L’œil de la sagesse s’est ouvert, parce qu’il a fait l’expérience du rôle de la sensation et de la réaction qu’elle engendre. C’est dans la sensation que se trouve la racine de la souffrance, et si vous ne vous attaquez pas à sa racine, vous ne pourrez pas en venir à bout. C’est cela que le Bouddha a mis en pratique et qu’il a enseigné : observez- vous vous-même, c’est-à-dire observez votre esprit et votre corps, au fur et à mesure que vous approfondissez votre observation, vous ne trouvez que des sensations, rien que des sensations, et vous remarquez qu’une partie de votre esprit continue à réagir : la partie de l’esprit nommée Viññāṇa ,conscience ne fait que connaître, la partie nommée sañña perception reconnaît et évalue, la partie nommée vedanā, sensation, ressent, mais la partie nommée saṅkhāra, réaction, réagit, ne cesse de réagir. Si la sensation est agréble, la réaction devient de l’avidité, si la sensation est désagréable, elle devient de l’aversion.
C’est cette habitude mentale qui doit être changée : c’est cela qu’à découvert le Bouddha.
Votre avidité ne naît que lorsque vous ressentez une sensation. Un objet vient en contact avec une de vos « portes sensorielles », telles que l’oreille ou l’œil ; immédiatement une sensation se produit. Et, quand une sensation se produit, la perception, cette partie de l’esprit qui identifie et juge ce qui est enregistré par la conscience, l’évalue : elle est agréable, elle est désagréable ; elle est très bonne ou très mauvaise, etc. Quand la perception dit « très bon », la sensation devient très agréable, et quand elle dit « très mauvais », la sensation devient très désagréable. Alors seulement vous commencez à régir : « J’aime ça, j’aime ça de plus en plus, de plus en plus », et vous désirez prolonger cette expérience ; ou « Je n’aime pas ça, je n’aime pas ça du tout », et vous désirez l’interrompre. A un niveau superficiel, vous avez l’impression que vous réagissez à un objet extérieur : quelqu’un vous a insulté, les insultes ont atteint vos oreilles et vous réagissez par de la haine. A un niveau superficiel ce constat est juste : vous réagissez aux insultes ou aux louanges. Mais le Bouddha est allé plus loin : il a compris que l’on ne réagit pas aux insultes ou aux louanges, mais aux sensations produites par elles. Votre réaction ne naît que lorsque vous éprouvez une sensation.
Le Bouddha a compris qu’on ne réagit pas à l’objet extérieur, mais à la sensation elle-même :
……
Les six sens engendrent un contact
Le contact engendre la sensation
La sensation engendre l’avidité.
[L]e Bouddha nous conduit au stade où, par une compréhension issue de notre propre expérience, l'ego se dissout naturellement. Il ne s'agit pas là d'un jeu intellectuel, ni d'un jeu émotionnel, ni d'une croyance aveugle. Ce n'est pas non plus un dogme, ni un culte, ni une philosophie. C'est la vérité, la vérité dont nous pouvons tous faire l'expérience, que nous soyons chrétiens ou musulmans, hindous ou jaïns, birmans ou américains, russes ou chinois. La loi de la Nature est la loi de la Nature, elle est universelle.
Sur le chemin du Dharma, il n'y a pas de premiers et pas de derniers, il n'y a que des gens qui marchent.
Sabbo ādīpito loko,
sabbo loko padhūpito;
sabbo pajjalito loko,
sabbo loko pakampito.
Le monde entier est en flammes,
Le monde entier s'en va en fumée;
Le monde entier brûle,
Le monde entier vibre.