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Citations de Ali Shariati (37)


Ali Shariati
Si vous ne pouvez éliminer l'injustice, au moins racontez-la à tous.
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Dans la société dont la priorité est dirigée vers la production et la consommation économiques, et au sein de laquelle la pensée ne comprend que la logique de l’économie, la femme ne peut plus être considérée comme un être qui suscite le rêve, qui s’adresse aux sentiments les plus purs et qui peut-être appréciée et aimée. Elle ne peut plus être considérée comme un lien sacré, comme une mère, comme une femme fidèle au même homme. Elle n’est plus qu’une marchandise économique qui se vend et qui s’achète, selon son pouvoir d’attraction sexuel.

Le capitalisme a modelé la femme d’une façon à la rendre utile pour deux choses :

1 - Détourner tout d’abord la société de la réflexion sur son destin, de l’exploitation qui y a cours, sur l’avenir sombre que lui prépare la bourgeoisie, de manière à ce qu’elle ne se pose plus ces questions :

« Pourquoi est-ce qu’on travaille ? » « Pourquoi est-ce qu’on vit ? » « Quelle est la raison de toutes nos souffrances, et pourquoi est-ce que nous souffrons ? »

2 - Le capitalisme a aussi utilisé la femme comme un instrument de divertissement et d’amusement, étant donné qu’elle est le seul être qui possède une attractivité sexuelle. Cela, afin d’empêcher le travailleur, le fonctionnaire et l’intellectuel, de réfléchir, pendant leurs périodes libres, à se révolter contre le système de classe et le capitalisme. Elle a donc été utilisée pour colmater les brèches qui se trouvent dans la vie sociale. L’art a ainsi beaucoup œuvré à changer ses propres fondements et à remplacer ses centres de préoccupations qui touchaient généralement à l’amour, à la beauté, à l’esprit et à l’affectivité par des considérations sur la sexualité, et ce, sur ordre de la bourgeoisie et du capitalisme. Il fait ainsi de l’individualisme et de la sexualité la plus débridée une philosophie pratique, un fondement de l’humanité cultivée et éveillée et un pragmatisme contemporain. Tous les rêves et tous les sentiments sont ainsi vidés de leur sens. Il n’y a plus que la sexualité qui puisse servir de fondement et de ressource pour la nouvelle activité artistique.

C’est la raison pour laquelle nous pouvons voir comment la peinture, la poésie, le cinéma et le théâtre tournent la plupart du temps autour de la question de la sexualité.
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L’Européen veut transformer la société orientale, afin de l’envahir économiquement, culturellement et affectivement. Il cherche à la voler, à détruire ses sentiments, sa connaissance, son authenticité, sa volonté et ses principes humains, car il est impossible de l’envahir économiquement sans la destruction préalable de toutes ces réalités.

Il faut donc qu’on accepte avant tout autre chose que nous soyons dépossédés de nous-mêmes, que nous oubliions toutes les valeurs humaines, que nous perdions la tradition qui nous maintient et nous protège, que nous nous effondrions de l’intérieur. Il faut que nous devenions des coquilles vides, que nous nous vidions de notre substance, que notre esprit sombre dans l’impuissance, qu’il soit frappé de paralysie, évidé de l’intérieur, exactement comme un panier à poubelle qu’ils remplissent et qu’ils vident de déchets comme ils veulent.

C’est de cette façon qu’ils traitent avec l’esprit et l’âme des Orientaux. Ainsi, si l’âme orientale se trouve vidée de l’intérieur, elle se trouve dans l’incapacité de s’en remettre à quiconque, car elle n’aura plus ni la foi, ni la connaissance, ni la fierté, ni la gloire, car elle trouvera que son passé est une honte, qu’il est dépourvu de valeur et de trace, que sa religion est un conte légendaire, que sa signification est rétrograde et archaïque, que sa vie est horrible et détestable, car elle ne sait rien d’elle-même, de ses origines ou de sa nature, qu’elle n’en connaît que les aspects négatifs ? Cette âme, que pourra-t-elle devenir ? Elle ne pourra évidemment devenir qu’un tonneau vide, assoiffé, ayant besoin des ordres de l’impérialisme qui pourra y dévider ce qu’il souhaite, et l’envahir comme il l’entend.

