AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
>

Critique de Wendat69


Pour qui connaît Albert Spaggiari, on aura à l'esprit à l'évocation de ce fameux nom un pied de nez magistral aux forces de l'ordre au travers du rocambolesque « casse du siècle » de 1976 à Nice. le message laissé sur le mur des coffres dévalisés par Spaggiari peut interpeller, l'auteur de « Faut pas rire avec les barbares » avait en effet inscrit aux murs : « Ni armes, ni violence et sans haine ».Quand on le met en miroir avec ce livre, on se dit qu'Albert Spaggiari, tissant sa légende de cambrioleur rejetant la violence, sait toutefois fort bien la décrire.

Le personnage, haut en couleur, ne fut pas qu'un malfaiteur renommé. Il maniait certes le chalumeau, mais aussi la plume, et a retranscrit dans ce livre une histoire du conflit indochinois particulièrement forte, où la violence, la description de faits qui font toute l'horreur de la guerre, sont racontés avec un certain cynisme, une forme de provocation, qui secoue parfois (souvent serait plus juste) le lecteur -un peu comme l'explosion d'une grenade défensive dans un abri confiné...

Le procédé narratif est particulièrement réussi, l'auteur fait parler à la première personne tous ses personnage. Bert, Riton, Romain, Borde et autres, se sont tous engagés sous le béret rouge dans la guerre d'Indochine : qui comme un gladiateur espérant trouver dans la gloire du combat fortune et affranchissement, qui à la recherche de la meilleure combine pour vivre comme un prince les pieds dans la boue, qui comme un enfant perdu dans le monde des Guerriers, pleurant sur sa faiblesse...

Tous ces hommes ont en commun d'avoir fait le choix de la grande bascule. Gredins ou bandits, mauvaises graines d'une société honnie ou rejetons puînés de familles confites, tous sont unis par la loi du pépin. Celui auquel est accroché leur destin en sautant de l'avion, et tous ceux qu'ils retrouveront en arrivant au sol...

Âmes sensibles, s'abstenir. Car il est vraiment question de « barbares ». Spaggiari, qui connut l'Indochine, décrit des scènes terribles, dont il se sert pour alimenter les réflexions intérieures de tous ses personnages. J'ai ressenti parfois la même amertume qu'à la lecture de Sniper, de Nikolai Lilin (ex-militaire russe relatant son expérience de la guerre de Tchétchénie).

On en prend donc plein les dents, et on espère secrètement que les lignes écrites sont pour l'essentiel sorties de l'imagination de l'auteur, et que son expérience du conflit reste moins sauvage que son récit. C'est à espérer, mais la guerre étant ce qu'elle est là, le ballet des crimes entourant tout « emballement de l'Histoire », donne toujours le vertige. le lecteur non-averti se prendra donc une claque, une sévère, de celles qui font danser les molaires.

Dies Irae (jours de colère), la Prose des Morts, telle est la conclusion de Spaggiari, qui a écrit ici un Requiem pour les barbares...
Commenter  J’apprécie          160



Ont apprécié cette critique (13)voir plus




{* *}