Agathe Roméo

J'aimais être seule avec les poneys. Ils ne me jugeaient pas, ne me grondaient pas, n'avaient aucune attente me concernant. Je fourrai mes doigts dans le poil d'hiver de Blacky, long et dense en cette période de l'année. Son dos était humide de pluie, mais son encolure, bien protégée par une crinière très épaisse, était sèche et chaude. Blottie contre son épaule tandis qu'il mangeait son foin à belles dents, je laissai mes pensées s'envoler. J'étais une enfant sauvage et rêveuse.

Je n'avais plus de chaleur à donner, pas de bras solides pour la serrer contre mon cœur, mais j'avais le mérite d'être là. Une petite veilleuse dans le crépuscule interminable de cette femme, n'était-ce pas mieux que rien ?

- Qu'est-ce que tu es, au juste ? cria-t-il. Une... une hallucination, un avertissement, une revenante ?
- Je suis une Dame Blanche.
- Tu te fous de moi ? explosa-t-il.

— Je croyais que la mécanique, c'était plutôt un truc de garçons, souligna Orso.
— Et moi, je croyais que ce genre de commentaires, c'était uniquement pour les vieux cons, rétorqua Ginger. Comme quoi, tout le monde peut se tromper.

— Cinna, Gin te mangera.

Pourquoi j’ai peur, pourquoi je ne peux pas voler comme les autres ?

Tant que je longeais le ruban de goudron, je pouvais marcher des heures sans faiblir ; en théorie, je pouvais même courir, mais je ne m'étais jamais élancée au-devant d'un homme de mon vivant et ne comptais pas céder à cette pulsion post-mortem.

Quelques pétales d’une rose décoiffée par le vent. Un soupir. Une main, sans doute chaude sur le marbre glacé. Une… larme ?

Comme personne n’avait pleuré pour moi depuis bien longtemps, je sortis de mon agréable torpeur et me concentrai sur ma tombe, pour guetter d’autres perles d’eau ; c’était peut-être la pluie – après tout, ma région était connue pour son climat humide – ou tout simplement la rosée…

Orso ne dévora aucune des deux Rose pendant sa troisième semaine de convalescence.

Nous sommes condamnés à nous aimer et à nous chamailler à jamais.

Tous les pégases peuvent voler, mais seuls quelques-uns sont assez rapides et agiles pour se faire remarquer.

- C'était mon premier exercice de vol aujourd'hui, marmonne Nimbus, gêné.
- Oh, génial ! s'écrie Maman. Je me souviens encore de mon tout premier vol, c'était tellement excitant.
Je la coupe :
- Nimbus s'est écrasé contre un arbre et y est resté accroché.

Nimbus galère. Il écrit si mal qui ne parvient pas toujours à relire ses propres cours et son niveau d'orthographe et à pleurer ou à mourir de rire, selon les points de vue.

Je ne laissais pas la moindre trace sur mon passage. Je n'étais que le mirage d'un autre monde.