Nous revoilà donc au 17 de l'allée des cerisiers, pour une lecture aussi fantaisiste que le premier tome. Que le lecteur soit prévenu une fois encore :
Mary Poppins est toujours aussi rarement agréable et elle n'esquisse que peu souvent un sourire. Même si on a compris qu'elle jouait très probablement un double rôle, on ne peut nier que c'est parfois déconcertant. Cependant, notons que les enfants Banks semblent l'apprécier d'autant plus car, même si elle n'avoue jamais rien et fait preuve au quotidien d'une poigne de fer, ils ont la chance de partager un secret avec elle et de bénéficier de ses talents pour le moins fantastiques, aussi font-il moins cas de son caractère.
La construction de ce second livre semble très calquée sur le premier. Non pas que les rebondissements se répètent, mais le schéma est similaire : l'arrivée de
Mary Poppins, le voyage dans une image en porcelaine (en écho au voyage dans le tableau du premier opus), une visite chez un cousin qui se retrouve cul par-dessus tête selon les hasards du calendrier (rappelle fortement la visite chez l'oncle Albert qui s'envole au plafond dès qu'il rigole quand son anniversaire tombe certains jours de l'année en cours), etc... et il en est ainsi jusqu'au terme de l'ouvrage. On remarquera peut-être davantage de liens entre les différents chapitres, ce qui tend à plus de linéarité même si l'ensemble s'apparente toujours à un enchaînement de nouvelles encore quelque peu décousues.
le réel intérêt de ce second tome réside une fois encore dans le mystère qui entoure
Mary Poppins, que l'on découvre un peu plus. Ou en tout cas qui suscite toujours plus de questionnements. Sa famille semble décidément très fantasque (pour ne pas dire fantastique) et on apprend dans le chapitre 7 qu'elle passe ses soirées de libres dans un cirque céleste présidé par le Soleil lui-même, où se donnent en représentation les différentes constellations sous leur forme allégorique. Au milieu de ce beau monde, Mary semble avoir une place assez prestigieuse : adulée autant que crainte (on la découvre effrayante plus d'une fois encore dans cet opus, en particulier lorsqu'elle n'hésite pas à faire vivre une aventure particulièrement terrifiante à Jane pour lui enseigner une bonne leçon), elle participe même, dans un chapitre enchanteur à souhait, à faire clore l'hiver et naître le printemps, et renvoie ainsi plus que jamais aux inspirations mystiques de l'auteure. Déesse païenne,
Mary Poppins ? Une théorie confirmée par les autres univers dont
P.L.Travers tire les idées pour les différentes mésaventures racontées : un chapitre entier, histoire dans l'histoire, est une sorte de conte populaire raconté par Mary aux enfants Banks, et évoque les célèbre Nursery Rhymes anglaises. Enfin, le chapitre chez le cousin « cul par-dessus tête » semble tout droit inspiré de l'univers plein de non-sens de
Lewis Carroll.
Ces nombreuses inspirations étranges dont se réclame Pamela L.Travers ne l'empêchent pas, une fois encore, de faire preuve d'humour ou d'une malicieuse ironie. Par ailleurs, tout comme dans le premier opus, Mary s'adoucit à la fin du livre, lorsqu'à son corps presque défendant, elle sent qu'il lui faut quitter la maison des Banks. le malaise qui s'inscrit dès lors dans toute la maisonnée, comme un pressentiment qui hante les enfants dès le lever, est particulièrement bien raconté et témoigne une fois encore, malgré tout ce qu'on pourra reprocher à
Pamela L. Travers, d'un indéniable sens de l'écriture.
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