Deux hivers, un été

Cette BD est le résultat d'un immense travail de mémoire, à partir de témoignage oral et support photo. Deux générations de familles juives déracinées qui ont connu le malheur mais aussi des moments de vie intense ponctués d'étincelles de joie (brèves rencontres ou lettres « étincelles d'espoir dans leur vie si terne »). Les lettres sont-elles authentiques ? Surprenant, elles reflètent naïveté et platitude. Durant la période d'occupation nazie, la mesquinerie et la méchanceté sont inversement proportionnelles à l'empathie et à l'aide sincère des protecteurs. Cet équilibre en fait la force. le graphisme est travaillé avec justesse et profondeur (couleurs sombres pour les scènes dramatiques, couleurs chaudes pour signifier le bonheur, la beauté et l'espoir). Pas étonnant qu'Antoine Houcke l'illustrateur ait mis six ans pour aboutir !
Deux hivers, un été : les saisons sont dans les coeurs, et logiquement, les périodes sombres et douloureuses sont dominantes. La complicité narratrice-autrice-illustrateur, fait de cet album qui devrait être conseillé à l'école, une vraie réussite. Un exemple de la force graphique : en avant dernière page, on peut percevoir une double symbolique. Voit-on des branches d'arbuste en hiver ou des traînées de sang dans la neige ? Ou les deux sans doute. Bravo pour cette performance.