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Critique de SZRAMOWO


Reese Witherspoon ne s'y est pas trompé, qui affirme sur le bandeau rouge entourant le roman : «Impossible de lâcher ce livre ! "
Comme dans La mort de Mrs Westaway, Ruth Ware a une façon de mettre ses personnages en danger, et de les en sortir, assez bluffante ! Cette auteure née en 1977, montre une maîtrise étonnante des ressorts psychologiques qui font ou défont les personnalités.
L'histoire des Cinq règles du mensonge est relativement simple.
Quatre amies, Isa Wilde, Kate Atagon, Fatima Chaudhry et Thea, se sont connues au lycée de Salten, «un « cabaret de la dernière chance » – le genre d'endroit qui avait de la place pour l'inscription précipitée d'une élève ayant des problèmes familiaux, et qui ne posait pas de questions sur une fille expulsée de trois lycées de suite.»
Elles avaient alors quinze ans. Quinze ans, l'âge de tous les possibles...
Elles ont vécu avec un bonheur et une joie assumée ce sentiment de puissance que seule l'adolescence confère, «À nous quatre, nous pouvions trouver une solution à tout. Nous nous sentions invincibles.»
Enfermées dans leurs certitudes, leurs différences et leur volonté de se démarquer des autres, elles ne voient pas que la réalité qui les entoure est tout autre, et qu'en s'isolant des autres elles ‘en font des adversaires, voire des ennemies…
Au fond, semble dire Ruth Ware, sont-elles si différentes des autres filles du lycée ? Sont-elles bénies des Dieux ? Sont-elles à l'abri de ce que la vie va leur réserver ? Vont-elles passer par-dessus les obstacles ?
Le roman est construit en cinq chapitres, chacun d'eux portant le nom d'une règle du fameux jeu du mensonge auquel elles n'ont jamais arrêté de jouer pendant leur séjour à Salten.
Le premier chapitre, «Règle numéro Un - Dis un mensonge», est une description merveilleuse de l'adolescence des filles, parcourue des flashes-back de Isa Wilde, la narratrice.
Kate les invite chez elle près de Salten, dix-sept ans après leur départ du Lycée et, Isa mesure le temps passé lorsque son amie lui dit :
«— C'était tellement bizarre quand tu es arrivée à la gare, avec ce petit être. Et te voir la trimballer, lui essuyer la bouche, lui changer ses couches comme si tu avais fait ça toute ta vie… C'est dur de se rappeler que tu es mère, quand je te vois là, assise sur la même chaise qu'avant. Physiquement, tu es exactement la même, c'est comme si rien n'avait changé, et pourtant…
Et pourtant tout a changé.»
Devenues adultes, les quatre amies vont se confronter à ce qu'elles sont devenues et sentir la menace du poids d'un passé qui pourrait anéantir leur présent.
Ruth Ware explore les méandres des personnalités de ces amies unies par un serment de fidélité qu'elles se refusent de remettre en cause, malgré les évidences. Deux d'entre elles sont mariées et mères de famille, deux autres restent fidèles aux serments du passé…
Kate est la seule a être restée à Salten, vivant toujours dans le Moulin de son père Ambrose, professeur de dessin au lycée des filles. Elle est une sorte de témoin, de référence et de juge, dictant leur conduite aux trois autres filles. Sous les yeux des habitants du village, le drame qu'elles ont autrefois vécu ressurgit et menace de les anéantir ou plutôt d'anéantir la vie qu'elles ont construit loin, parfois à l'opposé, de cette époque.
«Seule Kate est restée à Salten et, avec le recul, je crois que sa maison était autant une prison que l'établissement de Thea. Sauf que c'était nous qui avions érigé les barreaux aux fenêtres.
Nous nous écrivions, moi chaque semaine, mais elle ne répondait que sporadiquement, des mots brefs et las qui parlaient de sa lutte incessante pour joindre les deux bouts, et de sa solitude sans nous.»
L'auteure pose au lecteur la question du poids du passé. Dans quelle mesure sommes-nous comptables de notre passé, de ceux que nous avons oubliés ou négligés, des "vrais amis" que nous avons renié, et ceux-ci sont-ils en droit de nous demander des comptes sur ce que nous avons fait de nos serments jugés alors éternels ou définitifs... ?
Vaste sujet ! Les nouveaux partenaires de notre vie, sont-ils, eux, en droit d'exiger :
«— C'est n'importe quoi ! Tout ça, c'est des conneries. Elle s'est débrouillée sans toi pendant dix-sept ans, Isa. Qu'est-ce qui te prend ? Je ne comprends pas – tu ne l'as pas vue pendant des années et, tout d'un coup, il suffit qu'elle claque des doigts et tu arrives en courant ? »
Ruth Ware fait référence dans le roman à cette définition connue du « véritable ami » qui laisse tout tomber sans poser de questions, si vous l'appelez pour planquer un cadavre…
Sauront-elles, malgré le temps qui a passé, appliquer la règle numéro cinq du jeu :
« (…) savoir quand cesser de mentir. Jetez l'éponge avant que ça dégénère, comme disait toujours Thee. le truc, c'était de pouvoir reconnaître quand vous en arriviez là. Mais je ne sais pas si nous avons vraiment réussi cette fois. On dirait que, quoi qu'on fasse, les ennuis vont arriver. »
Les voeux d'adolescence continueront-ils à peser sur leur destinée et leur imposer de rester dans le mirage d'une adolescence qui s'oppose aux adultes qu'elles sont devenues « Je pense au toast qu'a porté Kate, cette nuit-là, il y a si longtemps, alors que nous nous connaissions à peine. Puissions-nous ne jamais vieillir. »
Gardons-nous au plus profond de notre personnalité cet adolescent exigeant et sans pitié qui vient parfois nous hanter et nous questionner sur la différence entre la personne que nous rêvions de devenir et celui que nous sommes devenus ?
Ruth Ware, soyez remerciée pour ce roman !

Lien : https://camalonga.wordpress...
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