C’est ainsi qu’on les voit tout vider afin d’envahir l’Orient. Ils promettent ainsi au musulman, au bouddhiste, à l’Indien, à l’Iranien, au Turc, à l’Arabe, au Noir et au Blanc, un même slogan, afin qu’ils deviennent tous similaires. Plus encore, il faut qu’ils deviennent tous des consommateurs des produits économiques et culturels, sans qu’ils ne puissent avoir leurs propres pensées spécifiques.
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Toute religion, tout éveil et toute révolution s’édifient autour de deux éléments : la raison et l’amour. L’un est la lumière et l’autre est le mouvement. Le premier fait naître la conscience, la connaissance et la vision des gens, le second engendre la force, l’enthousiasme et l’animation. Comme le dit Alexis Carrel : « La raison est le phare qui indique le chemin à la voiture, et la place de l’amour ne peut-être que celle du moteur. L’un ne peut aller sans l’autre ». Il en va vraiment ainsi : le moteur sans le phare est un amour aveugle et dangereux, une catastrophe et une mort certaine.

Dans toute société, comme dans toute renaissance intellectuelle ou dans toute religion révolutionnaire, le rôle des oulémas et des intellectuels éveillés et engagés est de guider dans la bonne direction et de faire connaître la religion ou la doctrine, d’éveiller les gens. Le rôle des gens est de déverser l’esprit, la force et le mouvement dans toute cette machinerie.

Toute renaissance est un être vivant qui pense par l’intelligence de ses oulémas et qui aime à travers le cœur de son peuple. Dans toute société dans laquelle la foi, l’amour et le dévouement sont faibles, c’est le peuple qu’il faut tenir pour responsable. Si c’est la connaissance, l’éveil et la conscience profonde de la religion, de son sens, de son orientation et de sa vérité qui sont faibles, ce sont les oulémas qu’il faut tenir pour responsables. Cela est parfaitement visible dans les religions, car ces deux éléments y sont indissociables. Que la religion considérée soit un amour raisonnable ou une raison amoureuse, il s’agit toujours d’un sentiment et d’une connaissance qui provoquent l’enthousiasme, et la foi et au sein de laquelle la raison et la sensation sont intimement liées.

Il en fut ainsi de l’Islam. Il le fut même à un niveau plus élevé encore que toute autre religion, car il est la religion du « Livre » et du « Jihad », de la raison et de l’amour. Comme cela apparaît clairement dans le Coran, car on ne peut pas distinguer entre les limites de la raison et celles du cœur. Il considère le martyre comme une vie éternelle et qui jure par les lignes qu’il écrit. Parmi les compagnons du Prophète, on ne peut pas distinguer entre le croyant, le Moujahid et le messager.
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Nous en déduisons que l’Islam est la première école sociale qui considère que la véritable source et le facteur essentiel du changement social et historique sont simplement les gens. Ce ne sont pas les personnalités célèbres comme l’exprime Nietzsche, ni les nobles et les aristocrates comme l’affirme Platon, ni les grands et leaders comme le prétendent Carlyle et Emerson, ni les hommes au sang pur, comme l’entend Alexis Carrel, ni les intellectuels, ni même les religieux.

Notre théorie est d’une importance primordiale, notamment lorsque nous la comparons aux autres théoriques. Chaque école est destinée à une catégorie de personnes précise. Certaines écoles s’adressent à la classe des instruits, des intellectuels et des penseurs. D’autres se consacrent à la race supérieur et d’autres encore s’adressent au « surhomme » ou s’occupent d’une classe quelconque de la société ; le prolétariat ou la bourgeoisie.

