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Critiques de Alain-Fournier (458)
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Le grand Meaulnes

À vouloir saisir les ailes d'un papillon, on peut réduire en poussière ses couleurs chatoyantes. Aussi ne ferai-je qu'effleurer "Le Grand Meaulnes", de crainte d'en ôter la magie...



Cette merveilleuse histoire d'amour et d'amitié, publiée en 1913, symbolise à mes yeux le passage de l'adolescence à l'âge adulte, avec tous les déchirements et les tragédies que cela implique. Tragédie cristallisée l'année suivante par la mort de l'auteur, fauché à la veille de ses 28 ans lors des premiers combats, effroyablement meurtriers, de la Grande Guerre.



J'aime le romantisme des personnages, le charme délicat d'Yvonne de Galais, la démesure de son frère Frantz et la quête d'absolu d'Augustin Meaulnes, ce double héroïque du sage narrateur, François Seurel. L'aventure de Meaulnes à la fête étrange du Domaine inconnu conserve la magie d'un songe. Et la nature, si présente dans la description des paysages de Sologne, s'en fait la complice.



Un roman initiatique que j'ouvre de temps en temps, pour respirer dans ces pages qui ont jauni un parfum d'adolescence. J'y ai même retrouvé un trèfle à quatre feuilles, aussi diaphane et léger, maintenant, qu'une aile de papillon.
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Le grand Meaulnes

Le Grand Meaulnes raconte l'histoire d'un premier amour , celui qui ne se concrétisera jamais et dont on garde un souvenir ébloui .

C'est un livre au charme désuet , celui d'une époque qui n'existe plus , un roman très romantique , il y a dans ce livre , une atmosphère particulière qui nous fait pénétrer dans un monde merveilleux , magique , c'est ça la force du roman , il nous emmène au pays des rêves , on est un peu comme dans un état d'hypnose pendant la lecture .

Moi personnellement , jen garde un souvenir émerveillé et je n'ai pas envie de le relire , j'aurais bien trop peur que la magie n'opère plus , pas certaine que ce qui m'avait tant plu à l'adolescence me plairait encore aujourd'hui , je préfère rester sur cette impression inoubliable comme celle que laisse le souvenir d'un premier amour .

Je ne peux m'empêcher de mettre un petit mot sur l'auteur bien que l'histoire soit connue , il est mort pendant la première guerre mondiale , lui non plus n'a pas vieilli , il est resté comme son roman à l'abri du temps qui passe .
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Le grand Meaulnes

Ah ! Le grand Meaulnes ! Je me souviens d'avoir fait la découverte d'Alain-Fournier dans ce bon vieux Lagarde et Michard. Et ce qui avait retenu mon attention, ce n'était pas le texte, mais sa photo devant laquelle je bavais ! J'étais au collège à l'époque... Alors bien évidemment, je m'étais jetée sur le bouquin. Roman associant l'onirique, l'autobiographique et la fiction, il me permettait de m'évader pendant quelques heures.



L'histoire est la suivante : François Seurel, le narrateur, jeune élève timide de 15 ans, est le fils de l'instituteur. Il mène une existence paisible avec ses parents, dans les bâtiments de l'école lorsqu'un nouvel élève arrive, Augustin Meaulnes. Pensionnaire, il partagera la chambre de François. Cette rencontre va être un tournant dans la vie du calme François. Quelques jours avant noël, Augustin s'offre une escapade hors du lycée. Il découvre un endroit mystérieux, un château abandonné dans lequel se déroule une fête. Il y fait la connaissance d'Yvonne de Galais dont il tombe amoureux et de son frère, Frantz. La fête est donnée pour les noces de ce dernier. Malheureusement, la future promise ne viendra jamais. De retour à la pension, le grand Meaulnes n'a qu'une envie : retourner au château. Il y va en compagnie de François. Mais, chose bizarre, il ne le retrouve pas. Je n'irai pas plus loin, il faut absolument lire ce livre.



Je parlais d'autobiographie... Il s'avère que les trois personnages principaux, François, Augustin et Frantz feraient référence, d'après ce que j'ai pu lire dans quelques études de ce roman, à l'auteur lui-même, à différentes époques.



Souvent lu à l'adolescence, ce roman ne laisse pas indifférent : on aime ou on déteste. Ce voyage initiatique a envoûté bon nombre de lecteurs. Il a marqué des générations et on y fait référence, que ce soit en littérature, au cinéma ou dans la musique.


Lien : http://www.lydiabonnaventure..
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Le grand Meaulnes

« Mais un homme qui a fait une fois un bond dans le Paradis, comment pourrait-il s'accommoder ensuite de la vie de tout le monde ? »

Le « Grand Meaulnes » ! C'est un roman sur la jeunesse finie et le bonheur manqué, sur les grandes défaites et la fin des illusions.

C'est Augustin, avec son regard exalté, et sa recherche tâtonnante, vaine de l'absolu qui ne s'embarrasse guère des petitesses et des mesquineries de la grisaille du quotidien. C'est l'éternel adolescent qui, le nez dans les étoiles, enjambe les aventures.

C'est l'absolu et indéfectible fidélité de Julien et le respect de la parole donnée.

C'est la grande débâcle de Frantz, et le douloureux sacrifice d'Yvonne…

C'est la fête au domaine perdu vécu comme un rêve, comme une entrée furtive dans le paradis.

J'ai lu une première fois ce livre à quinze ans, les yeux fiévreux et le coeur froissé.

Au risque de briser une idole, d'abîmer un moment précieux, intime de mon existence, j'ai choisi, inquiet, de le relire après tant et tant d'années, après toutes mes longues traversées par temps clairs ou par temps orageux.

Mes amis ! J'ai connu les mêmes gonflements de coeur. La magie est toujours là ! Lumineuse et Intacte.

