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Critique de Rickola


L'idée de cette bande dessinée est simple : chaque tome devait raconter un mois dans la vie d'une jeune enfant trisomique dont la particularité est que son handicap se voit peu physiquement. Ce premier tome se concentre donc sur le printemps, et nous avions la promesse de trois tomes à venir, qui ne sera malheureusement jamais tenue. C'est d'autant plus dommage que ce premier tome met en place la famille et les éléments qu'elle vit avec talent, donnant envie de voir comment les diverses situations évoluent.

Avant d'aborder la BD à proprement parler, petit retour sur sa genèse. Cette bande dessinée est le fruit de l'envie de Dargaud et Kana de proposer une collaboration entre un auteur franco-belge et un mangaka japonais. Jiro Taniguchi étant déjà en contact avec l'éditeur, et souhaitant travailler sur une BD au format européen, le rapprochement s'est fait naturellement. Morvan, de son côté, vivant entre la France et le Japon, était très bien placé pour écrire une histoire à destination d'un mangaka japonais. Ainsi, un vrai échange s'est amorcé entre les deux artistes, Taniguchi venant en France effectuer des repérages (qui s'avèrent payants si je me base sur le passage se déroulant à Lille, où l'on reconnait sans peine la gare Lille Europe), et Morvan lui envoyant des photos de moments de vie ordinaires dans un cadre français. de plus, le scénariste français est allé dans l'IME de Soissons rencontrer des enfants en situation de handicap afin de mieux saisir leurs émotions et la façon dont ils vivent.

Pour finir sur le contexte, il est intéressant de signaler que Morvan travaillait déjà auparavant sur des passerelles entre BD européenne et japonaise, puisqu'il avait signé des collaborations avec Toru Terada pour le Petit Monde, et avait signé une version manga de Spirou, sans parler de quelques scénarios de son cru directement adaptés en manga.

Ceci étant posé, qu'en est-il de cette bande dessinée ? Nous suivons donc Capucine, jeune enfant trisomique qui fête ses huit ans. Pour cette occasion, un repas de famille est organisé durant lequel son père lui offre un chiot, qu'elle nomme Garçon (car c'est un « garçon »). Nous suivrons pendant ce tome le chemin de toute la famille et verrons les problématiques liées au fait d'élever une enfant handicapée. On constate que le couple est fragilisé par le fait de devoir organiser toute sa vie en fonction de ce handicap qui prend beaucoup de place. La pauvre Capucine comprend bien que ses parents ne sont pas bien, mais n'arrive pas à savoir pourquoi… Mais au cours du tome, une évolution est amorcée : le père de Capucine, surement le personnage le plus mis en avant avec la fillette, se rend compte qu'il se repose trop sur sa femme pour l'éducation de leur fille. de son côté, son rapport à son chien fait énormément de bien à Capucine et semble amorcer le début d'une évolution chez elle, qui souhaite laisser de côté son Doudou imaginaire pour être présente pour l'animal.

Je passe certains éléments qui pourraient relever du spoil, mais sachez que tous les éléments sont très bien développés, rendant cette famille attachante et donnant envie de les voir évoluer au mieux. Mais c'est ici que le projet trouve sa limite, puisque nous n'en saurons jamais plus malheureusement, alors que ce premier tome est porteur de belles promesses. Il faudra donc faire avec une fin ouverte des plus frustrantes…

Au-delà de l'écriture, l'esthétique est également très travaillée, comme on pouvait s'y attendre avec Taniguchi. le fait que l'on soit dans une BD française implique un grand format qui diffère de ses travaux habituels, et surtout, des couleurs ! Et en l'occurrence, le travail sur les couleurs est vraiment de toute beauté, rendant chaque scène très vivante et palpable. Taniguchi a toujours eu un talent fou pour nous rapprocher des personnages et créer des ambiances, et cela se ressent particulièrement dans ce volume. Une fois encore, rien n'est donc plus frustrant de se dire qu'on n'en verra pas la suite.

Avant de conclure, un petit mot sur la disponibilité de l'ouvrage. Personnellement, je l'ai emprunté en médiathèque, et j'ai constaté qu'il était difficile à trouver en librairie, voire même introuvable. Je pense que beaucoup de versions d'occasion doivent circuler, mais c'est tout. Ça me gène un peu de parler d'une BD compliquée à trouver, puisque cela empêchera peut-être des personnes intéressées de se la procurer, mais j'avais quand même envie de l'évoquer, car c'est un projet assez original et très intéressant, bien que frustrant de par sa nature d'oeuvre inachevée. de plus, j'imagine mal une réédition compte tenu du fait qu'elle restera sans suite.

En résumé, Mon Année est un très beau projet dans l'idée, sur un sujet fort traité avec talent et intelligence, qui ne connaitra malheureusement jamais d'aboutissement. Il est de plus compliqué à trouver aujourd'hui du fait qu'il ne soit plus édité, mais c'est malgré tout une BD que je recommande si vous le trouvez en médiathèque ou d'occasion à petit prix. Une belle oeuvre, qui aurait vraiment mérité d'aller à son terme.
Lien : https://apprentiotaku.wordpr..
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