Déjà nos enfants meurent. Ils attrapent toutes les maladies de l'homme blanc. Celui-ci brûle nos forêts et ravage nos espaces sauvages, il faut arrêter de détruire la selva, sinon les vents vont se lever et souffler très fort. Le soleil va devenir trop chaud, il n'y aura plus d'arbres pour donner de l'ombre. Les Blancs vont mourir eux aussi,à leur tour, après les Indiens, mais tous ensemble, nous pouvons nous sauver en nous respectant et en protégeant nos terres.
Après ma mort, j’aimerais que les Indiens vivent tranquilles dans la forêt, qu'ils puissent chasser, pêcher et aussi chanter au village. C'est cela la vie des Kayapos.
Les Kuben sont fous...Ils travaillent toute l'année pour pouvoir vivre trois semaines comme nous vivons tous les jours, à pêcher et chasser, à jouer avec les enfants dans la rivière, à se reposer avec nos femmes dans un hamac aux heures chaudes, à faire la fête, danser et chanter. Les blancs ne savent pas vivre !
En route vers la maison du Président, nous traversons une belle rivière. Comme je ne connais encore rien à la France, je demande à Kritako :
" ce rio sépare-t-il deux tribus différentes ?
- Non, c'est le rio Seine et il appartient à la tribu des Français. "
Je sais beaucoup de choses maintenant, mais je refuse d'apprendre à lire et à écrire, je préfère rester indien et garder en moi notre culture, pure et intacte.
J'aime courir dans la foret, nu, libre et sauvage avec comme seule arme ma borduna.
Les ancêtres du chef de l'Église ont décidé que nous n'avions pas d'esprit, pas d'âme, comme disaient les missionnaires ; pour cette raison, nous pouvions être mis en esclavage, vendus ou achetés comme des animaux. Je n'ai jamais laissé rentrer les missionnaires sur nos terres car, tôt ou tard, même s'ils nous veulent du bien, ils détruisent notre culture et changent nos croyances.
Comme nous, les autres chasseurs sont entièrement nus, avec juste la feuille de babacu serrée autour du pénis pour le protéger des éraflures durant les courses dans la jungle. Comme nous, également, ils portent le labret de balsa, inséré dans la lèvre inférieure. Le plateau est peint en rouge sang avec la teinture de l'urucum (une baie sauvage).
À cette époque, je commence à agir d'une autre manière que les autres Indiens. Je veux arrêter ces guerres absurdes entre nous. Mes compagnons sont impressionnés. Je gagne leur respect : "D'accord, Raoni, nous allons juste pêcher et manger du poisson ; pas de combat. " Je commence à assumer mon rôle de chef.
Je n'avais aucune notion de l'argent en entamant mon tour du monde. En regardant les billets, je m'intéresse plus aux dessins gravés qu'au nombre de zéro. Partout où je vais, j'explique aux personnes que je rencontre : " Si vous venez dans mon village, vous n'aurez pas besoin d'argent. Chez nous, cela n'existe pas. vous mangerez du poisson grillé et vous ne paierez pas. Rien. Vous vous baignerez dans la rivière et ce sera gratuit. Chez vous, on paie toujours pour tout et pour rien. À l'hôtel, au restaurant, il faut toujours payer... même aux toilettes ! "