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Critique de saigneurdeguerre


6 (bonnes) nouvelles :
Retour de flammes à l'Inno
On achève bien les cerveaux
Les lauriers de l'imposture
Le bourgmestre de Bruxelles
Sale temps !
Chez Odile

Retour de flammes à l'Inno
22 mai 1967. Une date difficile à oublier pour les Bruxellois qui ont connu un des deux plus beaux grands magasins de Bruxelles, l'Innovation et le Bon Marché, fréquentés par des gens venant de toute la Belgique, le plus souvent en train.
Le 22 mai 1967, « A l'Innovation », une merveille architecturale, disparaît en quelques heures causant la mort de 251 personnes. Marc van Staen replonge ceux qui s'en souviennent, j'étais en deuxième primaire à quelques centaines de mètres de là à l'Institut Saint-Louis, dans une des journées les plus terribles que connut Bruxelles dans la seconde moitié du XXe siècle. L'entrée de mon école pour les élèves se trouvait juste en face des urgences de l'hôpital Saint-Jean. Jamais je n'ai entendu autant de sirènes d'ambulances, de voitures de police et de camions de pompiers. Tous les élèves surent se rendre dans la cour de récréation. Aucun de nous ne savait ce qu'il se passait. Notre surprise fut grande lorsque nous vîmes arriver des fillettes ! Elles venaient de la petite école de la rue de la Blanchisserie, à deux pas de l'Innovation. Des filles dans notre école de garçons !!! du jamais vu ! Oh, on nous sépara. Les filles sous le préau, les garçons de l'autre côté. L'angoisse monta encore d'un cran lorsqu'à 16 :00 personne ne quitta l'école. Les parents commencèrent à arriver au compte-gouttes pour emmener leurs enfants. Ma tante est venue me chercher passées 19 :00… Et je n'étais pas le dernier à partir, loin de là ! Beaucoup d'élèves habitaient en Flandre, la circulation dans le centre de Bruxelles était complètement paralysée et les parents avaient toutes les peines du monde à arriver rue du Marais. A l'extérieur, voitures de police et ambulances…
Mais venons-en à la nouvelle écrite avec beaucoup de talent par Marc van Staen, « Retour de flammes à l'Inno ».
C'est l'histoire d'une imposture… Sa troisième nouvelle utilise ce mot, et je l'aurais choisi comme titre de l'ouvrage, plutôt que le Bourgmestre de Bruxelles… Tout démarre avec la lecture d'un ouvrage d'un journaliste, Jean-Nicolas Caillou qui a écrit un livre rappelant l'incendie de l'Innovation, retraçant les faits, le journaliste ayant été le témoin abasourdi du drame. Il avait été particulièrement marqué par un couple et un enfant qui furent sauvés in extremis par les pompiers. La réaction de la femme en particulier frappa le journaliste. Les cris de désespoir qu'elle poussait et le rejet qu'elle éprouvait pour le petit garçon étaient saisissants. Ne voilà-t-il pas que deux décennies plus tard, l'homme accepte une interview de Caillou, le journaliste. Celui-ci va enfin comprendre la réaction de cette femme. Mais l'histoire ne s'arrête pas là…
J'ai été particulièrement ému en lisant cette nouvelle, pas seulement pour les souvenirs qui ont resurgi mais aussi pour l'intrigue qui est celle d'une « imposture » et qui est superbement construite.

On achève bien les cerveaux
Romane a dix-neuf ans. Cela fait deux ans qu'elle a créé sa page sur Facebook et sur Instagram. Elle a collectionné les followers. Faut dire qu'elle est mimi comme tout. Après quatre mois, elle récoltait déjà les fruits de son « travail » grâce à des sponsors locaux, mais très vite sa notoriété s'est étendue. Elle qui n'avait aucun ami, elle est devenue super populaire et commençait à très bien gagner sa vie, alors sa mère et son discours sur les études, hein…
Mais voilà, depuis quelques temps, au lieu des louanges auxquelles elle était habituée, le ton a changé… Romane ne voit qu'une solution pour mettre un terme à ces attaques…
Marc van Staen soulève un problème bien connu, celui des influenceurs et des influenceuses qui abreuvent de leurs conseils des masses d'amis jamais vus, jamais rencontrés, mais qui peuvent à leur tour influencer leur propre vie.

