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Critique de Nastasia-B


Je me souviens d'avoir débuté, il y a longtemps, mon commentaire de Sur la Route par : « Ceci n'est pas un livre, c'est un état d'esprit. » Eh bien je crois que je pourrais débuter celui-ci par une formule exactement similaire, tant l'impression laissée sur moi est du même type (mais non pas comparable).

Ici, l'auteur Natsume Sôseki écrit le roman d'une quête. Mais est-ce un roman ? Est-ce une quête ? Je ne sais… Car c'est si différent des écrits à l'occidentale, c'est si chargé de codes, qui me sont, pour bon nombre, inconnus, que je n'arrive guère à me prononcer. Bref, c'est spécial.

Au départ, j'ai vraiment adoré l'entrée en matière du roman, pleine de réflexion et de philosophie, le tout délicatement recouvert d'une fine couche de lyrisme. Et puis, est venue la narration, au sens le plus classique du terme, avec des personnages, des événements, si bien que l'impression première — très positive — est un peu retombée comme un soufflet, car, avons-le, l'auteur n'est pas franchement un as de l'intrigue.

Oui, c'est cela qui m'a un peu déroutée, cette espèce de mélange entre une introspection de haut vol teintée de poésie comme sut en faire Fernando Pessoa avec son Livre de l'Intranquillité et cette soupe narrative, plus prétexte qu'autre chose. Et puis, par moments, ça revenait, les phases méditatives, apaisantes et lyriques à la fois, mais sans le charme des débuts.

L'auteur, donc, nous fait prendre part à la quête personnelle du narrateur, un peintre japonais de Tokyo (Edo) qui souhaite se rendre dans la montagne la plus reculée pour toucher aux racines vraies de l'art, de la poésie tout particulièrement bien qu'il fût peintre, je le rappelle. C'est en cela que ce livre n'est peut-être pas si éloigné du roman de Jack Kerouac sus-mentionné, l'idée d'une quête d'un objet immatériel. Il appartient peut-être également à la catégorie de ceux qu'a signés Hermann Hesse, son Siddhartha, son Loup de Steppes, par exemple, mais avec des tonalités bien à lui, très extrême-orientales, plus proches à certains égards de celles d'auteurs nippons du XXème tels que Kawabata ou Mishima.

Vous voyez, c'est assez étrange comme objet littéraire. Pas désagréable, de mon point de vue, mais pas non plus à m'y sentir totalement à l'aise : un rythme lent, réflexif, méditatif et contemplatif, mais pas que, des épisodes narratifs où l'on suit des personnages, mais pas que, et puis surtout, une gageure insurmontable, à savoir, essayer désespérément de pister, de s'approcher de manière asymptotique de ce que pourrait être un être poétique, le tout sur fond de séparation entre un homme et une femme couplé à un arrière-plan de guerre sino-russe.

Vous admettrez que ce n'est pas évident à définir un machin pareil, ça résiste à toute forme de catégorisation et je me demande encore, plusieurs semaines après en avoir terminé la lecture ce que je dois en penser. Peut-être est-ce cela finalement, l'accession à la poésie vraie, ne plus penser, lâcher prise, dériver sur l'onde, laisser glisser les lignes et les impressions sous nos yeux de lectrices et de lecteurs inconséquents… Quoi qu'il en soit, de cet avis comme de beaucoup d'autres choses, cela ne signifie pas grand-chose, et si le coeur vous en dit, allongez-vous sous les nuages, la nuque posée sur un oreiller d'herbes et laissez-vous porter…
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