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Critique de Eskalion


Est- il encore possible de douter un seul instant que la poésie ne puisse pas avoir sa place dans un roman policier ? Si certains s'interrogent encore, je les invite alors à lire les romans de Johan THEORIN pour s'en convaincre.

Les oeuvres de cet auteur nordique ressemblent à des aquarelles littéraires, où les personnages et les paysages sont esquissés d'une plume de mots au trait léger, qui glisse et se confond sur la lisière des pages .

Car c'est bien là la force de cet auteur. Son écriture vous enveloppe comme une brume venue du large, vous fait lâcher subrepticement vos repères, vous pousse, vous transporte délicatement jusqu'au milieu des terres d' Öland.

Et là, il vous semble que la brise qui parcourt la lande vous murmure des choses à l'oreille, vous parles de secrets longtemps enfuis dans les souvenirs des habitants de cette îles.

A la fin du roman, peut être ressentirez vous alors comme un doux flottement, un léger engourdissement. Une impression floue que quelque chose s'est imprégné dans votre esprit au fil des pages.

Peut être même aurez vous la vague impression d'avoir aperçu un instant des ombres furtives, d'avoir entendu des bruissements, des chuchotements faire écho au vent.

« le sang des pierres » est le troisième opus de l'oeuvre de Johan THEORIN, qui prend une nouvelle fois pour cadre la petite île d'Öland. Une île qui peu à peu sort de sa torpeur hivernale pour s'enivrer des premiers embruns printaniers, et où la lumière ramène à la vie et à la conscience des choses.

C'est ici que vit Gerlof. Un vieux, enraciné sur son cailloux et qui, oublié de dieu, décide de quitter son institution de retraite pour revenir vivre chez lui. A l'abri des regards, ses mains osent enfin courir sur la couverture des carnets intimes de sa femme défunte restés depuis sa mort sur une étagère. Souvenirs d'une présence dont il ne reste plus que les mots.

Mais les beaux jours amènent aussi avec eux de nouveaux voisins à Gerlof. Vandela et son mari. Elle, picore les antidépresseurs tout en communiant avec cette terre où courent encore le souvenir du combat entre les elfes et les trolls. Lui drapé dans son égo, conceptualise des recettes de cuisine qu'il édite ensuite pour le plus grand profit de sa propre vanité.

Il y a aussi Peter revenu avec sa jeune fille Nilla qui souffre d'un mal étrange qui l'oblige à des séjours à l'hôpital, et son fils Jesper. A cela s'ajoute pour Peter, un père âgé vivant encore sur l'île, qui en son temps avait fait fortune dans la littérature pornographique.

Dans une écriture sobre et légère, Johan THEORIN nous narre une histoire qui progresse au rythme de la fonte des neiges. Une histoire où les souvenirs des hommes se mêlent à ceux que porte cette terre Baltique, forgée dans le sang et les légendes, dans la violence des hommes et celle des éléments. Une histoire qui mêle les sangs et lie les générations.

Et de cette rencontre entre le passé et présent, le réel et l'imaginaire, surgit le feu purificateur, celui de la nuit de Walpurgis qui marque la fin de l'hiver, mais où les fantômes viennent aussi demander des comptes aux vivants.

Johan THEORIN nous offre un roman d'atmosphère, d'émotions et de sensations, où tout prend son importance, du vent qui court dans les herbes, aux murmures des elfes. Au fil des pages il alourdit cette atmosphère pour la rendre plus oppressante, plus étouffante à mesure que refait surface le sang séché du passé.

Ce troisième roman confirme toute l'originalité de cet auteur qui continue à construire une oeuvre singulière à laquelle j'adhère totalement.
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