Ami passant, qui désires connaître
Ce que je fus : je ne voulus rien être,
Je vécus nul, et certes je fis bien ;
Car, après tout, bien fou qui se propose,
De rien venant et retournant à rien,
D'être ici bas, en passant, quelque chose .
ADÉLAÏDE : Je demandais la mort ; quand ce Prince en furie,
Du palais où ses yeux ne me rencontraient point,
Entend mes cris, me voit, vole à nous ; et nous joint.
L'on se mêle ; je veux regagner le rivage,
Le feu, le sang, l'horreur me ferment le passage.
La Fortune se joue, en ce combat fatal.
Sur la glace, longtemps, l'avantage est égal.
Elle nuit à la force, elle aide à la faiblesse :
Et chaque pas trahir la valeur ou l'adresse.
Parmi des cris de rage, et de mourantes voix,
Un bruit plus effrayant, plus sinistre cent fois,
Sous nous, autour de nous, au loin se fait entendre.
La glace en mille endroits, menace de se fendre ;
Se fend, s'ouvre, se brise et s'épanche en glaçons,
Qui nagent sur un gouffre, où nous disparaissons.
Acte V, Scène 1.
M. FRANCALEU : Monsieur, la poésie a ses licences. Mais
Celle-ci passe un peu les bornes que j'y mets ;
Et votre oncle, entre nous, n'a pas tort de se plaindre.
DAMIS : Les inclinations ne sauraient se contraindre.
Je suis fâché de voir mon oncle mécontent ;
Mais vous-même, à ma place, en auriez fait autant.
Car je vous ai surpris, louant celle que j'aime,
À la louer en homme épris plus que moi-même,
Et dont le sentiment sur le mien renchérit.
M. FRANCALEU : Comment ! La connaîtrais-je ?
DAMIS : Oui.
Acte V, Scène 6.
Casimir, à Gustave
Vous vivant ! Vous ici ! Vous dans le palais même d'un barbare qui va partout, l'or à la main, mendier contre vous le fer d'un assassin !
Christierne
Esclaves révoltés, tremblez sous votre maître ; redoutez un courroux trop souvent rallumé ; traîtres, je serai craint si je ne suis aimé.
L'or étant un appât qui nous rend tout possible.