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Critique de CoquelicoteAzimutee


Une ancienne lectrice de la reine Marie-Antoinette est à Vienne, en 1810, et elle se souvient de ses derniers jours à Versailles, les dernières fois qu'elle a vu la Reine, dans le début de la tourmente de la Révolution. Je m'attendais à quelque chose d'abordable, comme c'est un roman, mais très bien documenté, puisque Chantal Thomas est historienne, spécialiste du XVIIIème siècle et de Versailles au CNRS. Et en effet, les détails sont présents, et si l'on prend le temps de vraiment lire, on peut se sentir à Versailles. Mais le livre n'est pas abordable par des personnes qui ne connaissent pas déjà bien cette époque. J'ai lu plusieurs livres d'histoire sur cette époque, et pourtant j'ai parfois été un peu perdue. En fait, Chantal Thomas se situe vraiment au niveau de la lectrice, et donc des personnes qu'elle connaissait. Il n'est pas difficile de suivre lorsqu'elle parle de son amie Honorine, servante chez les La Tour du Pin, ou de M. Moreau, l'Historiographe du Roi. Mais lorsqu'elle parle sur telle famille de la noblesse, ses ramures, son histoire... Heureusement cela ne dure guère, et je pense qu'il ne faut pas se laisser déstabiliser en cherchant à tout prix à tout retenir et à tout comprendre lorsque cela dépasse un peu trop le cadre du facilement compréhensible.

Le récit est à la première personne, et comme ce sont des souvenirs d'une vieille dame, les choses sont parfois volontairement un peu confuse. Certaines associations d'idées perdent un peu en route, on saute de considérations politiques à tel détail du jardin de Versailles par exemple. Les personnages sont vu bien entendu très subjectivement, ce qui rend le récit très réel : ça aurait pu être une liasse de papiers retrouvée dans la chambrette de Vienne où la lectrice semble terminer sa vie. J'ai par moment été prise au coeur devant le désarroi des personnes de la Cour, grands ou non, car tous ne comprennent pas pourquoi Paris, et même la province, grondent. Le Roi est si bon, il essaie tellement de bien faire malgré ses airs patauds et son appétit d'ogre, comment pourrait-on en avoir après lui ? Et la Reine, que la lectrice admire profondément, comment lui en vouloir, à elle la déracinée, projetée à Versailles pour des raisons de politique matrimoniale, et qui aurait tant voulu être aimée par ce peuple de parisiens ? J'ai relevé une phrase que j'ai trouvé simplement sublime, presque à me faire monter les larmes aux yeux. La lectrice rapporte une entrevue entre la Reine et le Roi, qui lui a été racontée par une femme de chambre de la Reine (ce qui me fait dire que ce passage doit être en partie inventé, ou fondé sur des sources qui ne sont pas sûres, mais après tout je n'en sais rien, et ça reste magnifique et tout à fait plausible). La Reine et le Roi ont décidé de rester à Versailles, de ne pas s'enfuir malgré le danger, et Marie-Antoinette se demande si leur seul salut ne résidait pas dans cette fuite. Louis XVI dit alors :
"Cela veut-il pour vous, Madame, dire quelque chose ? J'ai appris - c'est Monsieur de Noailles qui me l'a confié à mon coucher - que le peuple ne veut pas seulement du pain, il veut aussi le pouvoir. A ce point d'insanité, j'avoue, je suis confondu. Je croyais jusqu'à maintenant que le pouvoir était un poids de devoirs et de responsabilités dont on héritait, et que l'on acceptait par humilité et respect pour Celui qui nous avait désigné. Une sorte de malédiction dissimulée sous un manteau d'hermine. Me serais-je trompé ? Y aurait-il quelque chose de désirable dans le pouvoir ?"

C'est un roman tourné d'une façon particulière, qu'il m'a été assez difficile d'appréhender, mais finalement je suis très contente de l'avoir lu.
Lien : https://withoutmuchinterest...
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