Oui ! le chemin qui mène au domaine sans nom est toujours à découvrir.

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Le grand Meaulnes

La diversité humaine est décidément sans limite (ou presque). Récemment, dans une librairie de Bordeaux, une libraire anonyme a écrit à propos de Moderato cantabile de Marguerite Duras, je cite : « Un livre d'une grande beauté et d'une intensité rare, offert à demi-mots dans la langue si particulière de Duras : un chef d'oeuvre. » Si j'avais eu, moi, à écrire quelque chose à son propos, j'aurais écrit : « Purge absolue, vide intersidéral. Économisez votre temps et votre argent, passez votre chemin, choisissez-en un autre. »



Et en effet, une fois encore avec ce livre, je constate que les goûts humains peuvent être diamétralement opposés. le grand Meaulnes, fait partie des romans favoris — pour ne pas dire LE roman favori — d'un nombre incalculable de francophones. (Notons toutefois que ce titre est rarement cité — voire jamais — dans les listes étrangères dédiées aux meilleurs romans de langue française. À questionner, c'est juste un constat que je fais, je n'ai pas d'explication précise à cela.)



Eh bien en ce qui me concerne, le grand Meaulnes et moi, c'est l'histoire d'une rencontre qui ne s'est pas faite, du moins, pas bien faite. Cocasse, non, au vu de son sujet ? Laissez-moi, si vous le permettez, vous raconter dans quelles conditions cette non-rencontre s'est effectuée.



J'étais en classe de 4ème, époque où, poussée probablement par mes jeunes hormones, j'étais plus rebelles encore qu'à l'ordinaire, réfractaire comme jamais à l'autorité, fût-elle légitime. Bon, bref, ma professeure de français nous proposa, comme lecture imposée : le grand Meaulnes.



Un livre, qui, vous vous en doutez, ne fut pas lu par moi, non par manque d'intérêt pour la lecture, mais bien précisément parce que cette lecture était IMPOSÉE ! J'ai donc ouï parler de cette oeuvre en cours, entendu mes camarades d'alors s'exprimer à son sujet, mais l'ensemble restait pour moi assez nébuleux.



Puis les années passèrent, je lus de plus en plus de littérature, m'aperçus que bon nombre des lecteurs que je côtoyais appréciaient grandement cette oeuvre , finis par me dire que ce titre figurerait dans mes projets de lecture à un moment ou à un autre, et puis...



... et puis beaucoup d'années ont passé avant que je ne m'y attèle. Peut-être trop d'années, je ne sais. Toujours est-il que voilà peu, j'entamai cette lecture, convaincue qu'elle me séduirait, et j'en ressors, convaincue du contraire.



J'ai tout trouvé maladroit, factice, peu crédible et, finalement, de peu d'intérêt à mes yeux. Comment ce qui plaît tant à d'autres peut-il me plaire aussi peu ? Là, mystère. En tout cas, ce que je puis faire, au titre du partage communautaire, c'est d'égrener ce qui, pour moi, n'a pas fonctionné dans l'ouvrage.



En premier lieu, l'écriture en elle-même, notamment les dialogues que je trouve assez mauvais dans l'ensemble, et la mécanique narrative, pas beaucoup plus réussie. Vous voulez un exemple ? Voici un exemple : il s'agit d'un moment crucial du roman, celui où un fiancé effondré, Frantz de Galais, qui a tout préparé en grande pompe pour ses noces s'aperçoit que sa fiancée l'a planté et qui s'adresse à un inconnu, Meaulnes en l'occurrence :



« Eh bien, voilà : c'est fini ; la fête est finie. Vous pouvez descendre le leur dire. Je suis rentré tout seul. Ma fiancée ne viendra pas. Par scrupule, par crainte, par manque de foi... d'ailleurs, monsieur, je vais vous expliquer... »



Donc, voilà un gars passionné, raide dingue de la jeune femme qu'il comptait épouser, qui vient de le plaquer le jour même des noces, il en est comme fou, prêt à se tirer une balle, et il parle comme ça à quelqu'un qu'il n'a jamais vu, ajoutant même « je vais vous expliquer ». Non mais franchement, vous y croyez, vous ?



Je me permets encore de livrer la partie dialoguée d'un passage lui aussi crucial, qui a eu lieu juste avant, lors de la rencontre de Meaulnes avec Yvonne de Galais. Je coupe les parties narratives et ne conserve que les dialogues :



« Voulez-vous me pardonner ?

— Je vous pardonne, dit-elle gravement. Mais il faut que je rejoigne les enfants, puisqu'ils sont les maîtres aujourd'hui. Adieu. […] Je ne sais même pas qui vous êtes, dit-elle enfin. […]

— Je ne sais pas non plus votre nom, répondit Meaulnes. […]

— Voici la " maison de Frantz ", dit la jeune fille ; il faut que je vous quitte… […] Mon nom ?… Je suis mademoiselle Yvonne de Galais… […]

— le nom que je vous donnais était plus beau, dit-il.

— Comment ? Quel était ce nom ? fit-elle, toujours avec la même gravité. […]

— Mon nom à moi est Augustin Meaulnes, continua-t-il, et je suis étudiant.

— Oh ! vous étudiez ? dit-elle. […] À quoi bon ? À quoi bon ? répondait-elle doucement aux projets que faisait Meaulnes. […] Je vous attendrais, répondit-elle simplement. […] Nous sommes deux enfants ; nous avons fait une folie. Il ne faut pas que nous montions cette fois dans le même bateau. Adieu, ne me suivez pas. »



On se rend compte, à l'examen d'une telle densité, qu'effectivement, les dialogues, ça dépote dans ce roman ! Quelle nullité, franchement ! On croirait lire du Harlequin, et encore ! La mécanique de l'asticotage de début de roman, « … est à jamais, dans ma mémoire, agité, transformé par la présence de celui qui bouleversa toute notre adolescence et dont la fuite même ne nous a pas laissé de repos. » « Et c'est là que tout commença, environ huit jours avant Noël » « Et j'y ai souvent repensé depuis. » pour nous faire accroire au sensationnel, à l'exceptionnel, à l'inoubliable me semble de la même facture : maladroite et surtout, vaine.



