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Critique de Marie-Nel


Je découvre Dominique Terrier avec ce recueil de nouvelles. Il est déjà l'auteur d'un roman Tuez moi demain publié aux éditions Les carnets à spirale. J'ai beaucoup aimé son style d'écriture, incisif, imagé, direct. Il ne prend pas de gants pour expliquer les choses, il les dépeint avec beaucoup de justesse, sans enjoliver.

Lire des nouvelles est toujours un exercice particulier. Il y a mes adeptes de la lecture dans le désordre, ou encore d'en lire une de temps en temps. Moi, je préfère tout lire en même temps et dans l'ordre où l'auteur nous les propose. Je me dis toujours qu'il a plus ou moins fait un ordre dans la rédaction. Autant, les premières auraient pu se lire indépendamment, autant certaines sont à lire ensemble. Il a même créé au sein d'une même nouvelle, plein d'autres, comme s'il y avait des chapitres. Ces grosses nouvelles ont une trame et suivent une suite logique.

Dans les premières histoires plus indépendantes, l'auteur nous brosse le portrait d'hommes ou de femmes, où les uns trompent les autres, où il est question également de voyous, de bandits, une sorte de satyre sociale des rapports humains. le ton est très vif, emprunt d'humour avec une pointe d'argot qui n'est pas sans rappeler le style de Michel Audiard, n'hésitant pas à le citer comme cette phrase que j'ai relevée et qui me fait sourire à chaque fois : « Un intellectuel assis va moins loin qu'un con qui marche ». J'ai eu d'ailleurs plus d'une fois l'impression d'entendre la voix de Bernard Blier pour nous raconter les scènes. Dominique Terrier n'hésite pas d'ailleurs à citer le grand cinéaste.
Certaines nouvelles sont très courtes, un peu moins d'une page. D'autres sont au contraire plus longues. Par exemple, dans This is the end, on trouve un style d'écriture très haché, avec des phrases ne comportant parfois qu'un seul mot. La globalité de l'histoire est coupée en plusieurs nouvelles qui ont des titres de chanson. L'auteur emploie d'ailleurs un style très musical, n'hésitant pas à mettre des extraits de chanson.
Dans Mon clavier s'appelle Christian, il nous conte l'histoire d'un écrivain, son histoire peut-être, qui écrit tous les jours sur son ordinateur dont le clavier est prénommé Christian. Il donne avec beaucoup de modestie des conseils d'écriture, parle des sources d'inspiration, il fait également mention de son premier roman. Il parle également de la lecture, sur liseuse qui l'avait éloigné un temps du livre papier. Il nous explique par exemple qu'il est plus adepte de la forme que du fond d'un écrit, où il nous complète une citation de Michel Audiard en disant : «  Ce n'est pas parce qu'on a rien à dire qu'il faut s'arrêter d'écrire » Il nous explique également qu'à contrario de ce qui est tout le temps dit qu'il ne faut pas raconter sa vie, lui pense que justement il faut la raconter et la retranscrire car c'est le meilleur sujet que l'on connait. J'ai beaucoup aimé cette nouvelle où on voit l'envers du décor d'un écrivain. Je retiendrai un de des nombreux conseils, qui dit qu'il faut aimer la lecture pour aimer l'écriture, qu'il faut aussi être curieux et que si on a ces deux ingrédients on a forcément de l'imagination….la recette d'un bon écrivain en quelque sorte…
J'ai également beaucoup aimé les deux dernières grosses nouvelles, où il nous parle plus intimement de lui. Dans Quand j'étais gone il nous parle de son enfance à Lyon, à l'école primaire puis au collège, avec sa grand-mère pu aux boules avec son grand-père, ses promenades au parc de la Tête d'Or, de ses jeudis sans école où il allait au cinéma, de ses vacances en Aveyron, du catéchisme, de ses débuts en apprentissage. Il ponctue le tout avec des anecdotes, des spécialités culinaires ou autres de cette ville. Et il parle aussi des émissions et feuilletons télévisés qui ont bercé son enfance. J'ai retrouvé alors mes propres souvenirs avec Skippy, Mannix ou encore Les Envahisseurs. Je ne suis pas Lyonnaise d'origine, mais j'ai eu l'occasion déjà de me promener dans Lyon et j'ai retrouvé certains endroits, certains restaurants et spécialités.
Ensuite, il continue de brosser son parcours dans les Mémoires d'un prolétaire en nous parlant de sa vie adulte, marié avec des enfants, habitant la campagne et devant faire des kilomètres pour aller à son travail. Il parle d'ailleurs beaucoup de celui-ci qui se fait à l'usine, à la chaine. Il raconte son implication dans le syndicalisme pour faire bouger les choses. Et en même temps situe cet engagement dans le contexte politique du pays, avec l'arrivée du socialisme, l'espoir que cela a créé, les désillusions également, les périodes de cohabitation, les meetings de syndicats où il a pu rencontrer Georges Marchais. Il a déjà l'âme d'un écrivain et il allie ces deux notions en publiant au sein de son entreprise un petit journal, le Pélican, où il parle de toutes ses actions. On le quitte environ à ses quarante ans. J'ai travaillé en usine et j'ai retrouvé certaines préoccupations qu'étaient les miennes à cette époque là.
J'ai beaucoup aimé ces nouvelles, où je me suis sentie très proche de l'auteur. En plus, il a employé la première personne du singulier pour raconter. Ce « je » permet de rentrer encore plus dans la tête de l'auteur et d'être au plus près de ses pensées, un sentiment de profonde intimité avec ses ressentis. le style n'est pas le même par rapport aux autres nouvelles, il y a moins d'argot, il est beaucoup plus « littéraire » et moins parler. J'ai apprécié cette faculté qu'a l'auteur de différencier son écriture selon ce qu'il veut raconter.

Pour conclure, j'ai passé un très bon moment de lecture avec toute la multitude de personnages et d'univers que l'auteur nous invite à visiter. Des moments distrayants mais également très enrichissants et intimistes. J'espère ne pas avoir été trop bavarde et surtout vous avoir donné envie de découvrir ces nouvelles et Dominique Terrier à l'occasion. Pour ma part, ce sera un grand plaisir pour moi de le découvrir dans son roman Tuez moi demain qui est annoncé comme un polar inspiré d'authentiques faits réels et dont le titre est un programme à lui seul… de quoi mettre l'eau à la bouche…
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