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Critique de 5Arabella


Représentée en 1599, écrite sans doute la même année, la pièce est publiée pour la première fois en 1623, le texte est jugé excellent par les spécialistes avec peu de coquilles et de passages controversés. La pièce n'est pas aisée à caractérisée : tragédie basée sur des faits historiques, elle échappe en partie au genre du drame historique, de la chronique, pour se diriger vers la tragédie, sans en être complètement une. Elle est souvent qualifiée de « pièce de transition ». L'enchaînement des événements historiques est surtout vu à travers le retentissement qu'il a sur les personnages, auteurs et témoins, l'essentiel est la façon dont ils vivent et ressentent l'action, comment elle les transforme, le moment essentiel étant le meurtre de César.

Shakespeare, pour bâtir la trame de sa pièce, s'est largement inspiré de la traduction anglaise que North a effectué à partir de la traduction faite par Amyot des Vies des hommes illustres de Plutarque. Il suit de près sa source, la modifiant surtout pour resserrer l'action de son drame.

Au premier acte, César vient de rentrer après sa victoire sur Pompée. Il est au sommet de la puissance. Certains sénateurs romains craignent qu'il ne veuille devenir roi et enterrer définitivement la vieille république. Un devin met en garde César : il doit se méfier des Ides de Mars. César se rend aux jeux, où Antoine lui propose la couronne, que César refuse. Devant la menace, Cassius, qui mène les conjurés projette de gagner à leur cause Brutus, un proche de César, qui passe pour un modèle de vertu républicaine et qui donnerait un grand poids à la conjuration.

A l'acte deux, les conjurés amenés par Cassius se rendent chez Brutus, qui finit par se ranger à leurs raisons, le meurtre est décidé et organisé. César hésite à sortir, sa femme Calpurnia, qui a fait des rêves prémonitoires, veut l'en dissuader. Il cède dans un premier temps, mais Décius, l'un des conjurés, le fait changer d'avis. César se dirige vers le Sénat entouré par ceux qui veulent l'assassiner.

Au troisième acte, le meurtre à lieu. le population est terrifiée et partagée devant cet acte dont elle ne comprend pas les tenants et les aboutissants. Brutus se propose de parler à la foule pour expliquer l'acte des conjurés et rassurer tout le monde. Les gens se rendent à ses raisons. Mais il permet à Marc Antoine de parler à sa suite pour faire l'éloge de César. Ce dernier retourne le peuple, et le déchaîne contre les meurtriers de César.

Au quatrième acte, Antoine et Octave, à qui ils se sont adjoint pour un temps Lépide, prononcent les exécutions et proscriptions et préparent la guerre. Dans le camps des conjurés, une dispute éclate entre Brutus et Cassius. Ils finissent par se réconcilier et à décider le plan de bataille à venir. Brutus, seul dans sa tante, voit le spectre de César.

Au cinquième acte, le dénouement tragique arrive. Octave et Antoine sont vainqueurs, Cassius, puis Brutus se suicident.

La pièce est riche et complexe, elle comprend de très nombreux personnages, plus ou moins épisodiques pour certains. Elle se passe en deux journées, séparées par un temps indéterminé : celle de la préparation du meurtre, et des deux discours, puis celle de la bataille finale. A l'intérieur de ces deux moments, tout est extrêmement condensé.

Les caractères de tous les personnages sont très précisément dessinés : César, au faîte de sa puissance, inflexible, mais affectueux avec ceux qu'il aime, sensible aux présages, physiquement fragile (épileptique, sourd d'une oreille) reste une énigme : voulait-il vraiment devenir roi ? Ou les conjurés ont-ils anticipé un péril qui n'avait pas lieu d'être ? Brutus, honnête jusqu'à l'excès, jusqu'à la naïveté, se laisse un peu manoeuvrer par Cassius pour entrer dans la conjuration. Il provoque au final la guerre civile et ouvre la porte à la prise de pouvoir par le triumvirat, et porte dans sa conscience la mort de César. Cassius, envieux et peu scrupuleux, est un ami sincère. Tous ont leur petitesse et leur grandeur. La discordance entre les valeurs, les principes, qui poussent à l'action et les résultats de cette dernière, définissent l'essence même de la tragédie, qui met en valeur une forme d'impuissance humaine, sans intervention divine comme dans les tragédies antiques.

La question du pouvoir en semblerait presque au second plan, même si évidemment elle est présente. C'est l'incapacité de la foule, du nombre, à décider, à penser, à prendre la direction des événements, alors qu'ils en ont la possibilité, qui me frappe dans la pièce. le peuple romain ne sait que penser du meurtre, il suit dans un premier temps Brutus, avec de céder au discours faisant appel aux sentiments et à la flatterie d'Antoine. Un rien à un moment donné, fait pencher la balance.

Une pièce passionnante, même si difficile à représenter.
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