AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
>

Critique de Oliv


Friand de tout ce qui touche à l'histoire de l'Europe de l'Est, cela faisait longtemps que je voulais découvrir ce roman d'Henryk Sienkiewicz... C'est désormais chose faite grâce à l'opération Masse Critique, que Babelio et l'éditeur en soient remerciés !

Récemment paru aux éditions Libretto, "Par le fer et par le feu" n'est pas une véritable nouveauté, loin de là, mais une réédition légèrement remise au goût du jour d'un grand classique de la littérature polonaise. Le dernier tirage datait de 1992 et était épuisé depuis des années.

Difficile de résumer en quelques lignes une épopée de plus de 700 pages, où foisonnent des personnages et des faits historiques méconnus sous nos latitudes... Pour faire simple, l'action du roman se déroule au milieu du 17ème siècle et a pour cadre la révolte des Cosaques menés par Bogdan Khmelnitsky ; ces événements dramatiques vont mettre à mal l'unité entre la Pologne et l'Ukraine qui, avec la Lithuanie, formaient alors un seul état. Quand on songe aux soubresauts politiques survenus ces derniers temps dans ces confins de l'Europe, ce récit d'une Ukraine à l'identité mal définie, tiraillée entre les influences occidentales et orientales, penchant alternativement vers Varsovie et Moscou, a des résonances très actuelles...

Mais il faut surtout garder à l'esprit le contexte dans lequel le roman a été écrit, à la fin du 19ème siècle, lorsque la Pologne avait cessé d'exister en tant que nation indépendante : Henryk Sienkiewicz n'a jamais caché ses visées patriotiques, ni sa nostalgie d'une Pologne puissante, capable d'imposer sa volonté dans toute l'Europe de l'Est ; une puissance symbolisée par les fameux "hussards ailés", corps d'armée auquel appartient le personnage principal du roman. En toute logique, l'auteur présente les événements avec un regard polonais. Sans toutefois tomber dans un manichéisme excessif, il ne faudra pas s'étonner si les héros parés de vertus chevaleresques se trouvent majoritairement dans le camp des fidèles au roi, et les fourbes, les traîtres et les pillards dans celui des Cosaques... Ainsi le rebelle Bogdan Khmelnitsky, figure exécrée de "grand méchant" dans le roman, est-il aujourd'hui un héros national en Ukraine au point d'apparaître en effigie sur les billets de banque, après avoir prêté son nom à une prestigieuse distinction militaire soviétique...

Les luttes entre cosaques Zaporogues et Polonais rappellent certaines scènes du "Tarass Boulba" de Nicolas Gogol. Mais il y a surtout dans cette fresque historique, à la saveur délicieusement surannée des films de cape et d'épée en Technicolor, quelque chose des grands romans d'Alexandre Dumas, avec ses belles dames amoureuses, ses serviteurs fidèles, ses duels d'honneur et ses accès de bravoure... On pourra d'ailleurs effectuer un rapprochement entre d'un côté les quatre compagnons Jean, Michel, Zagloba et Longinus, et de l'autre D'Artagnan, Athos, Porthos et Aramis.

Au bout du compte, on a là une illustration de ce qu'est un bon roman d'aventures populaire, au sens le plus noble du terme — celui-ci ayant été écrit à une époque où la volonté de toucher un large lectorat n'excluait pas une irréprochable qualité littéraire. Originellement publié sous forme de roman-feuilleton, "Par le fer et par le feu" bénéficie de l'efficacité du format : les péripéties s'enchaînent à la vitesse d'un cheval au galop, le souffle épique retombe rarement, si bien que les 700 pages de ce gros volume s'engloutissent sans peine et, comme pour tout bon feuilleton, c'est avec une certaine tristesse que l'on quitte des personnages auxquels l'on s'était attaché.
Commenter  J’apprécie          161



Ont apprécié cette critique (12)voir plus




{* *}