AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
>

Critique de Diabolau


Mon premier Zola... à mon âge, il était sans doute temps.
Je ne figure pourtant pas parmi tous ces gens que je connais, qui ont refusé de remettre le nez dans Zola depuis qu'on leur en a infligé un de force durant leur scolarité alors qu'ils n'étaient pas prêts. On m'en a infligés d'autres, certes, dont un Balzac que je n'oserai sans doute pas rouvrir, mais pas du Zola.
Je ne dirai jamais assez combien certains profs font de lourds dégâts en faisant lire des livres trop tôt à leurs ouailles, même si c'est sans doute aussi de la faute des programmes.
Bref, au fait.
Le moins qu'on puisse dire, c'est que ce roman est à peu près l'antithèse de ceux qui sortent par dizaines sur les étagères des librairies tous les mois en 2023.
Au lieu de 50 chapitres qui se lisent en 5 à 10 mn chacun, il comporte 7 chapitres qui, à part le dernier, prennent une à deux heures.
Au lieu de tailler des personnages à coups de serpe et d'enchaîner les rebondissements à 200 à l'heure, il prend son temps pour tout décrire, poser son ambiance, faire tout l'historique de ses héros (et antihéros... ceux-là sont nombreux) et est très économe d'actions d'éclat.
Au lieu de mettre des pages et des pages de dialogues, il n'en met quasiment pas.
Je serais tenté d'ajouter : au lieu d'utiliser 200 mots de vocabulaire, il fait le tour des possibilités de la langue française, mais on me taxerait sans doute d'être un réactionnaire ;-)
Certes, c'est âpre, surtout au début. Il faut s'accrocher dans cette galerie familiale large et complexe, avec des allers et retours dans le temps sans qu'on en soit prévenu, il faut être patient, accepter de patauger un peu dans la semoule pendant quelques heures, même si on ne peut qu'être frappé, dès le début, par la terrible beauté du style. À oublier, donc, si vous avez l'habitude de lire des trucs faciles d'accès à moitié en pensant à autre chose.
On peut volontiers reprocher à l'auteur d'être un brin trop manichéen : soit ses personnages sont de gentils rêveurs naïfs et idéalistes (Miette, Sylvère, Pascal), soit – bien plus souvent d'ailleurs – ce sont d'abominables ordures, cruelles, impitoyables et opportunistes sans une once de scrupule (Pierre et Félicité Rougon, Aristide, Eugène, et surtout Antoine Macquart, celui-ci détenant la palme de la détestabilité, je crois avoir rarement vu ça dans la longue histoire de mes lectures).
C'est vrai que certains passages sont un peu longuets, et que parfois on a envie que ça avance plus vite, malgré l'indéniable qualité de prose. Il est un observateur si microscopique et virtuose des moeurs humaines (surtout les pires) qu'on a envie parfois d'avancer plus vite et de sauter des détails sordides... pas que, d'ailleurs : les amours naissantes des deux adolescents sont magnifiquement bien dépeintes, mais interminables.
Mais chaque fois qu'on commence à en avoir un peu marre, le génie se rappelle à nous pour nous en mettre plein la vue et nous ôter toute envie de sauter des pages.
En refermant ce grimoire, je comprends mieux à quoi correspond l'expression : "c'est du Zola !"
Commenter  J’apprécie          213



Ont apprécié cette critique (21)voir plus




{* *}