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Sur une île au large du Québec, une vieille femme recueille La bleue. Elle vit modestement avec sa fille "La blonde", son fils Jésus et son mari qui développe une obsession pour l'observation des cailloux. En pleine forêt, dans un rapport animiste aux animaux, aux plantes et aux paysages, cette étrange famille digne d'un conte noir se fracture progressivement avec l'arrivée de la bleue et de son comportement tour à tour effronté, violent, amoureux, fidèle. L'inquiètude teinte l'ensemble des scènes et des récits. Tour à tour, la vieille et la bleue prennent paroles dans un choeur inquiétant d'âmes à la dérive.
Un très beau premier roman qu'accompagnent les paysages habités de Benjamin Défossez.
Un nouveau petit bijou des éditions du chemin de fer.
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S'il vous prend l'envie de vous assurer une part d'insularité cet été sans risque sanitaire, saisissez entre vos mains ce “Quelque chose de la poussière”, projetez-vous sur cette “île hors du temps, à l'ouest du monde”.

C'est l'histoire de la bleue, échouée sur la plage, est recueillie par La vieille, son mari, la blonde et Jesus, leurs enfants. Cette irruption/adoption d'un nouveau membre menacerait-elle le fragile équilibre du clan ? Une harde où la Bleue se fraie une place d'où elle observe les autres, leurs obsessions, forgées jusqu'au dénouement.
Mais jusqu'où s'accrocher ? Jusqu'à quand ?

Voici un texte aux reflets multiples, miroitants, l'ensemble est saisissant de beauté et certaines parties vous transpercent de petites rafales fulgurantes.
Parce qu'on le perçoit à chaque page, ce livre a pris le goût du vent, l'éclat des vagues ; il répond à l'appel de la forêt, au cri des bêtes sauvages, à la prédation ; il a été chahuté par les caprices insulaires, les intempéries, la solitude. Pas étonnant qu'il soit dès lors chargé de tension animale et de beauté minérale, que l'écriture soit si précise, aussi instinctive que maîtrisée.

Il faut dire que j'aime les personnages, tous. Lune est parvenue à leur donner corps tout en les laissant à leur mystère. Jesus est le seul à porter un nom, les autres, comme réifiés (la bleue, la vieille, la blonde, le père), se fondent dans ces paysages sauvages, peut-être pour mieux y disparaître ou les déserter.

Livre objet édité chez les impeccables éditions du Chemin de Fer dont les textes sont approfondis, interprétés par des illustrateurs.ices.
Ici les très beaux tableaux de Benjamin Défossez.
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On est sur une île, tout à l'Ouest du monde. Cela commence par un départ, comme une expulsion : « Ce matin nous avons quitté notre maison qui n'existe plus ». Deux femmes sont venues « dire au revoir, regarder une dernière fois le jour pointer sur notre plage. Il n'y a rien que nous puissions faire contre notre évasion. » Les deux femmes, ce sont « la vieille » et « la bleue ». Elles parlent alternativement, même si ce n'est pas un dialogue. La vieille s'adresse à sa mère. La bleue se pose en narratrice. Les monologues successifs mettent peu à peu en scène les trois autres personnages de la famille : le père, géologue qui ne parle qu'à ses cailloux, la mère, une sauvageonne pleine de tendresse qui fait régner un matriarcat incontournable, la « grande blonde » de fille, le fils Jésus, et le pick up au volant duquel s'orchestrent tous les épisodes de la vie. Une sorte de clan qui vit au rythme de la nature sous le regard permanent des ancêtres qui n'ont surtout pas quitté la maison. « La bleue », la mère l'a ramassée un jour sur la plage comme on emporte un coquillage ; elle en a fait le troisième enfant de la maison. Et ça a marché !
Pas d'intrigue. Pas de fiction à suspense. Juste le quotidien d'une famille qui « survit », dans un Ailleurs, qui ressemblerait à « Quelque chose de la poussière », au bout du monde et au bout du temps. Juste la « disparition » qu'il revient à chacun de mettre en oeuvre. Pour « la bleue », qui a ouvert le livre et le clôture, il s'agit de « Partir. Quitter l'île et te quitter toi, la vieille. Je ne brûlerai pas de ponts. J'en construirai s'il le faut. Un pont des terres de l'Est à ton île. Peut-être un jour te retrouver. Et maintenant Il faut marcher seule dans la forêt, à un pas de femme, jusqu'à plus soif, jusqu'à plus faim ».
La grandeur du récit, ce qui embarque le lecteur, c'est cette force que l'auteur a su mettre au coeur de chaque personnage, c'est aussi cette construction rigoureuse du récit et de l'écriture grâce à laquelle l'évasion vers un rêve est toujours possible, on retombe toujours sur ses deux pieds. le regard du plasticien associé à l'auteur, selon la règle du jeu que s'est donnée le Chemin de Fer, devient une véritable scénographie, loin de toute illustration primaire. On est presque dans un film. On parle de la vie. On est bien.