En revanche, selon l’Islam, toute personne est responsable des changements au sein de la société. (pp. 56-57)
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L’Occident cherche, depuis le XVIIIe siècle, avec l’aide de ses sociologues, de ses historiens, de ses écrivains, de ses artistes et même de ses révolutionnaires, à imposer au monde la théorie suivante : la civilisation est une, et elle est telle que l’Occident l’a édifiée et l’a offerte au monde. Celui qui veut être civilisé doit nécessairement disposer de la civilisation que l’Occident a fabriquée pour lui. Et s’il la refuse, il restera sauvage semblable à Mounâs le héros bédouin de la mythologie turque. L’Occident affirme aussi que la culture est une. Il s’agit en fait de la culture occidentale : celui qui doit avoir une culture au vingtième siècle doit l’acheter à l’Occident, exactement comme n’importe quelle autre marchandise !
(…)
L’Occident a déployé tous ses efforts au cours des deux derniers siècles pour rendre possible cette foi en lui, et pour provoquer le manque de croyance en soi. C’est ainsi que nous entendons Monsieur Maurice Thorez dire qu’il n’y a pas de peuple algérien, mais un peuple en devenir. Il nie ainsi la grande civilisation nord-africaine au sein de laquelle les plus grands philosophes sont nés et ont évolué, ainsi que le plus grand sociologue de tous les temps, le fondateur même des sciences sociales [Ibn Khaldoun]. Quant l’Afrique du Nord jouissait d’une telle civilisation, toute la culture de l’Occident se résumait à une chanson populaire destinée aux caravanes de chrétiens en partance pour les lieux saints. L’Espagne était la seule entité civilisée de l’Occident, sauf que cette civilisation, elle l’avait reçue du Maghreb islamique. L’Espagne imitait l’Afrique du Nord dans sa quête de civilisation. Les Occidentaux tentent cependant aujourd’hui de nier toutes les autres civilisations afin d’imposer les formes et les cadres qu’ils fabriquent eux-mêmes pour les autres. Ce massacre touche tous les peuples, de la Chine à l’Égypte en passant par l’Iran, qui ont eu, tous trois, une grande civilisation dans l’histoire. (pp. 23-24)
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Si je dis : ce qui est clair à propos de la civilisation moderne c’est l’absence de modèle vivant, moral et humain et, d’après l’expression d’Emerson, l’absence des directeurs de pensée de l’homme. Je n’exagère pas, mais j’ai expliqué scientifiquement toutes les particularités de l’Europe moderne ainsi que toutes ses douleurs, ses labeurs et ses pertes.

Il y a de nombreux facteurs qui font que l’homme de la génération actuelle a plus que celui de toute autre époque passée besoin d’un modèle, dès lors que la perte de l’homme remonte à l’absence d’un modèle et idéal.

Alors à qui s’adresse cette parole de René Guénon, l’un des grands penseurs français modernes : « la difficulté de l’homme moderne réside dans l’absence de héros »(1). Le héros est à prendre ici en un sens moderne, étant donné que chaque signification du concept de héros est liée aux conditions dans lesquelles elle est formulée. Ainsi le héros de chaque peuple et de chaque culture s’accorde aux goûts et au niveau de développement du peuple en question. Quel est donc le problème spécifique de l’homme moderne ?

Il ne sait pas comment il doit être, car il ne sait pas vraiment comment s’y prendre. Il dispose aujourd’hui de moyens dont aucun autre homme dans l’histoire n’a jamais disposé, mais il n’en demeure pas moins qu’il ne sait toujours pas comment il doit être. C’est la raison pour laquelle Jean Izoulet déclare : « L’Europe moderne ressemble à un descendant du grand impérialisme comblé d’armes, d’argent et de puissance mais qui fait face à un douleur incurable ».

(1) Brecht déclare dans a « Vie de Galilée » : « Malheur à une nation qui a besoin d’un héros ». Même si son cri contient en filigrane la croyance au besoin des nations d’avoir des héros, elle contient en même temps un rejet de la conception habituelle du héros. (pp. 88-89)
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L’écueil énorme auquel nous nous heurtons, c’est que lorsque nos intellectuels progressistes discutent de l’influence de l’Occident, ils oublient leur propre cas, et ils ne relèvent cette influence occidentale que chez les hommes et les femmes qui singent les Européens sans distinction ou choix, dans la décoration, le vêtement, la consommation, le mode de vie, les manières et les habitudes sociales. Alors que la calamité dans la maladie de l’influence occidentale et de l’imitation inconsciente s’étend aussi bien à nos penseurs révolutionnaires et gauchistes ; ce genre d’occidentalisation est plus puissant et résistant, et plus profondément enraciné aux différentes étapes de la maladie de cette communauté s’assimilant aux « Français », sans consistance et creuse, qui ne brille qu’en surface, en un mot la « société moderne de consommation ».

