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Critique de mumuboc


Quel est son nom ? On ne le connaîtra pas.....Jamais, elle n'est que l'image d'une jeunesse syrienne sous les bombes. On ne lira que ses feuilles où elle nous raconte son enfance et cette adolescence qu'elle vit aux milieux des bombardements.

Un étrange récit dans lequel l'auteure s'est mis à la place de cette jeune fille, dans les conditions de son isolement mais aussi dans sa tête, dans ses pensées, dans son quotidien, attachée par une corde soit à une personne soit à une fenêtre, 

Pourquoi Samar Yazbek choisit de l'encorder depuis qu'elle marche ? Cette enfant qui éprouvait tant le besoin de marcher, de bouger, qui était donc la vie même ? Peut-être pour que le contraste avec ce besoin de liberté et l'immobilisation soit plus grand. Pourquoi avoir choisi d'une enfant muette ? Peut être pour justifier ses écrits. Elle ne sait que psalmodier le Coran, son refuge son seul moyen d'expression sonore, une mélopée qu'elle lance comme une bouée d'espérance.

Ce qui me frappe dans ce récit c'est l'implacabilité des sentiments : pas beaucoup d'émotions ressenties par la jeune fille, même dans les décès, une sorte de distance par rapport à la mort, peut-être un quotidien tellement présent, même quand elle touche ses proches, ses très proches.

Au milieu du quartier de la Goutha (tristement célèbre pour les bombardements chimiques il y a quelques semaines) elle partage avec nous, avec son langage, son quotidien, les silences rompus par les avions survolant les ruines et déchargement leur triste cargaison, le peu d'activité qu'elle peut avoir. Elle se réfugie dans l'écriture, dans ses souvenirs de lecture et en particulier le Petit Prince, son livre préféré mais aussi dans sa mémoire : les couleurs sont omniprésentes, les personnes qui ont compté pour elle : Set Souad, cette bibliothécaire qui a pris des risques pour lui faire découvrir les livres entre autre. Elle possède une imagination débordante, elle créée un monde de survie, inventant des planètes, des couleurs pour les moments de bonheur qu'elle vit mais aussi pour les moments de tristesse. Ils ont tous une couleur.

Il y a dans l'écriture une ambiguïté : souvent des phrases simples, d'une adolescente avec ses mots, son regard naïf parfois sur ce qui l'entoure, son environnement mais par d'autres des profondeurs philosophiques, qui sont un peu contradictoires.

Une petite syrienne qui écrit comme elle pense, qui jette sur le papier ses pensées, ses souvenirs, comme ils viennent, qui relate une terrifiante situation d'abandon, de ruines, de massacres.

On est parfois désorienté par le style mais il n'est pas question ici de style : c'est un témoignage de l'enfer syrien, du quotidien des gens vivant sous les bombes, encore plus lorsque vous êtes femme et que l'on ne peut par exemple vous dévêtir, même à l'hôpital, pour une question d'honneur alors que ses vêtements sont imprégnés de produits toxiques... Il y a plus de femmes qui décèdent que d'hommes pour cette raison.

Un récit poignant dans une écriture particulière, qui ne peut surtout laisser indifférent. C'est une longue agonie d'une jeunesse qui ne trouve d'échappatoire que dans le souvenir des livres, du plaisir de la lecture, du dessin, de ses petits trésors accumulés, perdus mais toujours présents dans son esprit.

Merci aux Editions Stock et NetGalley pour cette lecture malheureusement d'actualité. Ne fermons pas les yeux.

Dans ma note je distingue l'histoire et le style, ce dernier étant parfois un peu déroutant.
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