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Critique de berni_29


Lu dans le cadre de la sélection du Prix Cezam 2020, je dois avouer que ce premier roman d'Ingrid Seyman, La petite conformiste, m'a enthousiasmé.
Pourtant j'y allais avec quelques appréhensions, considérant la teneur de ce récit comme mineure, lorsque j'ai découvert la quatrième de couverture. Or, il n'en est rien. Bon, ce ne sera pas le coup de coeur de l'année, mais tout de même, ce roman, par sa petite voix qui nous tient en haleine jusqu'au bout, vaut le détour.
Tout commence avec beaucoup d'humour et de dérision, dans cette description où dès son plus jeune âge la jeune Esther, la narratrice, se sent étrangère à son univers familial. Nous sommes dans la fin des années 70, puis début des années 80. Les parents d'Esther, Babeth et Patrick, revendiquent farouchement leur héritage de mai 68 et cette culture hippie qu'ils pratiquent dans leur mode de vie jusqu'à se balader nus au quotidien dans leur appartement de Marseille. Esther se sent dès son plus jeune âge en total décalage avec cette pratique, jusqu'à s'affirmer de droite, totalement réactionnaire, face à des parents de gauche, qui considèrent qu'il faut interdire les interdits, respecter la planète, promouvoir un esprit de communauté. Voilà pour les belles paroles et le décor planté... !
Les premières pages sont empreintes d'un humour vache délicieux à souhait, d'ailleurs cet humour, sous la forme d'une dérision des situations, ne quitte jamais le récit, même lorsque le ton devient sombre et grave, au fur et à mesure que le récit se déroule. On comprend vite qu'Esther a fait de cet humour, une protection, presque une arme, un antidote en tous cas pour survivre...
L'humour est donc au rendez-vous, un humour mordant, acide, et Esther la narratrice ne s'en prive pas pour prendre en flagrant délit de contradictions ses parents, pseudo cools, égratigner l'envers du décor, leurs jeux de rôles, bien sûr le père, dont on découvre peu à peu la nature réelle de sa personnalité, son côté maladif, ses crises maniaques, son obsession pour des listes de tâches, mais la mère aussi, soumise, totalement soumise à l'empreinte d'un mari qui ressemble davantage à un pervers narcissique qu'à un doux poète rêveur épris des chansons de Bob Dylan ou de Joan Baez.
Le style est fluide, nous emporte, nous tient dans une sorte de jubilation enfantine, jusqu'au moment, où l'on sent que quelque chose ne va pas dans le décor, et dès lors justement on a envie d'en savoir davantage, cela devient comme une sorte de thriller psychologique.
Chaque personnage est décrit avec ironie et finesse. L'auteure n'épargne personne, ni la société, ni les religions, qui font de ce roman un univers essentiel à la narration du récit.
Plusieurs thèmes ici sont conviés avec délectation, l'enfance, l'héritage familial, la filiation... Mais aussi plus tragiquement le mal-être...
Au final, j'ai fredonné ce couplet d'une merveilleuse chanson de Maxime le Forestier que m'a évoqué le roman, au passage de certaines pages :
« On choisit pas ses parents, on choisit pas sa famille
On choisit pas non plus les trottoirs de Manille
De Paris ou d'Alger pour apprendre à marcher
Être né quelque part
Être né quelque part, pour celui qui est né
C'est toujours un hasard »
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