Les femmes et les hommes modernes qui se complaisent à lire des revues comme « Margot », « Burda », « Ici Paris », « Paris-Match », etc., ont des tendances sociales et des visions philosophiques, artistiques et humaines qui sont définies et diffusées par les succursales de Christian Dior et autres. Leur philosophie de vie repose uniquement sur la consommation des produits importés de l’Occident, et tout ce qui s’ensuit du genre de « Zen Rose », « Marad Gentleman » (l’homme gentleman), la modernité et la civilisation et tout ce qui vient avec le siècle, l’éducation moderne, et la pensée contemporaine… Tout cela, sont paroles vides. Car ceux-là sont eux-mêmes des bonimenteurs rétrogrades, vermoulus pétrifiés ; les appareils publicitaires occidentaux ont effacé les traits des peuples anciens et nettoyé, pour les rendre modernes, les richesses historiques, culturelles, religieuses, morales, nationales, ethniques et humaines. Le moderne est ainsi celui à qui on a volé tout ce qu’il possédait, et qui est devenu un « ventre » avide de recevoir les produits des appareils de production industrielle du capitalisme mondial.
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Frantz Fanon a expliqué comment dans une société, une phase révolutionnaire aide à la maturité de la conscience et de l’intelligence des masses et jusqu’à quel point elle réduit jusqu’à onze ou douze ans la période de quiétude et d'indifférence chez les jeunes gens, alors que dans les familles aisées et les sociétés avancées, elle s’étend jusqu’à quinze ou seize ans voire au-delà dans les sociétés révolutionnaires, le jeune atteint la maturité intellectuelle à partir de treize ou quatorze ans. Nous avons de l'expérience dans ce domaine et la différence, entre les enfants des familles déshéritées, souvent issus de classes laborieuses, qui vivent dans la misère, la souffrance et la privation, et ceux éduqués dans des familles aisées, est flagrante, quant à leur prise de conscience et leur appréhension des réalités de la vie. Ceci est la preuve que non seulement l’action est comme un livre, source d’expérience et de prise de conscience, mais que cette conscientisation certaine et sincère est issue de l’action. Cependant n'oublions pas que ce qui découle des livres, bien que menant à une maturité rapide, peut également être vicié, dévoyé et illusoire, ou porter des éléments entraînant en fin de compte la maladie du penseur, son empoisonnement et sa déviation.

Le livre et l’action influent tous deux sur la formation de l’homme : le livre permet à l’action d’être accompagnée de la conscience intellectuelle et donne à l'individu la capacité d'analyser les expériences vécues par d’autres, et d’en profiter ; quant à l’action, elle fixe la pensée sur le terrain de la réalité et rectifie son parcours.
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Les qualités de Ali et Abou Dhar proviennent du prophète Muhammad, qui les éduqua depuis leur jeune âge. Jundob ibn Janada était un redoutable bédouin du désert mais l’Islam l’a transformé en un nouvel homme, Abou Dhar. Quant à Ali qui entra dans la maison du Prophète Muhammad à l’âge de 8 ans, il est devenu l’imam Ali.

Abou Dhar était également un homme au grand l’esprit et aux deux visages : un guerrier et un homme pieux, un solitaire et un être sociable, un religieux et un homme politique, un fin défenseur de la liberté et de la justice et un érudit à la recherche de la science, de la vérité et de la meilleure compréhension du Saint Coran.

Qui est capable de décrire les qualités de Ali ? Un esprit extraordinaire aux multiples dimensions dont les qualités sont largement supérieures à celles des dieux de la mythologie gréco-romaine. Ali est le symbole de l’héroïsme dans l’histoire de l’humanité. Il incarne le génie de la guerre, de la rhétorique, de la sagesse, de la loyauté, du sacrifice, de la piété, de la vérité et de la justice.

Ali était un guerrier redoutable qui mena des combats sanglants pendant plusieurs jours. Sa fameuse épée coupait les têtes de ses agresseurs tels des épis de blé. Néanmoins, il était également un homme solitaire à l’esprit de contemplation. Dans l’obscurité de la ville, il quittait son repos pour arroser les dattiers de Banu Najar, dans les banlieues de la Médine, d’un puits tourmenté et attristé, prisonnier de cette terre.

