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Critique de deidamie


« le bonjour, navigateurs de Babel ! Au jour d'hui allons disserter sur un bien plaisant livre : L'estrange malaventure de Mirella, escrit par dame Flore Vesco.

Or donques la jeune Mirella, porteuse d'eau, travaille dur dans le bourg d'Hamelin. Elle se sent bien seulette et recueille un garçonnet fraîchement embauché. Las, vous connoissez le conte : la ville est bientost envahie de rats, et la peste suivra…

-C'est quoi cette jactance, Déidamie ? Tu ne peux pas parler comme toulmonde ?

-D'accord, j'arrête, c'est trop long de toute façon pour taper une simple phrase. Je ne m'appelle pas l'autrice, moi.

J'ai découvert ce roman grâce à une critique de Dedanso, que je salue au passage, et j'approuve le grand bien qu'elle en dit ! le livre est presque tout entier rédigé dans une langue magnifique, faite de vocabulaire tombé en désuétude, de tournures médiévisantes et de mots patinés pour leur donner un aspect vieillot et vieilli.

-Et en français moderne, ça veut dire quoi, ton charabia ?

-Ca veut dire que le texte est déguisé en français du Moyen Age. Déguisé seulement, car jamais tu ne butes sur le sens, tout reste transparent. Quelle performance ! Et quelle beauté ! Flore Vesco n'a pas seulement travaillé la forme de façon gratuite, juste pour faire genre « alors donc ça se passe au Moyen Age, des fois que vous l'auriez pas remarqué », non, elle a également pris soin d'y ajouter maintes figures de style pour rendre sa prose chaleureuse sans l'alourdir.

Traits d'humour, de sarcasme, assonances, alitérations, métaphores efficaces : l'ensemble est superbe. Et croiser des vieux mots qu'on n'utilise plus ou qu'on a oubliés m'a procuré de bien plaisantes sensations, un peu comme si je retrouvais de vieux copains. Bref, une friandise pour la langue ! Et les fans de Pratchett adoreront certaines blagues sur le culte de divinités. Je n'en dis pas plus pour ne point divulgâcher.

-Ben, heureusement que chuis là pour exiger une traduction… Alors moi, je tiens à dire qu'il y a des choses que j'ai pas aimées dans c'te histoire !

Premièrement, la solitude de Mirella ! Elle est complètement isolée et j'ai trouvé étrange qu'il n'y ait même pas une autre porteuse d'eau pour adoucir un peu son sort. Ensuite, son statut de proie sexuelle, que j'ai trouvé déprimant et oppressant au possible.

-Oui, mais… le Moyen Age, c'était pire qu'aujourd'hui…

-Popopopop ! Donne-moi des preuves, des témoignages sur de larges panels de population et des stats, s'il te plaît, parce que j'en ai marre des « oui, on met de la violence sexuelle dans les oeuvres historiques, pour que ce soit plus réaliste ». Je préfère qu'on soit honnête et qu'on dise « ben on sait pas, en fait. P't'êt ben qu'oui, p'têt' ben qu'non, sans compter que ça peut changer d'un siècle à l'autre, d'une ville à l'autre… »

-Méchante Déidamie, tu ne peux quand même pas nier que la violence sert l'histoire… Mirella se construit avec et contre elle.

-Non, en effet, mais malgré tout, je pense qu'il n'y avait pas besoin d'en faire autant.

D'autres détails m'ont chiffonnée, comme l'usage du poivre ou la position de Mirella attrapée par le prêtre. le prêtre est pas content, il lui tient l'épaule et hurle sa haine de la débauche, en réalité sa haine de la vie tout court. La jeune fille terrifiée se met à genoux, se prosterne même pour montrer sa soumission parfaite, il ne la lâche pas cependant. Elle est donc par terre, lui tient toujours son épaule ! c'est bon, tu vois le tableau ? Tu visualises la position des deux persos ?

Personne ne semble remarquer qu'il devrait être plié en deux et complètement déséquilibré dans une position ridicule pour continuer à imprécater comme il veut.

-Peut-être qu'il n'est pas gêné parce que… euh… parce qu'il est tout petit ? C'est possible ! Et puis, ce n'est pas le propos de ce passage, il faut parler de la peur de Mirella ! Enfin, tu chipotes sur des points de détail…

-Je suis Méchante Déidamie, je suis là pour remarquer ce qui ne marche pas, et ça, ça ne marche visuellement pas !

-Ce qui marche, en revanche, c'est le fond de l'histoire ! le roman réécrit le conte en le transformant en charge contre la bigoterie, l'obscurantisme, l'hypocrisie et le sexisme. Et il le fait en proposant une histoire d'amour et de découverte de soi originale ! Méchante Déidamie peut bien râler ici ou là, il n'en reste pas moins que c'est un excellent roman, brillant aussi bien sur le fond que la forme. »
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