Soudain, elle s'était écriée, comme outrée: "Mais il fait quoi, ton père?" L'espace d'un instant, j'ai fait comme s'il n'était pas mort. Rare moment béni où l'on peut assouvir sa folie et ressusciter les morts, ne serait-ce qu'une minute. J'ai fini par céder et lui avouer qu'il était mort.
J’avais beaucoup de mal à quitter cette ville. Mon père avait la même géographie, un palais à côté d’une caserne, une princesse à côté d’un garagiste, les plus beaux costumes d’Italie, mais un dopobarba qu’on ne trouvait que dans les tabacs les plus pourris. Naples possédait une joie et une belle tristesse. Elle était à la fois ce qu’était mon père et ce qu’avait été mon deuil : un lieu de grandes agitations, avec des moments où tout s’accélère, où l’on veut tout savoir, tout voir, où l’on comprend tout mieux, suivis de longs moments d’attente, de souvenirs doux, de calme.
Le temple de mon père s'était effondré. Je me retrouvais, à dix-sept ans, dans un champ de ruines, et le seul à qui j'aurais pu reprocher tout ça, sur qui j'aurais pu passer ma colère; était mort depuis onze ans. Je me sentais coupable de le haïr autant alors qu'il n'était plus là. Tout ce qu'il me restait de lui était une immense plaine vide, où les maigres informations sur sa vie que j'avais récoltées avaient brûlé en une soirée.
Il faut être proche des gens qui vont mal, ne pas croire qu'on les dérange ou qu'on les fatigue en les voyant
Quant à moi, quand je disais que j'avais perdu mon père à six ans, on me répondait de plus en plus souvent : "Ah, ça va, tu étais petite, tu ne t'en souviens pas trop."
Il choisissait bien ses amis.
Il fréquentait les gens avec qui il était vraiment bien ou avec qui il pouvait avoir des conversations intéressantes.
Nous on buvait tout le temps.
Ill préférait mille fois se plonger dans des livres, faire des recherches
Fais confiance aux intuitions que tu as sur ton père, toi, tu détiens une vérité que n'ont pas les autres !