Voilà pour la forme. Qu'en est-il du fond ? Un gars arrive en pension à la campagne, dans un bled bien paumé, au plein coeur de la France, fin XIXe. le gars, à qui l'on n'a rien demandé, se plante de chemin pour aller chercher les viocs à Noël ; il tombe par hasard sur une fête de noces, qui finalement n'a pas lieu, mais y rencontre une nana quelques minutes, à laquelle il tient le genre de discours que j'ai rapporté plus haut. Il revient à l'école — il ne s'est rien passé avec ladite nana —, mais il y repense pendant des mois et s'ingénie comme Sherlock Holmes à retrouver la route sur un atlas. L'Atlantide à côté, ça paraît facile à retrouver, manifestement.



Le frère de la nana — celui qui voulait se marier et qui s'est pris un râteau — retourne quelque temps à l'école — ça déjà c'est pas mal, mais précisément à l'école de Meaulnes —, qui, nous dit-on, n'est pas tout près. Et il y retourne comment de surcroît ? Déguisé en bohémien, justement pour rencontrer Meaulnes — qu'il ne connaissait pas et qu'il n'a vu qu'une fois, précisons. D'ailleurs, ledit Meaulnes ne le reconnaît pas (ou du moins seulement bien plus tard). Et alors, comme on se doute, avec de tels atomes crochus entre ces deux-là, se noue un lien indéfectible. Rien de moins.



Et puis, vers 18 ans, Meaulnes monte à Paris en pensant à la nana de quand il avait 15 ans — qu'il a vue une demi-heure —, la cherche nuit et jour pendant des mois, car, en trois ans, il n'en a pas vu d'autres, manifestement, et, à Paris, donc, là où il n'y a pas grand monde, comme chacun sait. Ce faisant, il tombe pile sur l'autre nana — celle du râteau — pendant que le narrateur lui non plus ne perd pas son temps, il va dans sa famille, laquelle famille connaît précisément le père de la nana, l'autre, celle d'une demi-heure. Pas mal, non ?



Alors le narrateur, resté magnétisé par Meaulnes qui l'a pourtant laissé tombé comme une vieille chaussette fumante, arrange immédiatement le coup entre Meaulnes et la demi-heure, qui, elle, de son côté, belle comme l'aurore, ne pense évidemment qu'à Meaulnes et n'a jamais eu d'autre prétendant. En cinq minutes chrono, les voilà mariés, ça tombe bien Meaulnes ne pensait qu'à elle depuis des lustres, ne rêvait qu'à cela, mais, mais, mais, à peine mariés, le soir ou le lendemain, le voilà qui se rebarre, juste pour aller retrouver la nana du râteau — qu'il a plus ou moins pelotée dans les coins quand il était à Paris —, car, soudain pris d'un sérieux cas de conscience, et d'une indéfectible fidélité pour le bohémien râtelé qu'il n'avait pas reconnu, il trouve à ce moment essentiel d'aller lui retrouver sa râteleuse…



Évidemment, après avoir couché une seule nuit, la demi-heure est enceinte jusqu'aux dents, meurt en couche, la totale, tandis que Meaulnes ne donne aucun signe de vie pendant des mois, mais, mais, mais revient tout de même au bercail pile quand la demi-heure vient de calancher…



Bon, bon, bon… sans oublier, bien sûr, que Meaulnes a eu le bon goût d'écrire dans un cahier d'écolier tout ce que le narrateur ne savait pas, afin qu'il puisse bien nous raconter l'histoire, après avoir récupéré le cahier, ce qui était LA chose à faire.



En effet, c'est très crédible tout ça, n'est-ce pas ? Ça m'a un peu rappelé Les Hauts de Hurle-vent, où tous les personnages meurent à heure fixe, pile au bon moment pour dynamiter l'histoire. On nous parle sans cesse du fameux grand Meaulnes, le narrateur s'évertue à nous le qualifier de personnage remarquable et intéressant, mais je me demande encore, moi, ce qu'il a d'effectivement remarquable et d'intéressant : je cherche, je cherche et ne trouve rien, fieffée dinde que je suis.



En somme, selon mes propres critères d'appréciation, un roman pauvre et convenu, artificiel à souhait, qui ne me laissera aucune trace bien palpable, si ce n'est celle d'un redoutable ennui. Peut-être aurais-je mieux fait de le lire plus jeune ? Sans doute, mais je me dis que si le texte avait eu à m'émouvoir, il m'aurait émue même à l'âge avancé auquel j'arrive. Donc, déception en ce qui me concerne. Mais aujourd'hui comme à chaque fois, ça n'est bien entendu que mon avis, c'est-à-dire, pas grand-cheaulzes.
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Le grand Meaulnes

Les récents commentaires de Blandine et Bernard m'ont incité à relire une fois encore « Le Grand Meaulnes » et à plonger dans la prose descriptive du début du XX siècle immortalisée par Alain Fournier ou Marcel Proust. Phrase après phrase, l'auteur peint une véritable toile impressionniste en montrant les paysages de la Sologne et les rives du Cher, et fait écho aux pages d'Anatole France dans « Les autels de la peur » ou à celles de René Bazin évoquant « Ma Tante Giron ». Pureté d'une langue que sa musicalité approche de la poésie, précision narrative des portraits et des paysages, chaque page est une merveille stylistique qui élève la pensée et mêne au rêve.



