AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
>

Critique de Patsales


Pourquoi diable un homme aurait-il envie de devenir polygame ? Pour le sexe? Un des personnages réfute catégoriquement cette hypothèse (de fait, le héros n'a pas l'air de s'éclater prodigieusement) et en propose une autre: parce que les femmes comme il faut sont légion, contrairement aux hommes bien...
Ce livre insolent, généreux, hilarant et tragique est le grand roman des responsabilités. Et les mormons apparaissent comme le laboratoire idéal d'un refus collectif (quoique plutôt masculin) d’y faire face.
Déjà, c'est pratique: Dieu décide. Ensuite, c'est encore mieux, les femmes gèrent. Les hommes, délestés de la fatigue de choisir (ni leur vie puisque Dieu décide, ni leur épouse puisqu'ils peuvent les additionner, ni leur métier que la communauté valide), délestés également de la nécessité des multiples arbitrages de la vie quotidienne et familiale (domaine féminin) sont prêtres et puis voilà.
Mais parfois, ça dérape. Une enfant qui meurt, une entreprise qui bat de l'aile... Golden veut fuir l'impassibilité à laquelle le contraint son mode de vie. On n'embrasse pas son enfant quand on sait que 27 autres vont se précipiter pour obtenir la même faveur.
Fuyant l'impasse de l'impassibilité, Golden découvre le désir. Le sien. Celui des autres. Et ce n'est pas triste. Effrayé, infiniment reconnaissant quand il croit que Dieu lui sauve la mise avant de s'apercevoir que la situation ne fait qu'empirer (pour la plus grande joie du lecteur qui se hâte de se gausser, se doutant bien que la catastrophe arrive à grands pas), Golden se débat en toute ingénuité entre principes et libido. Aux maisons (il y en a presqu'autant que d'épouses), son émouvant et drôlissime fils Rusty cherche, lui aussi, à s'émanciper en faisant les 400 coups (et ultimus necat).
Et si tragédie il y a, Udall en exonère Dieu: l'homme est libre, donc responsable et éventuellement coupable. Les enfants qui meurent dans le ventre de leur mère, ou qui naissent lourdement handicapés ne sont pas des anges créés par une volonté divine incompréhensible : l'histoire se déroule 25 ans après les explosions atomiques expérimentées à ciel ouvert dans le désert du Montana. L'homme est libre, donc responsable, et il est comptable de de chaque radiation mortelle, de chaque femme frustrée et de chaque enfant rejeté. Qu'il cherche à le nier et à se délester de ce fardeau n'y change rien.
La fin du roman, douce-amère, annonce une nouvelle fuite en avant du héros qui achète un peu de répit avec encore plus de femmes et plus d'enfants et on ne voit pas ce qui pourrait empêcher un tome II assez rigoureusement identique au premier.
Lequel mérite qu'on s'y rue pour rire et pour pleurer - ou pas. Après tout, vous êtes libres.
Commenter  J’apprécie          430



Ont apprécié cette critique (41)voir plus




{* *}