Au centre de la forêt se trouve une cuvette de feu où ne parvient jamais le souffle de la mer. Dans ce brasier, un rayon de cire dont les parois sont de roc et les alvéoles emplies de phosphates. Les Annamites en chapeau pointu occupent le chantier et par cinquante-cinq degrés travaillent dans les trous. Les baraquements dans lesquels ils logent avec leurs femmes et leurs enfants sont un peu plus loin. La façon dont les Annamites étaient traités, au moment de mon passage à Makatea, est une honte.
En ce pays près de la nature, lorsqu'un homme se sent des goûts féminins, il ne s'en cache ni ne s'en vante. Sans susciter la critique, il laisse pousser ses cheveux, enroule son paréo en forme de jupe et prend un métier réservé aux femmes : tressage des chapeaux ou fabrication des colliers. [...] Depuis que l'île de Tahaa a "attrapé un pasteur", les hommes et les femmes ont dû se vêtir à l'européenne et le mahou a pris avec docilité les modes chrétiennes : mais son innocence n'a pas compris qu'il aurait dû s'habiller suivant son sexe : il a donc changé son paréo féminin pour une robe du soir. Grâce au pasteur, un homme en robe perlée erre sur les sables noirs de Tahaa.
Chaque soir après le bain, les jeunes hommes se réunissent au centre du village et l’un d’eux improvise le récit chanté des événements du jour que le chœur commente.
« Ha ! ha ! ha ! annonce le garçon, une femme blanche, dont le cœur est bon, nous a rendu visite. »
Et le chœur conclut :
« Oui, mais elle va manger le meilleur morceau de notre petit cochon sauvage ! »