Cet ouvrage nous remémore la vie rurale d'avant la grande guerre, une campagne paisible ayant moins changé au cours des siècles que depuis lors. Une vie proche de la nature, ancrée dans ses solidarités de voisinage et les savoirs faire intemporels du forgeron ou du maréchal ferrant, une civilisation que façonne l'instituteur et qui rappelle les oeuvres d'un La Varende, et plus récemment « La tranchée de Calonne » où Michel Bernard enseigne que « les paysages sont nos royaumes ».



Relire l'odyssée d'Augustin Meaulnes est un bain de jouvence, une bouffée d'air pur et une promenade écologique mais c'est aussi un mémorial de notre langue française (avec ses conjugaisons, ses subtilités et ses nuances) qui place ce roman parmi les oeuvres marquantes de notre littérature.
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Le grand Meaulnes

Le Grand Meaulnes, publié en 1913, est considéré comme l’une des dix œuvres majeures de la littérature du XXe siècle. Son auteur Alain-Fournier, mobilisé et mort au champ d'honneur en 1914, n’aura jamais l’occasion d’écrire un autre livre.

Difficile de s’attaquer à un monument pareil pour en faire la critique. Je me suis néanmoins attelé à cette tâche des plus risquées, pour tenir mes engagements dans le cadre de la dernière opération « masse critique jeunesse » de Babelio.

Quelques pages seulement suffisent pour prendre conscience de l’évolution du vocabulaire et du langage courant en un peu plus d’un siècle. Quoi de plus banal en effet dans la conversation que les mots désignant… les vêtements ? Or, ils sont dans ce roman si nombreux, si variés et si délicieusement surannés que ces simples mots de tous les jours finissent par évoquer une reconstitution historique à grand spectacle, en compétition dans la catégorie « meilleurs costumes » : gilet, capote, vareuse, paletot, pèlerine, veston, jaquette… et j’en oublie sûrement. Ces mots usuels pourraient être de nos jours transposés en : smoking, pull, tee-shirt, sweat-shirt, body, top… pour correspondre à une histoire plus actuelle, et c’est ainsi que l’on mesure, à la lecture de ce roman, la montée inéluctable d’une sémantique vestimentaire mondialisée et du leadership, pardon, de l’hégémonie anglo-saxonne.

Mais les costumes ne sont pas les seuls éléments surannés du récit ; car, et c‘est peut-être plus gênant, les mentalités des protagonistes, également, fleurent bon la naphtaline.

Nous sommes dans une littérature classée « jeunesse », estampillée « lectures de toujours ». Les personnages de ce roman sont-ils encore des modèles pour un ado d’aujourd’hui ? Un jeune lecteur, une jeune lectrice, peuvent-ils encore s’identifier à ces héros de 189- et s’approprier facilement leurs valeurs ? Une petite revue de détail s’impose.

En premier lieu, François Seurel, le narrateur, narre, mais ne s’investit dans aucune action particulière pour son propre compte, excepté la réussite de son entrée à l’école normale pour instituteurs. Il reste le faire-valoir absolu de son ami que tout le monde semble adorer, craindre ou respecter : Augustin, dit « le Grand Meaulnes ». François se met intégralement au service des causes d’Augustin : sa quête, ses passions, ses aventures, ses illusions et ses espoirs… il en fait automatiquement les siens. Toujours disponible pour son ami et prêt à se substituer à lui, François, dans l’ombre d’Augustin, vit par procuration.

Jusqu’au bout, François épouse la cause de, et en attendant un hypothétique retour du Grand Meaulnes, va même jusqu’à habiter chez, élever la fille de, enfiler les chaussons de, utiliser le rond de serviette de (celui avec son nom marqué dessus).

Le Grand Meaulnes, parlons-en. Voici un type qui a tout pour lui, le charme, l’intelligence, le mystère, la persévérance, l’humour (non, pas l’humour, je raye)… mais qui fait le choix de jouer sa vie sur un pari. Il s’amourache d’une jeune femme rencontrée pendant dix minutes au cours d’une fête et décide de passer toute son existence à la rechercher pour la revoir. Problème, il ne se souvient plus de l’endroit où elle habite, et à l’époque, on ne s’échangeait pas encore les numéros de portable. Il ne ménage pas sa peine pour tenter de la retrouver et, sur un simple témoignage, il se rendra même à Paris (autant dire sur la planète Mars pour les provinciaux de l’époque) dans l’espoir de la revoir, mais sans succès. Et lorsque des années plus tard, il croisera à nouveau son chemin, il prendra aussitôt la fuite pour honorer un autre engagement stupide, concernant cette fois le frère de la jeune femme (après toutefois s’être marié avec elle et après l’avoir mise enceinte, comme on l’apprendra par la suite). Augustin ne peut vivre que dans la quête perpétuelle d’un objectif inaccessible, d’un amour impossible, et lorsque par un miraculeux hasard, mais surtout grâce aux manœuvres de son ami François, l’objet de sa convoitise est enfin à sa portée, il ne peut que s’en désintéresser aussitôt pour en choisir un autre.

Augustin, perpétuel insatisfait, ne peut que fuir, s’échapper, sécher les cours, aller accueillir les grands-parents de François à la gare de Vierzon alors que personne ne lui a rien demandé, courir à la recherche de sa dulcinée puis du frère de celle-ci à travers le monde, à travers les sentiers battus et les chemins vicinaux, par monts et par vaux, toujours plus loin, toujours plus haut, toujours plus fort ! Ah, non… on me dit dans mon oreillette que cette phrase est plutôt destinée à Fort Boyard, au temps pour moi !

