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Critique de gavarneur


La préface (voyez ma citation) est à lire absolument pour tous les amateurs de Claude Simon ou du nouveau roman ; l'auteur répond à la demande de Gaëtan Picon et nous y éclaire sur son processus créatif. La suite de l'ouvrage remplit le cahier des charges de la collection Les sentiers de la création par l'exemple : elle illustre la méthode décrite dans cette préface par un texte typiquement Simonien et abondamment illustré. le tout est superbement imprimé, beau papier, typographie originale, qualité des images...

J'ai aimé tous les romans de Claude Simon qui me sont passés entre les mains. Celui-ci préfigure non seulement Les corps conducteurs, qui en retravaille le texte et que je n'ai pas lu, mais aussi par exemple Tryptique qui m'avait ébloui. Comme son nom l'indique, Triptyque est fondé sur trois images, dont les descriptions, commentaires et prolongements sont mêlés dans le texte. Orion aveugle se présente comme une suite de phrases qui décrivent des images fixes ou des scènes, de nature diverses et parfois difficiles à identifier. le lecteur est, au moins au début, désorienté par le passage d'une image à un autre à certaines fin de phrase (le texte est monoparagraphique). Les images sont nombreuses. Peuvent-elles être groupées ? le lecteur, habitué à une certaine continuité narrative, voudrait les associer : par exemple par proximité géographique (les rues d'une ville qui pourrait être New York sont-elles celles où un homme s'assied sur une bouche d'incendie, cet homme est-il celui qui sort d'une consultation médicale...). le lecteur aimerait aussi, en plus de voir dans le texte l'application de la « méthode » d 'écriture décrite au début de la préface, y trouver une réflexion sur le rôle de l'écrivain (sujet d'un congrès décrit par bribes) et sur « l'aventure singulière du narrateur qui ne cesse de chercher, découvrant à tâtons le monde dans et par l'écriture » (fin de la préface). J'ai beaucoup aimé explorer ces pistes, tout en m'émerveillant de la qualité des descriptions, précises, évocatrices, au vocabulaire raffiné.
Voilà de quoi faire un beau texte. Mais le livre contient aussi une vingtaine d'illustrations : oeuvres d'art diverses (reproduction d'un fragment d'un tableau de Poussin d'où vient probablement le titre en couverture, tableau complet vers la fin de l'oeuvre), photos d'objets usuels, de sculptures, de collages, dessins (main écrivant, dessin de l'auteur!!!). Que font-elles là ? Parfois, elles sont complètement décrites, en particulier l'analyse du tableau de Poussin et de son détournement des lois de la perspective est prenante et bluffante, parfois elles évoquent un objet ou un lieu fugitivement décrit dans le texte, parfois elles font un pas de côté, ouvrant une piste parallèle, toujours posant au lecteur des questions non définies mais très riches. Un exemple : à quelques pages de la description d'un gratte-ciel la nuit dont Claude Simon décrit la structure devinée, il insère une photo d'une sculpture de Louise Nevelson, complexe montage, noir bien sûr, d'objets et de morceaux de bois dont la ligne générale est verticale.

Est-ce la porte d'entrée idéale vers l'oeuvre de Claude Simon ? C'est au moins, grâce à cette préface précieuse (et semble-t-il célèbre) une excitante occasion d'essayer de faire jouer des clés de lecture dans l'ensemble de l'oeuvre de cet écrivain nobelisé. Je n'ai pas parlé de tous les thèmes qui se mêlent dans le livre, mais j'encourage vivement à les découvrir, en gardant à l'esprit la réflexion sur la nature du Roman, nouveau ou non.

Note 1 : êtes-vous sûrs de savoir conjuguer le verbe saillir?
Note 2 : j'écris cet avis dans l'urgence, loin de chez moi, avec une réflexion un peu courte, c'est dommage
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