Les qualités de Muhammad, tel que nous les connaissons depuis 14 siècles, ne doivent pas être limitées, à sa personne, mais doivent être combinées à celles d’Allah, du Saint Coran et à celles d’Abou Dhar et de bien d’autres figures qu'il a façonnées.
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La solitude est le grand drame du siècle. Dans leurs livres respectifs sur le Suicide, Durkheim et Halbwachs abordent la question du suicide en Europe d’un point de vue sociologique.

Le suicide est, en Orient, un cas exceptionnel. En Occident, il ne s’agit pas seulement d’un cas particulier mais bien d’un phénomène social. Ce n’est pas quelque chose qui arrive mais bien un fait. Ainsi, le taux de suicide augmente chaque jour un peu plus en fonction du niveau de développement : il est ainsi plus faible en Espagne, pays moins développé par rapport aux autres pays européens – et il grimpe dramatiquement dans les pays du nord pour atteindre ses proportions les plus élevées en Amérique du Nord. On peut constater la même distribution au sein d’un même pays, entre la ville et la campagne et au sein de la ville, entre les quartiers riches et les quartiers pauvres, et même au sein d’un même groupe social, entre les croyants et les athées, parce que les gens sont seuls et qu’ils souffrent de la vacuité, ainsi que le dit le poète Ahmed Chamlo :

« Les montagnes, ensemble, forment une chaîne, … mais chacune d’elles vit seule ».

La religion établit des liens entre les personnes et génère un esprit commun entre les fidèles. Elle relie aussi chaque personne à son Dieu. Par le passé, la personne était ainsi reliée par des centaines de relations avec les proches, les gens de sa famille, ses connaissances et son peuple. L’indépendance économique s’est produite et les gens ont senti qu’ils n’avaient plus besoin les uns des autres. C’est la société elle-même qui a remplacé la famille, le voisin, les parents, les enfants, les amis et les proches dans la défense de l’individu. C’est elle qui lui assuré tous ses besoins matériels et moraux. La maturité réflexive et logique s’attaque aussi à tous ces liens spirituels et religieux traditionnels. La pensée logique et calculatrice, l’esprit matérialiste et la tendance au bien-être détruisent ces relations spirituelles. L’individu acquiert son indépendance, il devient égoïste et se passe bien des autres. C’est à ce moment-là qu’il bascule dans la solitude. Les autres sont devenus aussi comme lui. Lorsqu’ils se passent de lui, ils se coupent de lui. Les gens ne viennent plus le voir que par intérêt. La personne s’isole alors dans son île déserte et se trouve en proie aux tentations de suicide, le compagnon éternel de la solitude.
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Je parle des libertés humaines et des droits sociaux, non des libertés et des droits sexuels, dont nous voyons la diffusion vertigineuse. Ils sont exportés dans les pays du tiers-monde sous le label « liberté morale, technique, culturelle, artistique, littéraire et érotique », en échange du pétrole, du caoutchouc, du bronze, du café et de l’uranium qui sont volés dans ce monde avec une grande facilité. Ainsi tous les médias, les moyens de communication et les appareils sociaux d’enseignement et de culture des peuples dits « arriérés » s’occupent à justifier et à élargir la sphère d’intervention de ce mécanisme. Il s’agit, là, de quelque chose qui est différent de la liberté et des droits de l’homme. La liberté sexuelle est une imposture parmi tant d’autres qui sont au service de l’abrutissement nouveau et que le système capitaliste occidental met en œuvre, en Orient comme en Occident, à l’intérieur comme à l’extérieur, afin « d’exploiter les peuples occidentaux » et de « coloniser les peuples orientaux » sans limites et sans entraves et de maintenir son emprise sur les jeunes générations sans repères qui sont une source de rébellion et d’insubordination et qui ne supportent pas l’emprise des religions narcotiques et des liens traditionnels qui les enserrent par les bras et par les pieds. Ces jeunes générations sont ainsi prêtes à la révolte à n’importe quel instant. Elles prennent sur elles le travail de réforme plongeant ainsi la tête la première dans « l’amour facile à l’occidentale » et l’atmosphère « des libertés fabriquées par le capitalisme », au point qu’elles ne sentent plus ce qui se passe autour d’elles dans le monde, ne cherchant qu’à se satisfaire à tel degré qu’elles n’en comprennent plus rien. C’est en cela que résident leur pauvreté et leur captivité. C’est la raison pour laquelle nous constatons toute cette agitation de la part des « piliers de la domination locale » en Asie, en Afrique et en Amérique Latine afin d’accorder et de consolider de manière complètement folle les droits et les libertés sexuelles consentis par le capitalisme occidental aux jeunes générations.

