Témoignage intéressant.
D'une part sur la société de l'époque à travers les victimes de l'Éventreur du Yorkshire dont Una nous peint un portrait qui fend le coeur ("Je me demande ce qu'elles feraient aujourd'hui ?') ; avant d'être victimes, elles étaient femmes - non, je reprends : elles sont victimes parce qu'elles sont femmes.
D'autre part, sur l'histoire personnelle de l'auteur, qui s'est construite tant bien que mal. Mais disons-le, puisqu'elle même a eu tant de difficulté à le faire, puisqu'elle n'avait pas forcément les mots, puisqu'autour d'elle s'érigent les murs du tabou : VIOL. On sent d'ailleurs qu'elle a dû lutter pour faire émerger ce qui lui est arrivé, car elle se confie parcimonieusement, en plusieurs étapes.
Ce qui relie Una aux victimes de l'Eventreur, c'est évidemment ce manque de considération pour les femmes, lesquelles débordent parfois (elles osent !) du moule qu'on leur impose : jeune fille, femme ou mère, mariée ou célibataire - toutes pures ou putes, au choix. Préjugés bonjour...
Somme toute, la BD pose la question de la violence masculine que l'on admet comme "normale" : elle est la norme au sens premier du terme (d'après les statistiques, il y a beaucoup plus d'hommes violents que de femmes) ; ancrée dans le quotidien, elle devient le modèle. Dès lors, comment peut-on espérer améliorer les choses ?
La BD a, par certains aspects, un côté méditatif. Nous nous perdons dans les pensées de l'auteur, dans des paysages symboliques. Une forêt, un ciel... dans lesquels erre sans doute Una, représentée sous forme d'insecte ailé.
Je mets cependant un bémol au niveau des enchaînements : il m'est arrivé de nombreuses fois de revenir en arrière, car j'avais l'impression que l'ensemble manquait de transition, comme si tout était entassé pêle-mêle. C'est d'ailleurs pour cela que je conseille plutôt cette lecture aux lycéens et davantage.
Commenter  J’apprécie         10