Augustin ne retrouvera jamais par lui-même le chemin du domaine mystérieux situé pourtant dans le village d’à côté. Pour lui, tout a commencé par une nuit sombre, le long d'une route solitaire de campagne, alors qu'il cherchait un raccourci que jamais il ne trouva. Depuis qu’il a assisté à cette fête, Augustin sait qu’ils sont là, qu'ils ont pris forme humaine et qu'il lui faut convaincre un monde incrédule que le cauchemar a déjà commencé. Ils sont là, ils sont parmi nous, ce sont… les envahisseurs… Tinlinlin – Tinlinlin – Tinlinlin… Les ENVAHISSEURS !

Ah, non… on me dit dans mon oreillette que c’était plutôt David Vincent. Bon, mais pour le Grand Meaulnes, les filles sont comme des extraterrestres. Elles sont bizarres, elles possèdent d’étranges pouvoirs, elles disparaissent… Et il ne veut pas se l’avouer mais… elles lui font peur !

Yvonne de Galais est la jeune femme « aux traits dessinés avec une finesse presque douloureuse » qui attendra longtemps son prince charmant. Distante et mystérieuse lors de sa première apparition, on comprend lorsqu’elle réapparaîtra bien plus tard qu’elle a vécu dans l’admiration de son frère (qui lui aussi va prendre la fuite, décidément), qu’elle s’occupe de son père (dont la fortune n’est plus ce qu’elle était) ou de son cheval (vieillissant, lui aussi) en attendant un potentiel fiancé (mais le Grand Meaulnes peine vraiment à la retrouver, on finit par douter qu’il y mette vraiment de la bonne volonté) ou à défaut un fidèle confident (qu’elle trouvera en a personne de François, dont la loyauté à toute épreuve envers son ami Augustin interdit de profiter de la situation). Attention, Spoiler : si vous n’avez pas encore lu Le grand Meaulnes, veuillez vous rendre au paragraphe suivant sans démasquer ce qui suit. .

Yvonne de Galais n’a en fait rien de la modernité d’une Lara Croft (OK, fantasme masculin, je raye), d’une Élisabeth Bennet (là c’est mieux), et pas même, malgré sa propriété rurale et son cheval, d’une Martine à la ferme, c’est dire. A la fin XIXème siècle, je ne me souviens plus si les femmes disposaient déjà d'une âme et de la liberté de penser (un Concile de Mâcon a bien dû se pencher sur la question à un moment donné), mais je suis bien certain en revanche qu’elles n’avaient pas encore obtenu le droit de vote. Yvonne de Galais, décédée en 189- n’aura eu que peu de revendications au cours de sa trop brève existence, et le seul fait marquant de sa vie sera sa mort.

Frantz de Galais, le fils de bonne famille, le frère irresponsable, rate son mariage, foire la fête donnée en son honneur, pousse ses proches au chagrin, contraint Augustin Meaulnes à l’errance, devient un bohémien et un pathétique voleur de poules. Dans les deux sens du terme, puisqu’il renoue avec son ancienne fiancée, ramenée sur un plateau par le Grand Meaulnes qui avait eu en son temps des vues sur cette aimable personne, dont il ignorait l’identité, après avoir abandonné tout espoir de revoir un jour Yvonne de Galais. Frantz est le mauvais fils, le mauvais frère, le mauvais fiancé, le mauvais ami, mais il bénéficie d’un charme aussi ravageur que celui de sa sœur (on ne s’en méfie donc pas assez), et il est celui par qui tous les malheurs arrivent. Comme on le voit, il n’y a là aucun risque de traumatisme, le personnage le plus trash du roman reste très en deçà de certains chenapans de nos publications actuelles, tels Arsène Lupin, Fripounet ou Fantômette.

Les lecteurs modernes, catégorie dont j’espère faire partie, une fois passé et accepté l’ennui des premiers chapitres dû à l’absence d’action, finiront par entrer progressivement dans l’histoire et prendront plaisir à lire cette œuvre, pour son charme suranné, sa réelle qualité d’écriture (le roman est passé à quelques voix du prix Goncourt en 1913), pour le témoignage sans fard et tranquille – nous ne sommes pas chez Zola – de la vie rurale et bourgeoise au tournant du siècle, pour son évocation d’une époque à jamais révolue et que certains regretterons (mais sans doute pas nos ados, fans d’Harry Potter et d’Hunger Games).

L’édition sortie chez Gründ en avril 2013 à l’occasion du centenaire est un bel objet qui bénéficie d’une fabrication soignée, rehaussée de nombreuses illustrations en couleur, au charme désuet mais bien approprié au contexte, que l’on doit au talent incontestable de Dorothée Duntze.

Enfin, on se remémorera sûrement à la lecture de ce livre le regard lumineux de Brigitte Fossey (pour les lecteurs les moins jeunes et néanmoins cinéphiles) ou de Clémence Poésy (pour les lecteurs les plus jeunes et tout aussi cinéphiles) qui ont interprété toutes les deux et avec brio, respectivement en 1967 et en 2006, le rôle éthéré de la belle Yvonne de Galais.

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Le grand Meaulnes

Un très beau roman (autobiographique ?!) sur la quête du bonheur de Meaulnes qui ne peut qu’en donner aux autres (c’est déjà pas mal). Un peu comme un chevalier, il part à l’aventure à travers de multiples labyrinthes, cartes, etc. ; quête finalement un peu chimérique. Le monde y est merveilleux, car c’est le monde de la jeunesse, peuplé d’étranges fêtes et de mystères, très poétique, énigmatique.

