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Critique de thedoc


thedoc
17 décembre 2017
« La nuit » d'Elie Wiesel, tout comme « Si c'est un homme » de Primo Levi, est un des témoignages emblématiques de la littérature de la Shoah.
La nuit, c'est la dernière qu'il passe dans sa maison.
La nuit, c'est la dernière qu'il vit dans le ghetto.
La nuit, c'est celle dans le train. Interminable.
La nuit, c'est la première dans le camp, celle qui n'a jamais pris fin. Et de sa Foi qui s'en est allée.

Elie Wiesel, originaire de Sighet en Roumanie (Transylvanie à l'époque), est déporté à Auschwitz en 1944 à l'âge de 15 ans, avec ses parents et ses soeurs. Avec son père, il survit à la sélection et ira travailler à l'usine de la Buna, située dans un des camps d'Auschwitz, avant de connaître les marches de la mort en janvier 1945 qui le mèneront au camp de Buchenwald. Son père ne survivra pas à cette dernière épreuve.

Absolument glaçant, le récit du jeune Elie Wiesel nous plonge au coeur de la machine de mort qu'était Auschwitz. Comme dans le témoignage de Primo Lévi (mais c'est ici le seul point commun), les SS apparaissent finalement peu souvent. Ce sont les détenus, les chefs de block ou les gardiens qui composent le principal sujet du récit.
Elie Wiesel nous parle de la lutte de tous les jours : survivre aux coups, survivre à l'épuisement, survivre aux tortures. Et surtout survivre à la faim, cette si terrible faim, celle qui obsède et qui rend les hommes fous. Celle qui fait qu'un fils roue de coups son père pour un quignon de pain.
L'expérience concentrationnaire est l'expérience de la survie animale. La mort – à part la sienne - , omniprésente, devient anecdotique.

Elie Wiesel n'échappera pas à cette sauvagerie et à cette déshumanisation. L'adolescent qu'il est alors n'éprouve que haine et colère. Contre ses tortionnaires, contre un Dieu en qui il ne croit plus, contre son propre père. Le dernier râle, la dernière supplique de son père, il ne voudra pas l'entendre par peur des coups du SS. A plusieurs reprises au cours de sa détention puis de la marche forcée, il voit des fils renier leurs pères. Plusieurs fois, il se dit « Non, pas moi », la honte le recouvrant quand il se surprend à comprendre cet abandon filial. Et pourtant, pourtant, … Au lendemain de la mort de son père, pas de larmes. Un soulagement certainement. Pour son père enfin en paix ? Non , pour lui-même, enfin libre !
A la libération du camp, Elie Wiesel est vivant mais le camp a gagné, lui enlevant au dernier instant toute sa dignité d'homme. Profondément religieux avant l'expérience concentrationnaire, il perd sa foi. Plus de Dieu, plus de père.
Elie Wiesel a vécu une nuit sans fin.
On ressort vidé de cette lecture.


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