Oriane

Je me dépêche, quitte à finir essoufflée. Enfin, entre deux expirations bruyantes, je lance « quarante ! » et m’effondre au sol comme une loque.

— Eh, arrête d’embrasser le tapis ou ton fond de teint va partir plus vite que prévu !

Je me mets en tailleur, heureuse d’enfin plier mes jambes, tournée vers le beau mâle aux coudes collés aux genoux entre deux plis de bras. Je lui envoie un sourire narquois.

— Tu es jaloux du tapis, Victor ? Tu sais que ça peut s’arranger…

Il ricane, secoue la tête, mais garde le sourire quand il reporte son attention sur moi entre deux levées d’haltères.

— Toi, quand t’as une idée dans la caboche…

— … je ne l’ai pas ailleurs, je sais, on me le dit souvent. Quoique parfois, je l’ai entre mes cuisses, aussi.

— Sandraaaa… cesse de faire la perverse pendant que je tiens des trucs super lourds. T’es capable de balancer une connerie qui me ferait lâcher prise.

— Pourquoi as-tu dit « ton teint va partir plus vite que prévu » ? Je ne compte pas le retirer du tout !

Il m’adresse un nouveau sourire de beau gosse. Je vois une goutte glisser le long de sa joue et j’ai juste envie de la choper entre mes lèvres, mais je serre ma bouche indisciplinée. Même si je suis en lutte et que la voix soudainement suave de Victor me met à rude épreuve.

— Parce que je vais te faire suer par toutes les pores, feignasse.

À mon insu, il a avancé son doigt jusqu’à ma bouche et je ne me rends compte de la présence de son index levé que lorsque le contact se crée. Ça me fige sur place, parce qu’il ne me lâche pas des yeux et je me sens bien obligée de faire de même, pour garder la tête haute. Au sens propre comme au figuré. Son sourire s’enjôle et sa voix se voile avec audace et charisme. Merde, il sort l’artillerie non verbale, là ! Je suis soufflée. Putain de Monsieur Marketing, un vrai caméléon !

— J’ai déjà eu droit à deux agréables préambules, mais je ne voudrais pas nous inciter au dérapage pour que tu puisses jouer les coqs. Je n’ai pas besoin de preuves supplémentaires sur l’efficacité de tes tours de charme, Sandra…

J’empêche mes lèvres de s’ouvrir contre ses phalanges, décidée à ne pas lui indiquer mon frémissement.

Je n'ai pas envie de te découvrir en vitesse rapide. Dis-moi qu'on pourra se revoir. Que je ne reviendrai pas ici sans te toucher, Blue Carla.