Si le livre qu'on va lire demeure autre chose qu'une simple curiosité du passé, c'est parce que son message demeure plus que jamais vivant. Il offre des ressources pour le présent car il est traversé par une inquiétude qui, si elle demeurait marginale dans les années 1960, ne cesse de grandir depuis : l'inquiétude face à un monde industriel mortifère, un monde de l'enrégimentement permanent, un monde de l'inégalité et du mépris des pauvres. (préface de François Jarrige)
On attribue à « la classe ouvrière » une existence réelle, quasi définissable en termes mathématiques : un certain nombre d'hommes occupant une certaine position par rapport aux moyens de production. Une fois ce postulat accepté, il devient possible d'en déduire la conscience de classe qu' « elle » devrait avoir (mais possède en fait rarement) si « elle » avait une conscience juste de sa situation et de ses intérêts réels. Il existe une superstructure à travers laquelle cette conscience se fait jour sous des formes inefficaces. Ces « retards » et ces déformations culturelles sont gênants et il est aisé d'aboutir, à partir de là, à une théorie de substitution : le parti, la secte ou le théoricien qui révèle la conscience de classe non pas telle qu'elle est, mais telle qu'elle devrait être.