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Citation de Croquignolle


Quand, tard le soir, papa, surmontant sa fatigue, nous régalait d'une sonate de Prokofiev ou d'un adagio de Chopin, la poussière et l'anxiété accumulées tout au long du jour se dissipaient pour faire place à un indicible bien-être. Nous étions tous les trois unis et heureux le temps d'un morceau. J'observais ma mère à la dérobée et je retrouvais un peu de sa fraîcheur d'antan derrière le masque effrayant que la maladie s'acharnait à lui dessiner. Et je suppliais mentalement mon père de ne pas s'interrompre, conscient qu'à peine le silence revenu maman replongerait dans des abimes de souffrance et redeviendrait cette créature décharnée, aux yeux cernés de noir, qui s'éloignait chaque jour davantage sans que nous puissions la retenir. "Joue. Je t'en prie. Ne t'arrête pas !" Et papa jouait, jouait, jouait, luttant de toutes ses forces contre l'ennemi implacable qui tenait serrée entre ses griffes son adorée, s'efforçant d'arrêter l'écoulement du temps, lui qui autrefois mettait un point d'honneur à remonter le carillon et repousser la grande aiguille sur l'heure exacte.
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