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Critique de domi_troizarsouilles


Voici un nouveau livre qui était conseillé dans le « Je bouquine » (je ne sais plus lequel, par contre) de mon fils aîné (14 ans), magazine que je considère comme une référence depuis ma propre adolescence, si bien que je n'ai pas trop hésité à l'acheter, un peu plus à le lire – mais ce n'est pas par manque d'intérêt soudain après l'achat, c'est juste qu'il a rejoint une PAL déjà énorme ! La couverture est mystérieuse, on nous annonce du thriller, et en plus le titre me vaudra quelques bons points dans l'un ou l'autre challenge ! ;)

Le synopsis en dit déjà beaucoup, mais pas l'essentiel : on a effectivement le crash d'un avion en pleine jungle, et seuls quelques lycéens y survivent presque par miracle. Reste alors à s'organiser, pour survivre, et attendre les secours (improbables) ou s'aventurer dans cette jungle à la recherche d'une solution (tout aussi improbable). Mais bien plus qu'un roman de survie en milieu hostile, ce livre est l'exposé des tensions et des ententes qui naissent dans le groupe, son organisation, ses rivalités, les prises de décision toujours délicates entre le besoin de se mettre en avant de l'un des protagonistes, et le refus de la confrontation, peut-être bien un peu de lâcheté de la part de l'autre.

Oh ! quelques scènes pénibles ne nous sont pas épargnées ! On n'est pas dans un roman à sensation, l'écriture est même assez froide et sèche ai-je trouvé. le s19 adolescents sont les seuls rescapés de ce crash, et la carcasse du reste de l'avion (qu'une partie d'entre eux vont rejoindre pour inspection) prouve qu'il n'y a plus aucun espoir pour ceux-là, y compris plusieurs de leurs camarades (car le groupe de départ comptait plus du double de lycéens !). Ce sont des amis qui sont morts, mais on ne voit pas les larmes des survivants, on ne partage pas vraiment leur angoisse ou leur tristesse ; on serait plutôt comme des scientifiques, observateurs géants d'une petite colonie de lycéens-fourmis en plein désarroi, lequel est trop lointain, trop peu exploité pour nous toucher vraiment.
En revanche, on repère très vite les deux personnages principaux : Tom, orphelin depuis l'accident de ses parents quand il avait 9 ans, solitaire et sans amis car il ne comprend même pas à quoi ça pourrait lui servir, mais apparemment heureux dans sa solitude et dans ses livres. En face de lui, Joel, dont on ne sait presque rien, s'impose comme chef des survivants, car selon lui il fallait bien que quelqu'un prenne les choses en mains… et vu comme certains autres du groupe lui obéissent sans sourciller, presque avec reconnaissance parfois même, il avait peut-être raison ? Sauf que ledit Joel ne prend jamais les bonnes décisions, plus occupé à assoir son autorité qu'à chercher de réelles solutions pour la survie du groupe – certes, on pourrait reprocher à l'auteur une telle vision caricaturale très manichéenne d'une microsociété, mais à la réflexion : est-celle vraiment si peu réaliste ?...

À côté de Tom, on a toute une série de personnages secondaires importants : Kate la débrouillarde, Barney le geek pragmatique, Shen le futur médecin, ou Alice… En face d'eux, c'est-à-dire parmi ceux qui suivent Joel sans trop réfléchir, aucun des personnages n'est vraiment exploité avec le même intérêt, ils sont à peine effleurés, restant quant à eux secondaires-secondaires, ce qui accentue sans doute le côté manichéen indéniable de ce roman. Ainsi, les « bons » sont très vite reconnaissables et organisés, sans avoir besoin de chef, même si Tom le devient bien malgré lui, sans jamais revendiquer le titre toutefois. Lui qui a toujours vécu en solitaire, se contente de prendre les décisions qui lui semblent bonnes - et évidemment le sont tout au long du livre -, mais jamais il ne s'impose, tandis qu'il fait un réel travail d'introspection sur lui-même et se rend compte que c'est peut-être ce que les autres attendent de lui, qu'il soit le « chef » sans en avoir le titre, et surtout sans le besoin de paraître d'un Joel…

Pour le reste, les questions en sous-titre sur la couverture sont de la poudre aux yeux, une astuce éditoriale qui me dérange bien un peu. Qui survivra / qui mourra ? Ben oui il va y avoir quelques morts, mais une fois encore : l'écriture trop sobre ne permet pas qu'on s'attache à eux, même dans un passage qui aurait pu être mélodramatique, mais qui est juste disséqué de façon analytique sans permettre de réelles émotions – pourtant, ceux qui me suivent, savent que j'ai la larme facile ! Qui deviendra un assassin ? Bon sang ! je ne vais pas divulgâcher (merci à nos amis québécois pour cette expression tellement parlante, et tellement plus jolie que le franglais « spoiler » ! je l'ai apprise aujourd'hui même), mais clairement il n'y a pas d'assassin au sens strict du terme ! J'ai même vérifié par acquit de conscience, et voici ce que me dit Le Robert (consulté en lige ce 7 septembre) : « 1. Personne qui commet un meurtre avec préméditation ou guet-apens. 2. Personne qui est cause de la mort (de qqn). » Or, ce n'est en aucun cas le 1, et pas tout à fait le 2… c'est vraiment dommage de présenter les choses ainsi, de façon presque racoleuse, alors qu'il s'agit de tout autre chose, peut-être même le vrai drame du livre ! mais à nouveau : en dire plus serait divulgâcher (oui, j'insiste !), alors lisez ce livre pas tout à fait extraordinaire, mais sans aucun doute percutant.

En un mot : c'est un microcosme de lycéens, mais on croirait tellement voir notre propre société en période électorale, entre les politicards qui se veulent meneurs en criant leur slogans et agitant mille promesses galvanisantes, faux engagements qui ne sont souvent que de fausses solutions aux problèmes des gens, tandis que ceux qui ont de bonnes idées restent à leur niveau « à la base », timorés, se cachant derrière timidité, refus d'engagement public ou toute autre forme de refus de se mettre en avant. Cela donne un résultat indéniablement manichéen qui peut déranger ; pour ma part, je le trouve juste un peu caricatural peut-être, mais tellement réaliste aussi, et représentatif de notre société et de ses (pseudo-)leaders, qui dépasse largement l'histoire imaginaire d'un petit groupe de lycéens perdus !
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