AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
>

Critique de Lesmotsdelivrent


J'ai lu ce roman dans le cadre du challenge Mars au féminin et Les femmes sous la lune (instagram).

J'ai découvert Rivers Solomon avec son roman L'incivilité des fantômes, qui m'avait énormément plu. Je savais que je ne serai pas déçue avec Les Abysses, d'autant plus que le résumé du roman m'a tout de suite accrochée.

Ce roman d'anticipation est à la fois tragique et plein d'espoir. Il fait écho à ces femmes noires esclaves transportées sur des bateaux négriers qui étaient jetées par dessus bord lorsqu'elles tombaient enceinte, comme de vulgaire objets.

C'est un récit très fort dans lequel on découvre un peuple sirène, né de ces femmes jetées des vaisseaux négriers. Leurs enfants ont survécu dans les eaux et ont créé cette peuplade sous-marine, les Wajinrus, dont Yetu, l'héroïne, est dépositaire de l'Histoire des siens. Elle emmagasine dix siècles de souvenirs, c'est elle qui supporte les drames, la douleur, la souffrance, jusqu'à un rituel annuel où elle les renvoie à ses semblables, avant de les reprendre. Mais Yetu, avec ce poids sur les épaules, finit par craquer et fuir vers le monde des deux-jambes, à la surface.

Ce roman est plus qu'une simple histoire, c'est une véritable allégorie de la mémoire et de l'importance de se souvenir. Se rappeler du passé, c'est faire vivre sa culture mais c'est aussi un frein à se projeter dans l'avenir. C'est un magnifique voyage parabolique qui invite à se poser des questions sur sa propre identité, tout en incluant des messages très contemporains sur le genre, le racisme ou encore l'écologie.

J'ai trouvé le roman trop court. Beaucoup de thèmes y sont abordés et j'aurais aimé qu'ils soient creusés plus en profondeur. C'est dommage car ce sont des sujets qui méritent qu'on en parle et qu'on les développe, qu'on porte à la connaissance du monde ce que ces femmes ont vécu. Malgré tout, j'ai beaucoup aimé cette incursion dans le monde des Wajinrus, où tout est décrit de manière très symbolique.

Je ne peux pas terminer cette chronique sans évoquer la postface du roman, rédigée par Daveed Diggs, membre du groupe Clipping. L'idée originale de cette histoire ne vient pas de Rivers Solomon, mais d'un groupe de techno des années 90, Drexciya, qui a inventé ce mythe afrofuturiste d'une civilisation sous-marine issue des esclaves noires. Clipping a repris ce morceau dans son single The Deep. Rivers Solomon propose, dans ce court roman, une revisite à sa manière du mythe des Wajinrus.
Commenter  J’apprécie          40



Ont apprécié cette critique (4)voir plus




{* *}