Je savoure l’instant présent. Je savoure mes petits déjeuners, je savoure mes cafés, mes cocktails et mes verres de vin, mes après-midi au soleil ou à l’abri de la pluie, je savoure le soleil à la tombée du jour, je savoure les intempéries. Je savoure, je savoure, je savoure. Mon agenda, autrefois surbooké, en compte plus que des pages blanches que je remplis de petits bonheurs. J’ai trouvé la sérénité. Je ne veux plus jamais la perdre.
- Nous avons reçu les analyses du labo. Les résultats ne sont pas bons. Vous avez un cancer, dit le confrère de mon docteur K chéri et adoré, les bras croisés au-dessus de son bureau.
J'en suis restée bouche bée.
L'instant d'après, je me suis retrouvée par terre en train de chialer. Je me suis cachée sous son bureau. Le choc ! Ce moment absolument irréel s'est vite dissipé. La réalité a repris ses droits.
Et le cancer, oui , le cancer est devenu mon ami. Il met ma vie sous le signe de l’intensité : les émotions, les impressions, les expériences, je vis tout au centuple ! Etre debout sur mes deux jambes, être seule, être heureuse : tout cela, je le fais désormais intensément, intensément, intensément.
- Vous en avez, de la chance, petite demoiselle ! Quand on est jeune, on s'en sort toujours mieux !
Mon vis-à-vis me regarde comme si j'avais gagné à la loterie. Son voisin a l'air du même avis.
- Pardon ?
- Oui, oui, oui ! Quand on est jeune, il y a moins de risque que ça revienne !
Les cheveux de ma perruque se dressent sur ma tête.
Et toi, estime-toi heureux que le cancer occupe ta retraite, connard !