Les lauriers de l'imposture
Le jeune X est un jeune homme déterminé, plutôt bilingue et disponible. Il n'a pas spécialement envie de poursuivre ses études. Il a quinze ans lorsqu'il voit une annonce dans le journal LE SOIR. Une banque recherche un jeune homme avec ce profil. Il se présente et il est embauché comme groom ! le jeune X a de l'ambition ! Beaucoup d'ambition ! Il sait comment y faire pour se faire valoir. de promotion en promotion, monsieur X espère atteindre les plus hauts sommets de la Banque, le gros cigare cubain et le magnifique bureau avec vue sur le Parc Royal…
Cette nouvelle qui s'annonce très prometteuse avec un personnage, très décidé (à tout) pour « arriver », se termine d'une façon quelque peu abrupte et me laisse sur ma faim.

Le bourgmestre de Bruxelles
Laurent van Bodeghem, fils d'épiciers, est un homme ordonné qui a appris à bien écouter les gens depuis qu'enfant il les entendait parler dans l'épicerie familiale en toute discrétion mais avec beaucoup d'attention. Il a toujours aimé l'écriture et rêvait de devenir écrivain. Il sait qu'il n'y arrivera pas. Manque d'imagination ! Ses activités professionnelles le portent à vivre dans le monde politique : porte-parole, assistant du chef de cabinet, promoteur de l'image de Bruxelles, …
Un beau jour dans un bistrot typiquement bruxellois, il rencontre Albert van Brussel, le bien nommé ! L'homme est un restaurateur reconnu qui passe régulièrement à la télévision. Ce jour-là dans le bistrot, il échange, dans la bonne humeur, des propos concernant l'élection directe du bourgmestre par les citoyens. Ce sera une grande première. Quand il rentre chez lui, il se fend d'un texte sur la fonction de bourgmestre… Sans le vouloir, Albert van Brussel va voir sa vie chamboulée suite à ce qu'il estimait être une pantalonnade inspirée par du jus houblonné avalé sur le bord d'un comptoir…
Une histoire qui sent la nostalgie d'un Bruxelles qui a beaucoup changé de par ses mutations constantes, capitale de l'Europe oblige. Les Bruxellois de souche y sont très bien décrits ainsi que la fatigue de la population face aux surenchères de pouvoirs politiques, fédéral, régions, communautés, communes… L'auteur rêve d'un bourgmestre (maire) qui s'occuperait davantage des problèmes de la population que des petits jeux politiques.

Sale temps !
La belle Norma Thoresen est amoureuse ! Pas de son mari, Richard Kaufman, riche homme d'affaires. Non ! Norma est dingue d'un peintre italien qui voit sa notoriété croître de jour en jour, Fabrizio Malpenza. Bien entendu, cette liaison reste secrète. Pour Norma, il est temps de passer à la vitesse supérieure. Son mari, Richard, doit mourir. Il faut qu'il « se suicide » …
En une courte nouvelle, Marc van Staen nous fait découvrir ce qui pourrait donner naissance à un polar plus développé. Mais ne vous méprenez pas ! Cette nouvelle est une histoire complète en elle-même avec un début et une fin.

Chez Odile
Il s'agit là moins d'une nouvelle que d'un témoignage. L'auteur décrit probablement le quartier de son enfance, en particulier un jour de braderie, le moment idéal pour tout le monde de sortir, de se rencontrer, de rire, de s'amuser, de s'emmouracher…

Voilà six nouvelles, très plaisantes à lire, de styles très différents, mais bien conçues. On y retrouve à plusieurs reprises un Bruxelles que les moins de vingt ans ne peuvent pas connaître (pas davantage que les moins de cinquante ans). Toutes ces nouvelles ne sont pas forcément tournées vers le passé. Certaines sont même portées vers un hypothétique futur comme c'est le cas pour « le bourgmestre de Bruxelles ». Ce mélange de genres et d'époques tient grâce à un fil conducteur… Bruxelles !

Vous n'êtes pas Bruxellois ? Qu'à cela ne tienne, ce livre s'adresse à tout qui aime lire. Dommage que le genre « nouvelles » soit considéré par beaucoup comme un « sous-genre » peu digne d'intérêt. On y trouve de vraies merveilles.
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