AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
>

Critique de saigneurdeguerre


Port d'Anvers (Belgique).
Fin novembre 1955.

Le bateau qui vient d'accoster a connu une avarie en pleine mer. Une partie de son chargement a connu bien des misères. Les très nombreux animaux qu'il transportait dans sa calle sont morts. La puanteur est phénoménale à cause de tous ces cadavres en décomposition. Tous les animaux sont morts ? Tous ? Non ! Un animal d'une férocité redoutable a survécu… Une bête indescriptible. Singe ? Léopard ? Ours ? Un croisement improbablement entre espèces ? A coup sûr, un MONSTRE…

Critique :

Le Marsupilami tel que vous ne l'avez jamais vu ! Fini, le gentil et comique marsupial destiné à faire rire les enfants ! Tremblez jeunes gens ! Evanouissez-vous jeunes filles ! Une bête dangereuse, incontrôlable, s'est échappée.

Et qui va la recueillir ? Un marmot qui ne cesse de ramener chez lui toutes les bestioles à plumes ou à poils qu'il rencontre et qui sont souffrantes, blessées, ou trop vieilles et condamnées à l'abattoir. François. Il s'appelle François. François van Den Bosche, un nom tout ce qu'il y a de plus belge. Belge ? Vraiment ? Vous êtes sûrs ? Alors, pourquoi ses charmants compagnons, dont le premier de classe, l'appellent-ils van le Boche ? pourquoi est-il le souffre-douleur de trois de ses très estimés compagnons de classe ?

Il faut que je vous avoue que sa mère a commis, vers la fin de la guerre, l'irréparable. Elle a aimé un soldat allemand ! Un sale Boche ! Depuis, elle est considérée par les bonnes âmes comme un être impur. N'est-elle pas mère-célibataire ? Et qui c'est que c'est qui a semé la petite graine, hmm ? Une moins que rien ! Tout le monde le sait ! Cette petite dévergondée et son mioche ne méritent pas de…

Pour gagner modestement sa vie et nourrir son fils, elle vend des moules au Marché au Poisson.

Vous en raconter davantage serait criminel, alors affrontons courageusement, les femmes et les enfants d'abord, tous ceux qui vont vomir cette bande dessinée. Leurs arguments ne manqueront pas : « Quelle trahison ! Comment est-ce possible ? Que fait l'ONU ? Pourquoi l'OTAN ne bouge pas ? Virez le gouvernement ! Et le Pape ? Pourquoi il ne dit rien, le Pape ? Encore un coup des islamo-gauchistes d'extrême-droite ! Comment a-t-on pu transformer le gentil Houba ! Houba ! Marsupilami, en être démoniaque qui fait peur aux enfants (et à beaucoup de grands) ? Qu'est-ce que donc que ce langage peuplé d'astérisques qui renvoient à des sous-titres parce que l'auteur recourt à une langue barbare ? Pourquoi autant de cases sans le moindre dialogue ? Qu'est-ce que ce format débile si éloigné du véritable format BD franco-belge ? Et ces couleurs ! Non, mais ! Vous avez vu ça ? Des bruns… Des gris… Des marrons ! Beurk ! Beurk ! Beurk ! »

Je ne suis pas payé pour défendre les auteurs, mais, ne tirez pas ! Moi, j'ai adoré ! D'abord, ce langage barbare, c'est du bruxellois ! Quand j'étais enfant (c'était il y a quelques décennies) tous les enfants et une majorité d'adultes s'exprimaient ainsi « en français » à Bruxelles. (Répétez après moi : Brusssselles et pas BruXXXXelles !) Zidrou a rendu crédible une histoire qui se déroule essentiellement en Belgique, et plus particulièrement à Bruxelles au milieu des années cinquante.

Le format, peu pratique, il est vrai, pour le glisser dans sa bibliothèque aux côtés d'autres BD est celui qui a semblé graphiquement le mieux adapté à l'oeuvre originale que Zidrou et Frank Pé ont réalisée. de temps à autres, il y a de très grandes cases avec des dialogues minimalistes… Mais à quoi bon causer quand l'image est tellement forte qu'elle se suffit à elle-même ? Les premières planches sont dignes des films les plus noirs avec cette pluie, la nuit, qui, rien qu'à la vue des images, vous donne froid dans le dos et vous transperce comme le fait la pluie glaciale d'automne qui annonce l'arrivée de l'hiver. C'est glauque… Parce que l'histoire est glauque ! Tant le sort de ces animaux que celui du marsupilami dont on continue de tout ignorer, que celui de ce garçon et de sa maman, abandonnés à leur triste sort. Pourtant, en dehors de François et de sa mouma, il y a d'autres personnages lumineux dans ce récit… Heu… Aurais-je vraiment mis « personnages » au pluriel ? Ah ! Veuillez m'excuser… le « s » est en trop ! Il y a un personnage d'une rare gentillesse dans ce monde de brutes : monsieur Boniface, l'instituteur de François. Il est … Heu… C'est sa vie privée, si vous voulez en savoir plus, lisez « LA BÊTE » !

Frank Pé a un rare talent pour la caricature, les expressions du visage. C'est tout simplement exceptionnel et les couleurs me semblent très bien adaptées au contexte historique et sombre du récit.

Beaucoup ne partageront pas mon avis, je m'en fous, j'ai adoré et j'attends une suite car l'histoire se termine sans se terminer et il semble clair qu'il y aura un « à-suivre » puisque les auteurs ont jugé bon de préciser « Fin de l'épisode » !
Commenter  J’apprécie          358



Ont apprécié cette critique (35)voir plus




{* *}