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Critique de observatoiresituationniste


La nature comme chant du possible.

Si l'existence précède l'essence, c'est que l'essence est possible, et donc la possibilité précède l'existence. La possibilité n'est ni l'essence, ni l'existence, mais la condition première de réalisation d'une existence. La possibilité contient donc l'essence de cette existence – à titre de possibilité. C'est en ce sens que l'essence peut précéder l'existence - qui la précède. En fait, l'antériorité de l'essence ou de l'existence est une fausse question, dans la mesure où l'existence et l'essence sont ontologiquement unies comme possibilité et que la possibilité ne dépend pas de sa réalisation physique pour exister. Autrement dit, l'existence de la possibilité est d'essence métaphysique. Si l'on entre dans les détails, juste ce qui est nécessaire, on s'aperçoit en effet que la question de l'antériorité ne se pose pas sur le plan physique, mais seulement sur le plan métaphysique. Sur le plan physique, il apparaît qu'émergent dans l'univers, de fait, des entités complexes à partir d'entités plus simples, mais que ces entités complexes ont des propriétés que n'ont pas en elles-mêmes, dans leurs caractéristiques physiques et aussi loin qu'on puisse les analyser, les entités plus simples, mais qu'elles les ont par contre à titre de pure possibilité ; de façon métaphysique. Un caillou ne contient pas en lui-même une maison, et ne comporte aucune des propriétés distinctives de ce qu'est une maison. Les propriétés de la maison sont des nouveautés qui demandent, pour être comprises, de ne pas se borner à analyser, même si c'est de façon extraordinairement fine, précise et efficace, les données physiques du constituant caillou. Pour comprendre la maison, il faut admettre que la maison était essentiellement possible sans pour autant exister en aucune façon physiquement dans le caillou. Ainsi la chronologie de l'émergence des choses n'est pas leur ontologie, et les propriétés physiques des choses n'en sont en rien l'essence, mais juste la façon d'exister. L'essence ne précède pas nécessairement l'existence, mais elle la précède possiblement, tandis que l'existence doit nécessairement précéder l'essence, mais en tant que possibilité de son émergence. Comme l'avait diagnostiqué Kierkegaard, le possible est la plus lourde des catégories. Il ne s'ensuit pas que toute possibilité doive nécessairement donner lieu à une existence, comme si c'était une nécessité, ce qui détruit l'idée même de possibilité, mais il s'ensuit que la possibilité emprunte les chemins de la nécessité pour donner lieu à une existence, d'où émergera une essence, pour conclure à son identité.
Il ressort de ce rapide périple métaphysique – sans temps mort, sans entraves – que tout ce qui existe a d'abord dû exister comme possibilité, et ceci n'est à son tour possible que métaphysiquement, sans quoi la chose existerait physiquement avant d'exister physiquement, ce qui est peut-être possible, mais juste comme absurdité. Cette antériorité ontologique du possible est simplement rationnelle, et cette rationalité est juste naturelle. Mais évidemment, aucun discours physicaliste ne saurait en balbutier ne serait-ce que la première phrase. La science physique reste clouée au sol, irremplaçable certes, sur lequel se dresse la maison de la connaissance. Il se peut que le petit poucet physicien retrouve, à l'aide de ses petits cailloux qu'il connait si bien, le chemin de la maison ; mais pour qu'il trouve la maison, qui est certes devant ses yeux, il faudra qu'il lève la tête.
Il ressort ensuite de ce plaisant voyage de raison, que la nature n'est pas une entité seulement physique, ni métaphysique, mais qui unit les deux, non comme les étages séparés d'une maison, mais comme l'unité de ses constituants. Et il en ressort enfin que ce qui unit ces constituants, c'est la possibilité comme totalité infinie ontologiquement antérieure à tout ce qui existe – du fait que tout ce qui existe peut –ou non – exister.
L'essence de la nature est que tout est possible, pas n'importe quoi, pas n'importe comment, mais naturellement.

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