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Critique de YvesParis


François Zimeray est devenu célèbre bien malgré lui. le 14 février 2015, alors qu'il participait à un hommage aux victimes de l'attentat contre Charlie Hebdo avec le dessinateur Lars Vilks, auteur des caricatures de Mahomet, et Inna Shevchenko, une Femen ukrainienne, il a failli mourir sous les balles d'un terroriste islamiste. Cet événement traumatisant l'a incité à prendre la plume pour partager son expérience d'ambassadeur chargé des droits de l'homme.
François Zimeray a exercé cette fonction originale de 2008 à 2013. Elle avait été créée en 2000 par Hubert Védrine. Elle existe dans six autres pays de l'Union européenne ainsi qu'aux Etats-Unis. A la différence des autres ambassadeurs, affectés auprès d'un Etat ou d'une organisation internationale, l'ambassadeur pour les droits de l'homme – et, depuis 2009, en charge de la dimension internationale de la Shoah, des spoliations et du devoir de mémoire – est un ambassadeur thématique. Il en existe une grosse vingtaine au Quai d'Orsay. Dans un récent essai écrit avec une plume vipérine, Vincent Jauvert a mis en cause l'utilité de certains d'entre eux. Celle de l'ambassadeur des droits de l'homme ne fait guère de doute : il représente la France dans les institutions multilatérales qui traitent des droits de l'homme (ONU, OSCE, Conseil de l'Europe…) et incarne, par sa présence sur le terrain, la solidarité de la France avec toutes les victimes.
François Zimeray n'est pas diplomate de carrière. C'est un avocat plongé, très tôt dans le bain de la politique : à vingt-sept ans à peine, ce jeune fabiusien est élu maire du Petit-Quevilly, à trente-sept ans, il entre au Parlement européen. le regard qu'il porte sur ses fonctions n'est pas celui d'un technocrate sans âme. Il en parle avec une troublante sincérité dans un livre qui n'est ni un journal, ni un essai, mais plutôt un bloc-notes d'une trentaine de chapitres, très courts, restituant sans souci de chronologie ou de hiérarchisation des souvenirs glanés au fil de ses voyages. du Rwanda à la Syrie, de l'Ukraine à la Birmanie, François Zimeray nous donne à voir des journalistes bâillonnés, des prisonniers torturés, des femmes violées, des enfants asservis… Pas de relativisme qui vaille pour ce défenseur des droits de l'homme : « il n'y a pas deux façons différentes de souffrir selon les latitudes et les cultures (…) si les droits de l'Homme sont universels, c'est que l'homme est universel » (p. 33).
Cette sincérité revendiquée a toutefois ses limites. A lire François Zimeray, on s'interroge sur le statut de sa parole. Bien entendu, un avertissement nous signale que « le contenu de ce livre n'engage que son auteur (et) ne saurait être regardé comme reflétant les positions officielles du ministère des Affaires étrangères de la République française » (p. 11). Pour autant, François Zimeray a exercé – et exerce encore – dans ce ministère des fonctions de responsabilité. Il est l'un des acteurs – et non des moindres – de cette politique étrangère dont il souligne les limites et dénonce les incohérences. Son témoignage, aussi émouvant soit-il, crée du coup un malaise : légitime dans la bouche d'un activiste des droits de l'homme, il l'est moins dans celle d'un haut fonctionnaire qui aurait pu apporter un remède aux maux qu'il dénonce.
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