Le texte est entièrement écrit en focalisation interne sur François Seurel qui découvre le récit et l’écriture. La sensibilité c’est encore la sienne et celle des principaux protagonistes, tous un peu poètes, par opposition à celle de Ganache et de tant d’autres qui ne comprennent, dans la médiocrité ambiante, pas grand-chose à leur monde.
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Le grand Meaulnes

Plus qu'un livre , une histoire qui vous colle , qui vous prend aux tripes , une histoire qu'on veut vous présenter en classe alors que vous l'avez déjà découverte , comme ça , en passant , parce que des copains vous ont conseillé , ont insisté , vous ont séduit .Oui , Alain Fournier n'a écrit qu'un seul roman avant de disparaître tragiquement lors de la première guerre mondiale. Mais voilà , il arrive que l'histoire ne " bafouille " hélas pas ,soit dramatique et magnifique en même temps . J'ai retrouvé l'endroit où il a été tué, j'ai écouté avec attention sa nièce parler de lui et de sa disparition lors d'une conférence et j'avoue avoir été terriblement ému . Un homme . Un roman sublime , un roman plein de vie ,un chef d'oeuvre qui traverse les époques . Je l'ai lu il y a bien longtemps . Il est en moi .Il m'envahit , il m'obsède, fait partie de ma culture , un livre fondateur .... C'est un souvenir de jeunesse et quand on parle de sa jeunesse, on perd sa lucidité, son objectivité pour tomber dans un moment de grâce , oui , c'est ça , ce roman , c'est un moment de grâce..".Ô temps , suspends ton vol , et vous heures propices...."

Vous avez là un chef d'oeuvre mais les amis babeliotes sont des puristes..Inutile d'en dire plus .Devant la belle stèle réservée à cet auteur incroyable , j'ai été pris de frissons , d'angoisse , une vraie émotion , sincère , indescriptible et je me suis soufflé ces mots " la guerre , mais pourquoi la guerre ?" et j'ai vite quitté ces lieux empreints d'une profonde tristesse.

Si vous avez une réponse, merci . En attendant, lisez ce roman ,ce sera un bel hommage a un talent , fauché par la folie des hommes ,un roman , pfff , un roman quoi ....un vrai , un beau ,un ...SUBLIME....
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Le grand Meaulnes

A mes instituteurs et institutrices :

Si j'ai repensé avec vous avec bonheur ou nostalgie, je ne vous ai jamais autant béni qu'en retrouvant dans le grand Meaulnes des textes écrits sous votre dictée. On voit bien pourquoi vous aviez une tendresse particulière pour ce livre, et retrouver ces phrases a ajouté à mon émerveillement lors de la première lecture de l'œuvre.



Au professeur qui plus tard m'a donné un extrait du silence de la mer à traduire en anglais, un compliment opposé, mais cordial.
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Le grand Meaulnes

Un roman lu au même âge que les héros puis relu beaucoup plus tard mais toujours avec le sentiment d'envoutement ressenti à la 1ère lecture.

Les thêmes de l'enfance et du merveilleux, l'amour idéalisé et les serments adolescents sont traités de telles manière qu'on pénêtre corps et âme dans le monde du grand Meaulnes: on ressent le froid, l'odeur de l'école, le calme et les chuchotements des secrets.

J’ai préféré pour ma part la première partie qui se passe à l’école au village de Sainte-Agathe jusqu’au récit de la « fête étrange ».

La suite ne m'a pas semblé nécessaire et je crois que je l'ai même zappé !

Quant à ceux qui n'aiment pas ce roman je leur dis qu'ils ont peut-être un peu oublié la magie de l'adolescence ? Ce n'est pas Internet et ses rencontres virtuelles qui va quand même nous supprimer cette soif d'absolu, d'Amour avec un grand A qui est la raison d'être de ce merveilleux roman et de son auteur, Alain Fournier .

A 19 ans en apercevant une belle inconnue sur les trottoirs parisiens Alain-Fournier souffrira toute sa vie de n’avoir pas pu la décider à vivre à ses côtés. Ce passage de sa vie, mêlé à des souvenirs d’enfance en Sologne lui fournira le thème du « grand Meaulnes » qu’il écrira à 27 ans, un an avant de mourir sous les balles allemandes de la Grande guerre.



« Mon credo, en art et en littérature : l’enfance. Arriver à la rendre sans aucune puérilité, avec sa profondeur qui touche les mystères ».

Alain Fournier

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Le grand Meaulnes

Choisi dans ma bibliothèque avec pour seule motivation "Tiens ! Pourquoi pas", je n'attendais rien de particulier de ce livre que j'aurais sans doute lu au lycée si j'étais allée jusque-là.



Bien écrit, c'est indubitable. Pas de descriptions interminables qui rendraient la lecture pesante. Un peu trop romantico-torturé pour mon goût. Il ne me laissera pas un souvenir impérissable mais sa lecture ne fût pas un supplice non plus.



Bénéfice de l'affaire : Cinquante années après l'âge requis, j'ai enfin lu le Grand Meaulnes. Lacune comblée.
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Le grand Meaulnes

Voilà un livre un peu spécial. A la fois inclassable et valable à plusieurs classements littéraires. On le considère comme un roman d'apprentissage, un roman d’aventures ou un roman pour adolescents mais aussi comme étant un exemple parfait du roman poétique. Certains l'ont même mis dans la catégorie des romans régionalistes. Tout cela est juste en quelques sortes.



Le Grand Meaulnes est une reconstitution romantique presque onirique de la vie, rehaussée d'un style poétique. Une œuvre d'une simplicité étrange comme la fameuse fête décrite qui était un évènement déclencheur de cette histoire après l'arrivée de Meaulnes. Une fête où le rêve et la réalité se trouvent mêlés. Alain-Fournier a mis beaucoup de lui-même dans son roman. Il a honoré sa région à travers des descriptions pittoresques, il a présenté un côté rêveur et romanesque à travers Meaulnes, il a recréé sa bien-aimée et a donné libre cours à son âme aventurière ; tout cela face au réalisme de son narrateur.



