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Critique de Latulu


Latulu
17 septembre 2014
L'une de mes plus belles lectures de 2014…

Lisa Tuttle nous conte six merveilleuses histoires de femmes, intimes, violentes, furieuses, ou encore empreintes de folie. 6 histoires avec comme thème central le corps et l'esprit féminin.

Le recueil est bien construit, l'ordre des nouvelles est bien organisé la suivante ayant au moins un thème en commun avec la précédente, de sorte que chacune des nouvelles appelle à la lecture de la suivante. Un beau travail de Mélanie Fazi, traductrice et présentatrice de ce recueil. Sans conteste un bel hommage du vivant de l'auteur.

1. Rêves captifs : l'histoire d'une jeune fille captive, en proie à un monstrueux cauchemar, dans lequel le temps et l'espace joue un place prépondérante
2. L'heure en plus : Une écrivaine, jeune maman à l'emploi du temps bien rempli, découvre, dans sa maison, au détour d'un escalier, une porte dérobée qui va lui permettre d'obtenir du temps en plus pour des projets plus personnels.
3. le Remède : dans une société futuriste, le Remède a été trouvé pour soigner toutes les pathologies. Toutes et même plus…
4. Ma pathologie : l'auteur nous conte une histoire d'amour empreinte d'alchimie, du rapport amoureux et de la relation de la femme avec son corps et la grossesse
5. Mezzo-tinto : quoi de plus réconfortant que le foyer familial, lieu aménagé et pensé pour soi, refuge aux turpitudes de l'extérieur ? Mais si ce sweet home devenait soudain étrange, vecteur d'une peur diffuse et inexplicable.
6. La fiancée du dragon : seul récit porté par une voix d'homme, une étrange histoire de transformation.

Le style est très lyrique. L'écriture de Lisa Tuttle est une mélodie, une symphonie de mots qui nomment le malaise et la folie. Dans ce recueil, le fantastique se veut discret. A l'exception de la dernière histoire, ce recueil ouvre une fenêtre sur la confusion mentale (celle des autres mais aussi la nôtre). Une phrase à elle seule résumerait bien ce recueil ; Ainsi naissent les fantômes : du malaise engendré par la crainte soudaine des choses ordinaires.
L'auteur avoue elle-même : « Ca m'intéresse moins d'écrire sur des monstres « venus d'ailleurs » que sur les fantômes et les monstres intérieurs. » « L'une des choses les plus effrayantes à mes yeux, dans la réalité, c'est le « bon père de famille » qui rentre chez lui et tue sa femme et ses enfants avant de se suicider. […] Est-ce que cette folie et ces tendances violentes ont toujours été présentes chez lui, ou est-ce qu'il a subi un changement de personnalité total pour des raisons inconnues ? »

Les premières phrases de chacune des nouvelles sont des accroches qui traduisent ce malaise et tiennent le lecteur en haleine. La narration nous plonge dans la confusion propre au mélange du réel et de la fiction.
1. Rêves captifs : Il m'est arrivé quelque chose d'affreux quand j'étais petite.
2. L'heure en plus : une heure, c'est tout ce que je demande.
3. le remède : C'est dans cette pièce, jour après jour, que je transforme ma vie en langage.
4. Ma pathologie : ce n'est peut-être pas une vérité universelle, mais ce qu'on n'obtient pas facilement a bien plus de valeur à nos yeux.
5. "Mezzo-tinto" La façade du pavillon évoquait un visage grossièrement dessiné.
6. La fiancée du Dragon : Il y a deux mois de mon enfance dont j'ai tout oublié ; les deux mois les plus importants de ma vie.

Le quotidien familier, censé réconforter et apaiser se transforme en danger. Il devient la cause de la peur. Cette impression est bien traduite dans [Mezzo-tinto], nouvelle hommage à M. R. James. La maison connue, foyer du couple, source de réconfort devient soudain un lieu angoissant dans lequel l'héroïne se sent mal à l'aise, sans comprendre pourquoi.

Lisa Tuttle nous parle de la femme. de ses doutes mais aussi de ses peurs réels, parfois exagérés lorsque les moments heureux deviennent le lit de la terreur. La nouvelle [ma pathologie] est un bon exemple de ce sentiment qui m'a tenu tout le long de ma lecture. Dans cette histoire, la grossesse, source de questionnement et de crainte pour de nombreuses femmes, est évoquée comme une monstruosité :
Quelque chose de vivant grandit en vous !
Qui fait partie de vous sans faire partie de vous... et qui peut vous tuer.

Le livre en lui-même est un bel objet, merci Dystopia. L'illustration de couverture est bien vue et renvoie à la thématique générale du recueil : le corps et l'esprit féminin.

Enfin, un entretien entre Mélanie Fazi et Lisa Tuttle vient clore l'ouvrage et nous éclaire davantage sur la vision de l'auteur par rapport à ses écrits et à l'écriture en générale.
Une phrase en particulier, a retenu mon attention car elle traduit parfaitement le sentiment de l'amatrice de fantastique que je suis et contribue à désinhiber le genre :
Lisa Tuttle : « Lorsqu'ils sont bien écrits, je trouve en règle générale qu'un bon roman de science-fiction, de fantasy, de fantastique ou un bon roman policier sont bien plus agréables à lire que la plupart des romans de littérature blanche qui visent la respectabilité littéraire. »

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