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Critique de ElizabethBennet


À mi-chemin entre Bret Easton Ellis (à qui le roman est dédicacé) et le Cercle des Poètes disparus, le Maître des illusions nous plonge dans les turpitudes d'un petit groupe d'hellénistes aussi arrogants que mystérieux, placés sous la houlette du capricieux professeur Morrow. Perdue au coeur du Vermont, la médiocre université de Hampden abrite un cénacle d'étudiants férus de culture antique, capables de citer Homère dans le texte et passionnés de rituels mystiques.

Sur le papier, l'intrigue a l'air alléchante : grec ancien, campus américain, personnages énigmatiques, crimes sanglants liés aux rites dionysiaques... Et pourtant, à la lecture, on déchante très vite : longueurs, références à la culture grecque réduites à de vagues citations éparses, ambiance étouffante, personnages antipathiques...

Première source d'exaspération : l'aspect répétitif de l'intrigue. En 700 pages, les étudiants n'assistent qu'à deux ou trois cours de grec (c'était bien la peine de faire autant de foin autour de la personnalité hors norme de leur professeur...) mais passent leur temps à faire la fête, à boire (de à avoir la gueule de bois le lendemain) et à se bourrer d'anxiolytiques et autres somnifères. Au moins, Bret Easton Ellis, lui, a le bon goût de faire court, lorsqu'il traite de ces thèmes ad nauseam. Mais Donna Tartt ne semble pas se lasser de nous décrire encore et encore cette jeunesse dorée qui s'étourdit dans l'ivresse et les plaisirs faciles, et à vrai dire, cela devient vite lassant.

De plus, les personnages sont extrêmement déplaisants : on essaie désespérément de s'identifier au narrateur, mais il est tellement creux, lisse et surtout passif, à tel point qu'on se demande parfois s'il se sent vraiment concerné par sa propre histoire, tant il se montre indifférent aux autres, préférant s'apitoyer sur son sort et noyer sa déprime dans le whisky. Quant aux autres, ils sont au mieux transparents (Charles et Francis manquent tout de même sacrément d'épaisseur, au point qu'il est difficile de les différencier pendant la 1re moitié du roman), au pire méprisants (comme Henry), exaspérants (comme Bunny), ou malsains (comme Camilla, dont le côté pervers et manipulateur pointe discrètement sous ses airs angéliques et éthérés).

Bref, le lecteur ne peut s'attacher à aucun d'eux, et dès lors a bien du mal à s'intéresser à leurs déboires, surtout délayés sur près de 700 pages. Sans parler de leur propension invraisemblable à s'exprimer spontanément en grec ancien, et de leur supériorité affichée envers le commun des mortels, particulièrement agaçante.

À tout cela s'ajoute une déception de taille : alors qu'on aurait pu s'attendre à un thriller, rythmé par les rebondissements, les premières lignes anéantissent tout suspense en nous révélant l'un des passages-clés du roman, ce qui là encore conduit fatalement l'intrigue à s'embourber et les longueurs à s'accumuler, d'autant que l'écriture, qui se veut percutante et distanciée, n'est finalement ni originale, ni convaincante.


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