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Critique de JML38


JML38
08 novembre 2021
Belleface, le « vieux », est l'archétype du soldat baroudeur, du vétéran qui a traversé toutes les guerres, grâce à un mélange de courage, de compétence, d'expérience, de chance d'avoir eu le temps d'acquérir cette expérience, et d'une farouche volonté qui lui vient de son passé.
Juif polonais, il a connu l'horreur nazie. D'abord dans le ghetto de Varsovie, puis à Treblinka dont il est revenu vivant, miraculeux rescapé de la Shoah qui a anéanti toute sa famille.
Légionnaire en Indochine, il a été fait prisonnier à Dien-Bien-Phu après avoir survécu à la dramatique évacuation du camp tonkinois de Cao-Bang et à la meurtrière bataille de la route coloniale n° 4.
Il s'est ensuite engagé dans l'armée Israélienne, où il a atteint le grade de colonel, avant de rejoindre l'Armée du Liban Sud plutôt que de prendre sa retraite. Ses souvenirs sont remplis de fantômes : les membres de sa famille, la femme qu'il a aimée, les nombreux camarades morts au combat.

Favrier est un Français récemment arrivé au sud Liban. Ses motivations sont un peu floues. le jeune homme lui-même se demande à un moment s'il est venu pour oublier un échec sentimental ou pour savoir qui il est vraiment. le vieux soldat se prend d'amitié pour celui en qui il voit le jeune guerrier qu'il était quelques décennies auparavant. Il a envie de le former, lui transmettre son savoir. Mais sa sensibilité s'étant exacerbée avec l'âge, il ressent même une attirance filiale, au point de le considérer comme le fils qu'il n'a jamais eu.

Le récit présente une unité de lieu, Ras-El-Bayada, un check-point censé protéger Israël des attaques du Hezbollah palestinien. Il présente également une quasi-unité de temps, du 6 au 8 mai 1985.
La vie du camp où Favrier côtoie diverses nationalités, se passe dans l'attente d'une éventuelle attaque, que Belleface pense imminente, rappelant tout naturellement « Le désert des Tartares ». Attaque qui, si elle paraît inéluctable, peu prendre diverses formes et venir de partout, avec cependant une forte probabilité pour la route de Tyr et des véhicules piégés, qui fait espérer à tous les soldats ne pas être de garde à la barrière à l'instant fatidique.

À défaut d'action, les deux hommes échangent beaucoup, et se posent de nombreuses questions existentielles d'où la qualification de roman métaphysique. Belleface se retranche régulièrement sur des citations de « L'Ecclésiaste » qu'il répète à l'envi et qu'il tire d'une bible qui a une histoire particulière. « Le vieux » dévoile peu à peu à Favrier, soit directement soit par l'intermédiaire de tierces personnes, ce que fut son parcours jusque-là. Et ce qu'il hésite à révéler au Français, le lecteur l'apprend à travers ses réflexions personnelles.

Un roman surprenant, dans lequel un vieux soldat, une légende qui n'a connu que le combat persuadé que sa condition de Juif ne l'autorisait à aucune autre alternative, essaye de transmettre à un novice de façon presque philosophique ce qu'il a retenu d'une vie et d'un métier où la mort semble être la seule des réelles certitudes.

Merci à lecteurs.com et Pocket pour cette lecture.
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