C’est comme ça que nous parvenons à voir le côté maléfique du nouveau monde derrière le voile séduisant de cette « tempête sexuelle ». Nous percevons aussi la grande idole à trois têtes de cette époque : « l’exploitation », « la colonisation » et « la domination » qui ont fait de Freud un prophète mensonger, du freudisme une religion mondiale et humaine et de la sexualité une morale existentielle et un système de droits et enfin, du « désir » un temple solide dont la première proie est la femme.
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Les soldats qui ont marqué l’Histoire de l’humanité et qui ont renversé les plus grands empires militaires de l’Histoire ne peuvent être reconnus sur le champ de bataille. Leurs qualités sont semblables à celles des moines hindous et des disciples de Jésus. Ces hommes ont renoncé à la vie d’ici-bas et se sont consacrés à l’amour de l’Éternel. Plongés jour et nuit dans l’extase de l’adoration, leurs âmes brûlent telles les âmes des gnostiques en retraite spirituelle. Épris par l’amour de Dieu et préoccupés par la recherche et la méditation, ils ressemblent aux disciples de Platon ou aux étudiants de l’école de sagesse d’Athènes. Toujours prêts à dégainer leurs épées, ils ne connaissent aucun repos ni la chaleur du foyer et ce depuis dix ans. Avides de combats, leurs épées contemplent le jihâd et écoutent les ordres de Muhammad tels les soldats d’un empereur.

Ces qualités sont celles d’une religion qui porte un message guidant l’Homme jusqu’à l’éternité. C’est la raison pour laquelle, cette religion est le sceau de toutes les religions et le dernier message divin adressé à l’Humanité.

Cette religion a appelé à l’adoration d’un Dieu qui se caractérise aussi bien par les qualités de Yahvé que celle de Théos. Son livre contient la sagesse de la Torah et les exhortations de l’Évangile. Son messager possède la raison de Moïse et le cœur de Jésus et de ses disciples. Ces hommes qui conçoivent la vie comme un combat pour la liberté, comme une foi et un jihâd. Leurs qualités sont semblables à celles de Socrate et celles de Bouddha. Muhammad les a représentés en quelques mots simples et clairs : « Adorateurs la nuit et soldats le jour ». Des soldats qui ne connaissent point la peur, avides de combats et de retraite spirituelle. Seul Muhammad et son message présentent des dimensions diverses. Ces deux orientations sont aptes à réaliser l’espoir de l’Homme à notre époque.

L’avenir des civilisations historiques connaît une étape critique. Elles subissent une oscillation perpétuelle entre la vie d’ici-bas et l’au-delà, le spirituel et le matériel, les préoccupations individuelles et les préoccupations collectives, le corps et l’esprit, la noblesse des vertus et le pouvoir de la vie, la richesse de la culture et la perfection de la civilisation, la rationalité entre religion et science, la passion et la vigueur, la beauté et le bien, la réalité et la vérité et enfin la représentation et l’authenticité.
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L’Imam Al-Sadeq dit : « Chaque jour est ‘Ashûrâ’ et chaque terre est Karbala et chaque mois est Muharram ».

Si nous examinions le sens profond des ces paroles, et au-delà de celles-ci autrement dit, nous devons par tout temps, et en tout lieu, combattre l’injustice, nous ressentirions directement cette vérité que :

« …chaque homme est libre (Hurr) ».

La philosophie de notre Histoire repose sur des principes d’opposition quelles qu’en soient les dimensions, l’opposition entre le bienfait et l’acte répréhensible, le combat entre l’oppresseur et l’opprimé, Dieu et le tyran, le polythéisme et l’unicité, la justice et l’injustice.