Alain-Fournier, qui est l’auteur aussi d’une vaste correspondance, nous livre un très bel ouvrage sur l’amitié. Des promesses amicales entre adolescents tenues pour sacrées et respectées avec empressement et dévouement. Ainsi le grand Meaulnes, le narrateur et Frantz se trouvent mêlés à des peines d’adolescents d’abord ; fugue, fuite, déception d’amour et recherche de la bien-aimée. Mais se trouvent, à la longue, devant de véritables problèmes d’adultes ! Seul le narrateur a été à la hauteur. Par contre le grand Meaulnes ne sera jamais grand ! il suivra sa promesse d’ami en dépit de ses obligations plus fortes d’époux. Sa passion pour l’aventure et la liberté effleure la lâcheté et l’immaturité.

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Le grand Meaulnes

Chef d'oeuvre !

Voilà un Classique qui mérite son titre !

Je suis définitivement conquis par ce pauvre Alain-Fournier qui est parti trop tôt !

Il y a tous les ingrédients de la qualité :



1 ) une écriture remarquable, pleine de sensibilité ;

2 ) Des personnages hauts en couleurs, certains proches de nous, et d'autres hautement fantasques, imprévisibles et hyper sensibles ;

3 ) de l'action ;

4 ) des questionnements ;

5 ) des rebondissements ;

6 ) une atmosphère qui balance entre le rêve, le conte de fées et ... la guerre des boutons !

7 ) des paysages sylvestres comme je les aime, et remarquablement peints ;

8 ) enfin, une région que j'aime : la Sologne, dont je pense avoir reconnu certains bourgs, malgré leurs noms déguisés.

Voilà !

.

Bon, maintenant, après toutes ces éloges, le cadre :

1890, Sainte Agathe ( qui pourrait se situer entre La Ferté-Saint-Aubin, et Lamotte-Beuvron, en plein centre de la forêt solognote ) ; François Seurel, le narrateur, a 15 ans ; il prépare son brevet dans la petite école que dirige son père. Un jour, arrive avec sa mère un grand de 17 ans qui s'inscrit dans le même cours : c'est Augustin Meaulnes ; son attitude mystérieuse attire certains comme François, en rebute d'autre comme Jasmin Delouche qui se sent détrôné de sa place de chef !

Après quelques mois, voulant rendre service, il part sans rien dire, emprunter une cariole pour récupérer les grand-parents de François au train de Vierzon, mais il se perd en route, et le destin le met sur le chemin d'un magnifique manoir abandonné des adultes, où des enfants déguisés font la loi ; il y rencontre Yvonne de Galais qui hante ses pensées, même après son retour...

Reconduit à Sainte-Agathe, il n'est plus le même, il est obsédé par le chemin qui conduit au manoir, chemin qu'il n'arrive pas à retrouver !

....

Il y a, en Sologne, des propriétés comme cela, cachées par la forêt, indiquées de la route par une simple entrée ; si l'on suit le chemin, on découvre ... un paradis ! Actuellement, Bouygues et d'autres ont ce genre de domaines.

Pendant un temps, j'ai été transporté ailleurs, dans un autre temps, et dans un autre lieu !
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Le grand Meaulnes

Le Grand Meaulnes nous entraine dans une aventure merveilleuse. Un labyrinthe de chemins, de sentiers, de champs, avec le froid, le brouillard, la peur, et la nuit pour compagnons. … Un Domaine sans nom, une fête étrange où les enfants font la loi, la présence d'une belle jeune fille céleste, toute frémissante, un jeune homme désespéré, une fiancée égarée. On pense être dans un conte fantastique. Ce Domaine perdu, ce pays utopique, parfois silencieux, parfois empli de rires d'enfants, agité de danses et de jeux, semble tout droit sorti du rêve du grand Meaulnes.



La suite du roman nous dévoile petit à petit les pièces de ce puzzle. Au fantastique se mêlent la réalité et le suspense. Le merveilleux de l'enfance qui reste collé à la réalité d'un adolescent, à l'aube de l'âge adulte. Un secret partagé avec un ami. Un personnage qui vient tout bouleverser, comme une boule lancée dans un jeu de quilles. Et une jeune fille qui attend d'être retrouvée.



Les fils de l'histoire s'entrecroisent ; un adolescent qui cherche son chemin, qui cherche des traces du passé, trébuche dans les ornières formées par le passage d'un autre, désespère d'arriver au bout de sa route.



Puis, lorsque le bonheur se présente à lui, il prend peur, il s'enfuit. Il est terrorisé comme un enfant qui ne veut pas quitter son monde à lui. Il traîne ses rêves derrière lui mais n'ose-leur donner forme, de peur que la magie s'échappe, qu'ils deviennent insipides, décolorés, qu'ils ne se fracassent sur le roc de la réalité.



Une aventure belle et tragique.

Tragique car elle a nécessité des sacrifices, parce que les remords hantent l'adolescent et l'empêchent de saisir l'instant présent. Pourtant, le grand Meaulnes continue l'aventure, il s'est comporté comme un lâche, ne demandant pas son chemin, brouillant les pistes, comme s'il se moquait des conséquences. Trop d'orgueil, trop d'insatisfaction, une aventure manquée, il préfère s'en aller en laissant à d'autres le soin de recoller les morceaux.



Belle parce qu'elle est magique, mystérieuse et poétique. Un roman d'aventures, de découvertes et d'amitié. Un roman philosophique sur le monde de l'adolescence. Un bel imaginaire qui déforme la réalité, la rend plus belle et plus acceptable. L'imaginaire est le refuge, le pays d'aventures du grand Meaulnes, le seul endroit où il se sente bien.



