Puisqu'il est si difficile d'être Marx, soyons des mites : mitons, mitons le tapis de l'extractivisme productiviste néolibéral destructeur qui recouvre le monde. A défaut d'avoir du génie, nous aurons de la main d’œuvre, de l'énergie réalisatrice, pour détourner cet héritage d'une culture des loisirs, du temps libre et de l'éducation généralisée phagocytée par la consommation et le repli numérique sur soi, vers la lutte joyeuse et collective pour défendre le tissu du vivant.
Nous héritons d’une culture dans laquelle, dans une forêt, devant un écosystème, on « n’y voit rien », on n’y comprend pas grand-chose, et surtout, ça ne nous intéresses pas : c’est secondaire, c’est de la « nature », c’est pour les « écolos », les scientifiques et les enfants, ça n’a pas de place dans le champ de l’attention collective, dans la fabrique du monde commun.
Baptiste Morizot
Extrait d'une conversation à bâtons rompus entre Baptiste Morizot et Vinciane Despret :
VD : Par exemple, quand un auteur écrit "le territoire, c'est des créations de voisinage", je tire le fils un peu plus loin, et je me dis qu'on a peut -être affaire des compositions, voire des partitions - au sens musical. Et puis on peut même aller un peu plus loin, et se dire que ce qui intéresse les oiseaux, ce sont les relations avec les autres oiseaux, et finalement pas des histoires de reproduction, de territoire à défendre ou à conquérir, etc..................................C'est en fait un exercice de sensibilité : exagérer, c'est à dire ici intensifier et amplifier, aller trop loin, pour que ce qui nous semble aujourd'hui moins extravagant, mais toujours impossible, nous paraisse finalement familier et important.
C’est bien par amour de ce monde qu’il faut le changer et pas par haine de lui, il n’y en a qu’un et nous sommes de ce monde jusqu’au bout des ongles.
Baptiste Morizot