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Critique de Charybde2


Mine de rien et sous couvert d'expérience géographico-littéraire, une plongée dans le dur du moderne.

Publié en 2007, ce "livre blanc" de Philippe Vasset marquait un précoce tournant dans son oeuvre, où délaissant doucement les expérimentations formelles de ses débuts, il amorçait le récit contemporain qui l'amènera au "Journal intime d'un marchand de canons" en 2009, puis au "Journal intime d'une prédatrice" en 2010.

"J'ai commencé à m'intéresser aux cartes quand j'ai compris qu'elles n'entretenaient que des rapports très lointains avec le réel. [...] Plutôt que de surcharger le dessin et d'en rompre les proportions avec des symboles compliqués, les cartographes laissent parfois certaines zones vierges. [...] Qu'y a-t-il dans ces lieux théoriquement vides ?"

Philippe Vasset ayant décidé d'y aller voir lui-même, il nous livre les bribes d'un récit de voyage, celui du patient arpentage de ces "zones blanches" de Paris et de la région parisienne, dans lesquelles, pendant plus d'un an, il déploiera force énergie pour s'introduire, bravant chiens, vigiles, végétations ensauvagées et trafiquants éventuels, pour déchiffrer les friches, industrielles ou autres.

Dans l'urbanité rendue à une jungle reflétant largement un devenir social sombre, des moments de poésie font irruption au détour d'une palissade : "De construction récente, le cimetière de Chevilly-Larue a lui-même des allures de terrain vague : les tombes occupent à peine la moitié de sa surface. [...] Il y a de hauts arbres d'essences diverses, notamment fruitiers (j'ai cueilli des pommes et des prunes), des sous-bois, beaucoup d'oiseaux, des clairières couvertes de graminées et des lapins. [...] La tête pleine de trompe-l'oeil et d'illusions raffinées, j'ai fini par tomber, au fond du petit bois, sur un abri de bâches translucides perlées d'humidité. Devant l'entrée de la tente fumait un barbecue de fortune où grillaient des épis de maïs."

Ces belles 130 pages sont précieuses, et raviront, comme un écho, les amateurs du François Maspero des "Passagers du Roissy-Express" ou du Ian Sinclair de "London Orbital", ou encore renverront avec grâce aux travaux de reportage inlassable d'Anouche Kunth sur France Culture. Car ce qui frappe aussi tout au long, dans le à-peine-dit de l'auteur, c'est l'omniprésence, croissante, des sans abris...
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