J'ai beaucoup aimé ce voyage dans le monde du passé et de l'enfance, un lieu qui ne veut pas céder sa place à la fade réalité, qui veut laisser l'empreinte de la magie, les couleurs de l'imaginaire.







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Le grand Meaulnes

Si la guerre de 14 n'avait pas fauché la jeune vie d'Alain Fournier, quelles oeuvres magnifiques aurait-il sans doute produites! Il nous a laissé ce chef d'oeuvre dont l'intemporalité ne supporte même pas une tentative cinématographique qui ne peut en restituer tout le mystère magique qui le porte à travers les décennies. L'arrivée dans la classe de Meaulnes, au début du livre, est un moment d'exception, pourtant si simple, des milliers de fois reproduit dans toutes les écoles du monde. En lisant ce passage, on perçoit la chaleur du poêle de fonte et l'on distingue les arabesques du givre sur les carreaux des fenêtres. Ensuite, le mystère se met en place, les sentiments, l'amitié, l'amour, l'ensemble pour porter une oeuvre dont la poésie discrète la sublime et donne un bonheur total au lecteur.
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Le grand Meaulnes

Ça commence comme un simple récit d'enfance, avec des accents de fraîcheur et de candeur touchants, ça se poursuit dans une atmosphère mystérieuse et romantique à souhait, ça s'achève dans le drame et une sensualité tout en pudeur. Ça donne un roman majeur.



De grands et beaux thèmes sont développés par Alain-Fournier dans un style simple et poétique : l'enfance, l'amitié, l'amour, la fraternité, l'honneur. Dans un décor campagnard qui n'est pas sans rappeler certains écrits de George Sand, on se prend facilement d'affection pour les personnages, croqués avec justesse dans leur rôle et dans leur environnement tel que l'école, le village, la maison de maître, etc.



On assiste avec émerveillement à la fête fantasmagorique au Domaine Mystérieux, charnière du roman, où se noue la trame sentimentale qui fera basculer Augustin Meaulnes de l'adolescence à la maturité adulte.



La narration est confiée à François Seurel, ami et confident du "Grand Meaulnes" et pour moi, ce fut comme lire Proust sans ennui tant la description qu'il donne des diverses péripéties ou émotions vécues et ressenties par les protagonistes est faite de sensibilité et d'acuité.



Un beau roman d'apprentissage ; on ne peut que regretter la mort prématurée de son auteur.





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Challenge des 50 Objets 2018 - 2019

Challenge MULTI-DÉFIS 2019

Challenge XXème siècle
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Le grand Meaulnes

C’est en voyant passer la critique de berni-29 que j’ai eu envie de le relire. Je pensais y trouver un style vieillot. Eh bien, dès le départ, l’histoire m’a embarquée. Épatée de voir une si belle prose pour un écrivain si jeune. Histoires d’amour en chassé-croisé d’adolescents dans le Berry d’avant-guerre et de quêtes, en autre, d’un domaine qui semble inconnu.
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Le grand Meaulnes

« Et il crut voir un autre Meaulnes ; non plus l'écolier qui s'était évadé dans une carriole de paysan, mais un être charmant et romanesque, au milieu d'un beau livre de prix... »



Mais c'est un conte Le grand Meaulnes ...? Une splendide découverte. J'ai adoré suivre les saisons, celle d'hiver avec son gel scintillant était magnifique. Le difficile passage de l'enfance à l'âge adulte, l'envie de faire durer l'adolescence le plus longtemps possible avec tout ses possibles, toutes ses rêveries et ses espérances qu'elle nourrit. Quel magnifique cadeau d'un frère à une sœur !
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Le grand Meaulnes

Je suis tellement émue par cette lecture que j'ai bien peur de ne pas avoir assez de recul pour analyser mon ressenti.



Est-ce les personnages qui m'ont touchée à ce point ? Sans nul doute. On ne peut que s'attacher à Augustin Meaulnes, ce grand gaillard aventureux, et à François, qui sait si bien prendre soin des autres. Tous les personnages de ce roman sont touchants de sincérité, même les plus farfelus ou les moins sympathiques.



Peut-être est-ce les lieux où se déroulent l'intrigue qui m'ont émue, ou l'atmosphère campagnarde de fin XIXème ? La Sologne et le Cher, que je connais bien, me touchent tout particulièrement, moi qui aime les forêts, les champs, les prairies. Et cette grande humanité, ce parler franc et bourru des paysans des années 1890 résonnent en moi.



Peut-être la plume d'Alain-Fournier y est-elle pour quelque chose ? Aucun doute. Son écriture fluide mais précise est très évocatrice et sait très bien faire naître les émotions de son lecteur. Pas un mot de trop, beaucoup de poésie dans la langue, et vous voilà emporté à Sainte-Agathe !



Est-ce les thèmes abordés qui m'ont retournée à ce point ? Les amours contrariés, l'amitié qui traverse le temps, l'enfance, le temps qui passe, nostalgie d'une adolescence révolue... Que d'aventures et de mystères à résoudre avant d'en arriver là ! Et quelques larmes versées aussi.



Ou peut-être ce lien qui s'est créé par le plus grand des hasards, grâce au Grand Meaulnes, entre moi-même et un vieux voisin décédé, M. Michel Algrain, tellement passionné par Alain-Fournier (je comprends mieux pourquoi) qu'il a consacré une partie de sa vie à retrouver ses restes * ?



Sans nul doute est-ce tout cela à la fois qui a fait de ma lecture un moment si magique.



Par ma modeste contribution, j'espère vous inciter, si ce n'est déjà fait, à lire absolument ce chef d'oeuvre français.

Et je remercie Chabe37 d'avoir été ma partenaire de lecture.



*https://www.lanouvellerepublique.fr/loisirs/alain-fournier-tombe-en-14-et-retrouve-77-ans-plus-tard
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