"Lune Vuillemin est née dans la Meuse en 1994, a grandi au fond d’une forêt de l’Aude et a suivi des études d’arts avant de partir deux ans au Canada. Jardinière, femme de ménage, soigneuse d’animaux sauvages, aide-cuisinière, rancheuse ou road-tripeuse, elle cherche toujours la proximité du monde sauvage et les rencontres, un roman et son carnet d’écriture dans la poche. Elle vit aujourd’hui dans le sud de la France où elle étudie la littérature et l’histoire américaine et britannique la semaine, et se requinque dans la forêt le week-end, au calme de la montagne, à flanc de falaise, un roman et son carnet d’écriture dans la poche.
Quelque chose de la poussière est son premier livre."

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Sublime, poignant ce grand livre est le passage de l'ombre à la lumière. Le lire, c'est rendre hommage à la beauté d'une littérature raffinée, délicate et intuitive. Ses traits bousculent par cette force intrinsèque. Les arrêts à chaque point sont des murs porteurs. Ce récit est un rivage à atteindre. Comme on aime son souffle, sa teneur. Ses personnages qui gravitent et content en hymne choral ce qui germe sur cette île d'un espace-monde étrange, rude, âpre et mystérieux. Le prologue est un appel d'air. « On marche toute la nuit, la vieille ne veut pas parler. Lorsqu'elle sent que je veux parler, elle siffle. » Subrepticement, on pénètre dans les ténèbres. A contrario, l'heure est belle. L'écriture est époustouflante, douce et aérienne. On dirait ce juste qui frémit sous l'épiphanie verbale, sous cette voûte étoilée dont les étoiles sont des énigmes. Lune Vuillemin est une jeune auteure de 26 ans. Son récit se révèle un miracle. On est saisi par le majeur des paroles qui tour à tour dévoilent les mystères intérieurs. Les gestes sauvages, le rude des pierres, les arbres déchiquetés. Cette île qui ploie sous l'incivilisation. Un nihilisme qui ne peut se nommer. On aime « La Vieille » plus que tout. Cette femme qui vit à l'instar d'une salamandre éprise de liberté et qui ne sait pas jouer avec les couleurs de la tendresse. Elle est broyée par le manque de tout. « La Blonde, Shiver » sa fille, énigmatique est un chat écorché. « L'après-midi passé à regarder Shiver flatter les troncs doux des arbousiers. Sa fascination pour ce qui est tendre. Et son besoin de dureté. » « La Bleue », celle qui vient du méconnu, l'adoptée des hasards qui reste dans cette implacabilité comme un animal qui se recroqueville et attend son heure de gloire. « Jésus » le frère de Shiver « Résistant au froid comme une loutre de rivière. » Que va-t-il se passer ? N'ayez pas de crainte. « Quelque chose de la poussière » est une litanie. Un récit qui ose l'entrée dans un mystique qui ne peut se nommer. Dans cette grotte matrice où La Vieille cherche en Shiver, La Bleue, Jésus, les langages qui touchent aux larmes. Mais, rien, ne se voit. Il faut rester attentif à ce summum, à cette profondeur du puits, à cette île qui perce l'invisibilité. Les réponses ne se savent pas. Rien ne peut retenir le sablier des quêtes existentialistes. Que dire des splendides illustrations de Benjamin Défossez, traversées des miroirs pages après pages. On est alors sur cette île dans les pas de La Vieille torche en main, courbée et altière. Le sombre est une toile de maître. On est en plongée, en transmutation, où respire le hors temps, le microcosme de vies dont il ne reste que le manichéen, l'inapaisable, la folie de l'adversité, et la volonté de vivre et de trouver sa voie bien après les flots d'une mer intestine et d'une île ravageuse. Beau à trembler. Culte. A lire, relire à, l'infini. Publié par les majeures Editions du Chemin de Fer.
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Voilà une autre lecture à côté de laquelle je suis passée.

Les éditions du chemin de fer ont fait un beau travail d'édition.
Mais le texte… J'ai eu l'impression de lire une écriture hallucinée, une intrigue floue, ou l'inverse.
En fait, il n'y a pas d'intrigue, on suit un moment du quotidien d'une famille en pleine implosion.
On est à la limite de la perte spatio-temporelle, j'ai lu ce livre comme un mirage.

Cette belle édition contient des illustrations tout aussi étranges.

D'aucun diront que le texte est magnifique et intense.
Mon côté terre à terre, à besoin d'un minimum de compréhensible.

A classer en OLNI (objet littéraire non identifié)
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Enfin une écriture neuve, des phrases comme une respiration qui se cherche, s'impose pour dire ce qui sourd de l'intime ou se heurte à la rencontre ou se frotte à la nature omniprésente, fascinante.
Une histoire sauvage à deux voix de femmes qui palpite longtemps après qu'on a refermé le livre (ce si bel objet du Chemin de fer !).
Livre qu'on rouvre souvent pour les peintures étranges et lumineuses de Benjamin Défossez, qui continuent de parler aux phrases de Lune Vuillemin, qui elles-mêmes poursuivent leur ligne de creusement en nous.
Merci au Chemin de fer d'oser de tels choix et qui nous offre là une pépite à garder dans le creux de la main, au fond de sa poche et résolument en plein coeur.
Une absolue écriture, sauvage et puissante.
Lien : https://lalectricepublique.b..
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