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Critique de Titania


Voilà un grand roman américain, pour répondre avec un exemple à une question du forum ! Il comporte en effet tous les ingrédients indispensables.

Quand un célèbre réseau de passeurs clandestins abolitionnistes est structuré comme une compagnie de chemin de fer, il suffit juste d'un petit artifice littéraire pour introduire une dose de fantastique dans un roman réaliste et très documenté sur la réalité humaine et juridique de l'esclavage.

C'est ce qui rend le roman de Colson Whitehead aussi brillant et extrêmement original. Il nous fait embarquer avec lui dans son « pôle express » vers la liberté, sur les pas de Cora une jeune fille esclave qui s'enfuit d'une plantation de Georgie, dont les propriétaires ont moins d'égards pour les humains que pour le matériel agricole. Brimades, humiliations, mauvais traitements sont le quotidien de ces esclaves pour lesquels c'est un exploit d'arriver à l'âge de 40 ans. Il arrive forcément à beaucoup, l'idée de prendre tous les risques pour échapper à l'enfer, gagner avec l'aide de quelques courageux, les États du Nord ou le Canada.

L'émancipation de Cora est un chemin pavé d'embûches et de rencontres, dans lequel l'alphabétisation et l'instruction jouent un rôle considérable dans son parcours chaotique vers la liberté. le récit est dynamique et haletant, le passage par les différentes « gares », comme autant d'occasions de découvrir des personnages et de nouvelles réalités. La symbolique est intéressante entre les trains solides, les conducteurs sûrs d'eux ou les jeunes un peu déroutés et petites draisiennes vermoulues qui n'ont l'air de rien .

Ce faisant il nous montre une réalité d'une violence inouïe mais moins manichéenne qu'on ne l'imagine. Même dans les états du sud, il y avait des abolitionnistes, des gens qui prenaient des risques personnels dans des sociétés devenues totalitaires du fait de l'économie de plantation et des peurs nées du système esclavagiste. La terreur semée par la législation, les cavaliers de la nuit et autres chasseurs d'esclaves en fuite, emprisonne tout le monde. C'est ce que démontre l'étape en Caroline du Nord chez Martin et Ethel, paralysés par la peur, coincés entre leur foi, leurs engagements, et un système qui encourage la délation et le lynchage.

Ce livre est un hommage à Harriet Tubman et autres passeurs qui ont oeuvré jusqu'à l'abolition de l'esclavage, et même au- delà pour la conquête des droits civiques.
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