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Critique de dourvach


Sixième des "Voyages extraordinaires" de Jules VERNE (1828-1905) à être publié par Pierre-Jules HETZEL : il l'a d'abord été en deux parties (en 1869 et 1870) dans la revue "Le Magasin d'Education et de Récréation" (M.E.R., 1869 et 1870) puis en un seul volume (en 1871). C'est un roman scientifique magnifiquement illustré par DE NEUVILLE et RIOU au moyen de 111 dessins (vraiment inoubliables) gravés par HILDIBRAND.

Voici, au passage, la chronologie débutante des "Voyages extraordinaires" verniens :

- (1°) "Cinq Semaines en ballon" [Hetzel, 1863]
- (2°) "Voyages et aventures du capitaine Hattéras" [M.E.R., 1864-1865 ; Hetzel, 1866]
- (3°) "Voyage au centre de la Terre" [Hetzel, 1864]
- (4°) "De la Terre à la Lune" [Hetzel, 1865]
- (5°) "Les Enfants du capitaine Grant" [M.E.R., 1865, 1867, 1868 ; Hetzel, 1868]
- (6°) "Vingt Mille Lieues sous les mers" [M.E.R., 1869, 1870 ; Hetzel, 1871].

"Vingt-mille lieues" ... ou le règne des 3 "N" : "Narval" (artificiel), "Nautilus", "Nemo".

Pour nous, une année entière à le lire attentivement (en association, il est vrai, avec une douzaine d'autres ouvrages).

Et n'ai CERTAINEMENT PAS envie d'être autant sévère - comme l'ont été, par exemple, Nastassia-B. ou Gwen21 en leurs respectables avis - quant au descriptif du "moindre des boulons" assurant solidité et cohésion à l'engin sous-marin "Nautilus" (ce "Narval" métallique aux proportions de cathédrale), quant aux psychologies plus que sommaires des personnages autres que le Capitaine Nemo, voire au "délit de remplissage" flagrant des cuves (C'est pour faire descendre le Nautilus, même si ça le plombe un peu) que constitueraient ces pages récurrentes énumératives des espèces végétales, animales ou hybrides (ces fameux "zoophytes") rencontrées, tout agrémentées de quelques attributs descriptifs avec indications très précises quant aux coloris de ces beautés inconnues qui peuplent agréablement les fonds sous-marins de notre Terre.

Le trio des personnages prisonniers de Nemo ("Mon nom est Personne", vraiment ? Pas si sûr...) aux caractères et psychologies très sommaires ou schématiques, c'est vrai :

- Pierre Aronnax, Professeur au Museum de Paris, évidemment fasciné par son aventure carcérale bien contrainte, essentiellement concentré sur son "Journal de Bord" tout à fait scientifique (mais faisant bien plus souvent office de "Diary" de leurs multiples emmerdements... )

- Son brave domestique si dévoué (nommé Conseil) : si dévoué qu'il donnerait tout l'oxygène de l'air qu'il respire (parcimonieusement) afin de sauver la vie de son Maître (dans le chapitre où ils sont pris sous la banquise du Pôle Sud) : dévouement jusqu'à l'absurde... Un personnage de Théâtre de boulevard (la première vocation artistique du jeune Jules Verne, ne l'oublions pas !) - et pourquoi pas ?

- "LE" bûcheron québécois dénommé Ned Land, toujours prêt à "péter un boulon" (ceux du Nautilus) dans sa situation peu enviable de "confiné" (prisonnier cherchant sans cesse la voie de l'évasion) ou à s'en prendre - faute d'autre défouloir - aux baleines, phoques, oiseaux mais aussi à ce dictatorial Capitaine comme à son équipage parlant entre eux un langage obscur aux néophytes (esperanto ?) : est-ce pour autant un con fini ? Un type frustre, c'est tout...

Parfaitement opérationnelle, cette division en 47 chapitres titrés formant les deux parties d'un très dense roman (plus de 600 pages en édition de poche, de "Un écueil fuyant" à "Les dernières paroles du Capitaine Nemo" puis la trop brève "Conclusion" ).

Conclusion d'ailleurs provisoire puisque Nemo n'a pas dit son dernier mot (rime) et outre son "Dieu tout-puissant ! assez ! assez !", il se repentira plus tard de ses "crimes" (tous commis en état de légitime défense de son cher Nautilus) et se rachètera en Deus ex-machina du futur gros roman (sorte de "survival's story") que sera "L'île Mystérieuse" en 1874-75...

Les listes énumératives des créatures croisées dans les fonds sous-marins sont loin d'être bâclées : le quadragénaire Jules VERNE ne s'est pas contenté de recopier les pages de encyclopédies... Elles peuvent d'ailleurs être survolées par le lecteur ; dans le cas contraire, il conviendrait d'en retenir le même charme propre à la "musique des mots" qu'on trouvait aux énumérations des noms de lieux ponctuant les pages du "On the Road" de Jack KEROUAC. Donc tout cela n'est pas si grave, n'est-ce pas, Nastasia et Gwen ? :-)

Indulgence et même respect devant l'échafaudage romanesque du "bon" Jules VERNE - et je me souviens de l'avis de Julien GRACQ dans "Lettrines I", avançant : "Je ne supporte mal qu'on dise du mal de lui. Ses défauts, son bâclage m'attendrissent." et renvoyant - en conclusion à ce passage évoquant ses Premières amours littéraires - au chef d'oeuvre incontestable que demeure pour lui "Voyages et aventures du Capitaine Hatteras".

Gracq a bien raison d'être ému, et "Vingt mille lieues sous les mers" vaut largement notre patience, notre respect et notre grand plaisir tout feuilletonesque pris "au jour le jour" face aux grands hublots du Salon. Neuf à dix mois à passer ainsi, confinés dans le "Nautilus" : soit une année entière, tel notre temps étiré de lecture... :-)

Signalons enfin l'envergure de la passionnante préface de Christian CHELEBOURG publiée en 1990 pour l'édition illustrée "Le Livre de Poche Jules Verne" (fac-similé de l'édition Hetzel) de la L.G.F.
Lien : http://www.dourvach.canalblo..
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