Notre histoire, en somme, débute par la lutte et s’achèvera par la lutte (depuis Caïn et ce, jusqu’à l’apparition de l’Imam du Temps), lutte qui, verra à ses débuts, l’homme s’offrir en martyr réclamant son droit face à son ennemi emporté par ses désirs à la fin des temps, l’homme opprimé, abusé, usurpé de ses droits, exercera la loi du talion. Puis l’égalité triomphera et à sa suite, l’emporteront la fraternité, la paix et la lumière ; tout ceci à l’issue d’une révolution universelle, sanglante, mettant fin au règne du « Sufiânî », anéantissant le complot du « faux messie » ; à ce moment là, ce sera la fin des temps décrite dans le Saint Coran : « En vérité mes serviteurs justes héritant de la terre ». (Les Prophètes, Sourate 21, verset 105)

« Mais nous voulions favoriser ceux qui avaient été humiliés sur la terre, nous voulions en faire des chefs, des héritiers. » (Le Récit, Sourate 28, verset 5).

L’Histoire est donc l’histoire de la vengeance d’Abel. Toutes les époques historiques, ont été de cette lutte perpétuelle et éternelle. Par conséquent, chaque époque, chaque génération et à tout endroit sur la terre où se trouve l’homme le chemin de Dieu et celui de l’oppresseur, ne cesseront de s’affronter et de se combattre, appelant les gens à soutenir leurs causes et se manifestant à travers la personne de Hussein ou Yazid. (pp. 36-38)
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Regardez l’islam, au cours des vingt premières années de sa vie, où sont apparues des personnalités éminentes, et comparez cette période au millier d’années de vie de l’Iran antique, d’où n’émerge aucune personnalité. Vers la fin de la période antique, nous trouvons quelques noms, des médecins et des sages, mais nous sommes vite déçus lorsque nous apprenons qu’il s’agit de savants venus de Byzance, ayant fui cette capitale par crainte de Justinien le chrétien pour se retrouver en Iran, et fonder l’université de Jundishapour, des réfugiés politiques ! Notre première université, à l’époque dorée, fut fondée par des Grecs ! Pourquoi cette nation pauvre et stérile est-elle devenue fondatrice des universités, des écoles et des bibliothèques qui n’ont pas leurs pareils dans le monde entier, après l’avènement de l’islam ? Comment est-elle devenue responsable de toutes ces découvertes qui ont bénéficié à l’humanité, comment a-t-elle pu diffuser ses dons scientifiques, intellectuels et politiques de la Chine jusqu’en Afrique du Nord et au sud de l’Europe ?

La réponse est : la révolution, la révolution intellectuelle, la nouvelle foi ardente qui transforme l’âme, la race, la vision et toute chose. L’idéologie est ce qui suscite ce bouillonnement interne, cette créativité, cette fertilité, cette culture et cette vraie civilisation chez les gens. (p. 162)
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Quand une âme s’élève au-dessus de l’époque dans laquelle
elle vit, qu’elle mûrit d’une manière trop importante pour que les gens puissent la supporter, elle se retrouve automatiquement « seule »

Son existence profonde, belle et riche, va certainement provoquer « les créatures » vides, légères, laides et condamnées : même si elle reste humble dans son comportement apparent c’est alors que son ami et son ennemi vont s’allier dans la négation de son droit.

Ils vont alors trouver un intérêt commun, et l’ami et le compagnon dont la petitesse finit toujours par être révélée par sa grandeur vont tout faire
pour nier ses qualités et humilier sa personnalité, afin
d’éliminer la différence douloureuse qui existe entre eux et cette image qu’ils ne peuvent pas atteindre. Ils vont donc s’allier avec l’ennemi parce qu’ils auront besoin de lui pour le faire échouer.

C’est ainsi qu’ils deviennent des jouets entre les mains des ennemis, des esclaves gratuits, des serviteurs de l’oppression…
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L’Imam ‘Ali dit qu’il y a deux responsables dans la provocation de l’oppression : celui qui opprime et celui qui accepte l’oppression. C’est de l’association des deux que naît l’oppression. En d’autres termes, l’oppression ne peut pas émaner de la présence d’un seul de ces éléments. L’oppresseur ne peut pas opprimer le vent. L’oppression est un morceau de fer qui ne prend forme que sous les frappes du marteau de l’oppresseur et l’enclume de l’oppressé.

