la solde de Moscou…
Très bien documenté, notamment grâce à la correspondance entre Mileva et Albert Einstein,
Le roman de Laurent Seksik, un drame intimiste, remet sur le devant de la scène ce fils oublié qui finira ses jours parmi les fous, délaissé de tous, dans le plus grand dénuement et analyse de façon remarquable le lien particulier entre celui-ci et son père, Albert Einstein.

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