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Critique de Presence


En 2000, Thomas Tull crée la société de production de films "Legendary Pictures". En 2010, cette entreprise a annoncé la création d'une branche comics, sous la responsabilité de Bob Shreck. le premier comics édité par Legendary fut Holy Terror de Frank Miller, en 2011. le présent tome est le deuxième. Il s'agit de la première partie d'une histoire prévue en 4 tomes. le concept de départ a été élaboré par Thomas Tull et Matt Wagner, le scénario est de Matt Wagner, les dessins de Simon Bisley, l'encrage de Rodney Ramos, et la mise en couleurs de Ryan Brown. Ce premier tome bénéficie d'une couverture de Jim Lee, encré par Scott Williams et mise en couleurs par Alex Sinclair.

Une femme s'enfuit en courant dans les rues d'une ville américaine. Elle porte une jupe et des talons hauts, son visage est déformé par la peur, le poursuivant reste invisible, mais ses pensées permettent de comprendre qu'il se réjouit de cette peur. Après les 12 pages de cette course-poursuite, l'histoire commence pour de bon : Dimitri Solokov (un parrain de la pègre russe installée à New York) se rend à un rendez-vous avec Romulus Barnes dans une boîte de striptease. Barnes sert d'intermédiaire pour louer les services d'un tueur à gages très onéreux que l'on ne peut contacter que par le biais du site internet GeistHawk : John Tower. Solokov souhaite que Tower lui apporte la preuve de la mort d'Isaac Kessler, un individu en charge du blanchiment d'argent dans son organisation qui a détourné des fonds conséquents. Puis Tower enquête sur une série de meurtres dans une région rurale du sud de l'Iowa, à la demande d'Alicia Hardwicke, agent spécial du FBI.

Au vu du montage évoqué dans le premier paragraphe, il apparaît qu'il s'agit d'une commande : Thomas Tull (le big boss de Legendary) a demandé à Bob Shreck (responsable éditorial de Legendary Comics) de contacter Matt Wagner (grâce à une amitié établie de longue date entre Shreck et Wagner) pour étoffer le concept de départ. le lecteur comprend rapidement que John Tower est un chasseur de proies particulières. Il dispose d'une jolie lame avec une option haute technologie. Il s'agit d'un individu de race blanche qui a l'air à l'aise financièrement. Il évolue dans un monde contemporain réaliste (à part les proies en question). Et il porte un costume ridicule qui évoque celui d'un superhéros, en un peu moins exagéré (on a échappé à la cape, mais pas à la capuche, pardon au hoodie). Matt Wagner accomplit un travail tout à fait honorable en apportant de la chair sur le squelette du concept de départ. La scène d'ouverture constitue une belle course-poursuite qui permet d'établir les capacités du personnage principal et la nature de l'ennemi. La première enquête permet d'en découvrir un peu sur les lois surnaturelles, et la troisième enquête présente au lecteur l'ennemi récurrent, ainsi que vraisemblablement un personnage secondaire récurent, à savoir Alicia Hardwicke. Les scènes d'action impriment un rythme rapide à la lecture, et elles comportent leur lot de surprises qui les font sortir de l'ordinaire. Wagner prend soin d'inclure des séquences qui permettent d'étoffer John Tower, de montrer qu'il n'est pas simplement un tueur d'ennemis générique de plus. À ce titre, le passage où il s'assoit par terre dans une bibliothèque pour se mettre à lire en plein milieu de son exploration des lieux est très réussi. Si le recours à un site internet pour contacter Tower n'est pas très innovant, ce dispositif est utilisé à bon escient pour donner une logique d'organisation dans ses missions.

Cette histoire bénéficie des dessins de Simon Bisley, un artiste connu pour sa capacité à transcrire l'exagération, la bestialité, et pour inclure une forme de dérision très savoureuse. C'est lui par exemple qui a popularisé le Bad Guy démesuré qu'est Lobo, avec Keith Giffen dans Portrait of a Bastich. Ici il réalise des illustrations plus mesurées, tout en restant savoureuses. L'encrage de Ramos gomme les aspérités des contours, pour une esthétique plus jolie. Bisley utilise une mise en page qui oscille entre 3 à 5 cases par page, avec quelques cases en forme de trapèze, plutôt que rectangulaires pour accentuer un mouvement de temps à autre. La scène d'ouverture permet de constater que Bisley n'a rien perdu de son sens de l'humour, dès que la proie commence à révéler sa véritable apparence. En particulier, le visage déformé avec les yeux exorbités, et le corps à la musculature soudain plus marquée, plus dure sont aussi bruts que délectables. Les 4 cases consacrées à la transformation prennent toute leur valeur du fait de l'exagération de Bisley, ce qui n'aurait sinon été qu'une transformation stéréotypée de plus. Il faut souligner le travail discret de Ryan Brown, dont les couleurs complètent les dessins en leur donnant du volume, et en renforçant l'ambiance. le savoir faire de Bisley ressort pour chaque monstre, ou expression exagérée. Il se révèle également un décorateur inventif, avec tout un tas de gadgets dans le laboratoire du savant fou, qui donnent à la fois une identité spécifique à la pièce tout en jouant sur les stéréotypes propres à ce genre de pièce. Il est également visible que Bisley se fait plaisir avec la première page de la scène se déroulant dans le club de striptease, et qu'il s'est bien amusé à trouver des faciès marqués pour les différents personnages. Il s'arrange pour que la tenue de Tower soit à mi-chemin entre un costume sobre de superhéros et une forme d'armure légère. Par contre, les mouvements de capuche (un coup je la baisse, un coup je la remets) ont du mal à être crédibles.

Au final ce premier épisode de 64 pages constitue une introduction un peu pépère pour le personnage. Bisley canalise un peu ses débordements graphiques pour des planches où l'humour transparaît toujours, où les monstres sont répugnants ; mais il a déjà été beaucoup plus déchaîné. Matt Wagner pose les bases du personnage dans un scénario soigneusement calibré pour contenir tout le nécessaire, sans sortir assez des chemins bien balisés de ce genre d'histoire. Il manque encore des éléments qui sortent vraiment de l'ordinaire ou une intensité plus forte pour que John Tower devienne plus qu'un gugusse costumé parmi tant d'autres. le deuxième épisode permettra de confirmer ou d'infirmer cette sensation de trop peu.
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