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Citations sur Le Pianiste (107)

Demain, je devais entamer une nouvelle vie. Comment y arriver quand il n'y avait que de la mort derrière moi ? Quelle énergie vitale pouvais-je tirer de toute cette destruction ?
J'ai repris ma route. Un vent féroce secouait la ferraille des décombres, s'engouffrait en hurlant dans la bouche noire et béante des fenêtres calcinées. Le crépuscule est arrivé. La neige s'est mise à tomber du ciel assombri, plombé.

p.264
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Père a été le premier à reprendre la pratique de la musique. Il réussissait à s'abstraire de la réalité en jouant du violon pendant des heures, et si d'aventure on venait l'interrompre avec quelque mauvaise nouvelle il écoutait en fronçant les sourcils, ses traits s'altéraient un instant puis reprenaient une expression dégagée et il calait à nouveau son instrument sous son menton en répliquant chaque fois : "Ah ! peu importe... Dans un mois, les Alliés seront là, c'est certain..." Cette réponse immuable à toutes les incertitudes et difficultés de la période était pour lui une manière de refermer la porte qui protégeait son monde personnel, celui de la musique. Là où il était le plus heureux.

p.42
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Au bout de la rue obscure, j'ai aperçu une palissade en bois toute neuve dans la lumière des projecteurs: c'était la porte du ghetto.
Derrière elle vivaient des êtres libres de leurs mouvements, qui disposaient chacun d'un espace décent.
Ils résidaient à Varsovie, eux aussi.
Mais désormais plus un juif ne serait autorisé à passer par là.
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Les bulletins du front devenaient de plus en plus alarmants, et le 7 septembre, juste avant l’aube, nous avons été réveillés par des coups insistants à notre porte. Le voisin de l’appartement d’en face, un médecin, se tenait sur le seuil en hautes bottes militaires, veste de chasse et casquette, sac à dos sur les épaules. Malgré sa hâte, il avait estimé nécessaire de prendre le temps de nous prévenir que les Allemands marchaient sur Varsovie, que le gouvernement avait été évacué à Lublin et que tous les hommes valides avaient la consigne de quitter la ville pour se regrouper sur l’autre rive de la Vistule, où une nouvelle ligne de défense allait être constituée.
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Au début du printemps 1942, la chasse à l'homme qui avait été jusqu'alors systématiquement menée dans le ghetto s'est soudain arrêtée. Si cela ne s'était pas produit de la même manière deux années plus tôt, les gens en auraient été soulagés ; ils y auraient vu une raison de se réjouir, ils auraient caressé l'illusion que ce changement annonçait un avenir moins sombre.
Mais là, après vingt-quatre mois de pratique quotidienne des Allemands, personne ne pouvait encore s'abuser : ils mettaient fin aux rafles tout simplement parce qu'ils avaient trouvé un meilleur moyen de nous tourmenter.
La question était donc de savoir quelle nouvelle idée leur était venue.
Aussitôt, les hypothèses les plus échevelées ont commencé à circuler, et c'est une anxiété accrue, non un retour au calme, qui a prévalu
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Dix jours ont passé, puis douze, puis quinze. J'étais si affaibli que je n'arrivais même plus à me traîner jusqu'au robinet. Si la Gestapo m'avait surpris à ce stade, je n'aurais pas été capable de me prendre.
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Puis arrivait inévitablement le moment où l'une de vos connaissances laissait échapper une remarque anodine : ce petit groupe s'entendait si bien, prenait tant plaisir à bavarder de concert, qu'il serait certainement fort agréable de partir ensemble en excursion par un beau dimanche. A Otwock, disons ? C'est l'été, n'est-ce pas, le temps paraît vouloir se maintenir au beau fixe... Une envie simple, quel obstacle pourrait vous dissuader de la réaliser ? Et sur-le-champ, même : il suffit de se lever, de payer les consommations, de sortir dans la rue, de prendre la direction de la gare bras dessus bras dessous avec vos joyeux compagnons, d'acheter les billets et de sauter dans le train de banlieue... Oui, l'illusion était parfaite, tous les ingrédients étaient réunis pour vous permettre d'y croire, jusqu'au moment où vous vous retrouviez en face du mur.
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Les premiers décrets promettant la peine capitale aux récalcitrants ont commencé à être placardés sur les murs. Le plus important, qui concernait le commerce du pain, stipulait que toute personne surprise en train d'acheter ou de vendre cette denrée de base à un prix supérieur à ceux pratiqués avant guerre serait abattue sur-le-champ.
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C’est ici que j’allais perdre deux de mes grandes illusions : celle que nous étions tous solidaires face à l’adversité, et celle que tous les Juifs savaient apprécier la musique.
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Alors que nous avions reformé les rangs, il nous a lancé encore un autre ordre inattendu : « Chantez ! «  Nous l'avons observé, surpris. Il a manqué perdre l'équilibre, s'est rétabli en lâchant un rot sonore : « Chantez quelque chose de gai ! » Très amusé par sa plaisanterie, il a commencé à s’éloigner. Soudain, il s'est arrêté et il nous a invectivés, d'un ton menaçant : « Et chantez bien, et chantez fort ! »
Je ne sais pas qui a été le premier à entonner l'air, ni pourquoi c'est cette chanson de soldat qui lui est venue à l'esprit. En tout cas, nous avons joint notre voix à la sienne. Le principal était d'obéir.
C'est seulement aujourd'hui, en repensant à la scène, que je m'aperçois à quel point le cocasse se mêle souvent à la tragédie. Car en cette nuit de réveillon une poignée de Juifs exténués descendaient les rues d'une cité où les manifestations de patriotisme polonais étaient punies de mort depuis des années en chantant à pleins poumons, et en toute impunité, l'hymne si évocateur de la conscience nationale polonaise : « hej, strzelcy wraz ! », « Ohé, francs tireurs, debout ! »
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