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Critique de NMTB


NMTB
20 décembre 2014
Un soir d'automne vers dix-sept heures, Edison, inventeur de génie, alchimiste des temps modernes, nouveau savant fou, reçoit la visite de son ami Lord Ewald. Dans son château de Menlo Park, entouré de ses merveilleuses inventions alimentées par la fée électricité, il va concevoir une nouvelle invention prométhéenne en écoutant Lord Ewald lui raconter ses déboires sentimentaux. L'Eve future est une oeuvre à l'esthétique décadente : Comte anglais désabusé, Lord Ewald est au bord du suicide et c'est à Edison, génie méphistophélique coupé du monde au milieu de ses créations fantastiques, qu'il va échoir de raviver la flamme - quand bien même serait-elle artificielle - de cet aristocrate. Ce pauvre Lord s'est entiché d'une femme au physique merveilleux, Alicia Clary, portrait vivant de la Vénus découverte sur l'île de Milo, mais avec des bras. Qui plus est une actrice de talent, dotée, en sus de sa plastique parfaite, d'une voix de virtuose. Et sotte ! Mais sotte au dernier degré, profondément, incurablement. Une vraie petite bourgeoise, imbue d'elle-même, égoïste, intéressée, raisonnable, végétant dans la platitude, d'une totale misère morale et incapable d'aimer. Et c'est ce hiatus entre sa beauté corporelle et la médiocrité de son âme qui stupéfie Lord Ewald. Car s'il adore cette incarnation de la déesse de l'amour, l'âme froide comme le marbre à laquelle il s'est heurté le désespère. Edison, tel un nouveau docteur Frankenstein, pour y remédier va proposer à Lord Ewald de réaliser une sorte de golem électrique, une andréïde, ou autrement dit, dans notre langage contemporain et anachronique, le premier robot humanoïde de l'histoire ! L'Eve du futur. L'Idéal réalisé. Et quand lord Ewald lui oppose qu'il ne pourrait aimer une carcasse parfaite mais sans âme, Edison, encore plus désenchanté que son interlocuteur, lui rétorque positivement qu'il s'est déjà amouraché d'Alicia, carcasse vide, elle aussi, et que sa beauté est tout aussi artificielle que celle d'une andréïde. Il lui dit aussi que ce qu'on aime véritablement n'est jamais l'autre, mais la projection en elle ou en lui de notre propre idéal. Dans ce roman fin-de-siècle, Villiers de L'Isle d'Adam a inauguré tout un pan de la littérature de Science-fiction, celui des robots et de son vocabulaire pseudo-scientifique, avec l'ironie en plus, qu'on retrouve aussi dans les descriptions des machines extraordinaires du Raymond Roussel d'Impressions d'Afrique. Mais c'est surtout un roman avec un vrai questionnement sur ce qu'est l'Amour, l'Idéal, la Réalité. Dans une période où l'artificialité, par l'entremise notamment de la science, envahit de plus en plus le monde contemporain, un roman à lire d'urgence.
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