Ce n’est pas seulement l’oppression qui a besoin, pour exister, de deux pôles. Il en va de même pour la corruption, pour la déviation, pour la misère et pour les drames. Au moment de la défaite d’une société donnée, ce n’est pas seulement le conquérant qui gagne la victoire, mais il faut aussi que la société s’effondre pour que la défaite s’accomplisse. Au septième siècle, par exemple, ce n’est pas Gengis Khan qui nous a défaits, mais c’est nous qui nous sommes effondrés de l’intérieur et qui étions préparés à l’acceptation de la défaite depuis deux siècles. Gengis Khan n’a rien eu d’autre à faire qu’à pénétrer ce corps en déliquescence. Nous nous sommes alors effondrés et nous avons été défaits.

Les vers qui sont présents dans les racines de l’arbre et dans ses branches sont ce qui le ronge de l’intérieur, qui lui ôte son âme et son contenu, qui le vide de sa substance et en font un squelette qui tient à peine debout. C’est ce qui le détruit et le brise et non pas cette tempête qui passe sur lui comme sur tous les autres arbres. Les tempêtes soufflent souvent dans les bois. Pourquoi ce sont seulement certains arbres qui s’effondrent quand d’autres résistent ?
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La classe bourgeoise est une classe, par essence, décadente contrairement à la classe féodale qui est considérée comme opposée à l’humanisme alors qu’elle a fondé des valeurs morales. Bien que ces valeurs morales soient décadentes également, la bourgeoisie, à cause de sa vision vile et perverse, n’a pas conscience des hautes valeurs morales, et ne croit qu’aux valeurs matérielles futiles. Cela signifie que le savant qui raisonne sous le patronage d’un gouvernement bourgeois et dans une période de croissance, qui réalise un travail scientifique, verra quand il traite les affaires économiques, toutes les valeurs culturelles, les vertus morales, les philanthropies, le génie, l’héroïsme, le témoignage, l’altruisme, le combat, les sentiments, les émotions, les arts et les lettres d’une manière matérialiste concrète fondée sur des bases purement économiques.

S’il étudie la psychologie et les caractères humains, il considère toutes les dimensions, les phénomènes et les réflexes de l’âme humaine riche de secrets, et ce que la religion appelle l’âme divine ou la métaphysique comme étant la résultante de différents complexes sexuels refoulés. Il décrit le génie comme étant un état proche de la folie, et considère l’effort, l’application, la résistance et la continuité comme étant le moyen de se libérer du complexe sexuel refoulé. Enfin, il explique les émotions humaines, telles que les caresses de la maman à son enfant et la prière de l’homme à son créateur, en les comparant avec les relations sexuelles.
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Dans chaque société, lorsque la vitesse de la consommation change, d’autres changements rapides l’accompagnent. Si, par exemple, ce sont les vêtements qui changent, et qu’on les remplace par des costumes, il faut changer le type de semelle qu’on utilise dans la fabrication des chaussures, que le chapeau local devienne un chapeau européen et, qu’à la maison, le tapis soit remplacé par le fauteuil et la chaise. C’est ainsi que les structures de l’ancien ordre s’effondrent et qu’une nouvelle bâtisse s’édifie sur ses ruines.

Donc, quand l’Européen arrive avec de nouvelles marchandises, il ouvre grand la porte devant de nouveaux produits qui le suivront. Et lorsque la nature de la consommation se transforme, cela indique que l’homme – c’est-à-dire le consommateur – change aussi, parce qu’il y a une relation étroite et fondamentale entre la consommation et le consommateur.

Pour changer la nature de la consommation, il faut, au départ, détruire les goûts et les traditions historiques et sociales.

Que n’aura pas brûlé le capitalisme conquérant pour un morceau de tissu !

La femme, dans les sociétés islamiques, ne doit pas seulement devenir une consommatrice de marchandises importées seulement d’Europe et d’Amérique. Il faut surtout qu’elle exerce une influence profonde et déterminante sur les relations sociales, sur la nouvelle génération, sur la forme de la société, sur la moralité, sur les valeurs, sur l’art, sur la doctrine et sur toute chose.

Le terme de l’époque, de la culture, des moyens sociaux, de la nouvelle économie, de la nouvelle pensée et de tout ce qui se passe dans les sociétés islamiques a des répercussions indéniables sur la transformation des formes, des organisations et des traditions. La femme est donc contrainte au changement de son âme, de son corps et de ses coutumes apparentes et intérieures. Les conditions du passé sont insuffisantes et impossibles pour la femme d’aujourd’hui.
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Chaque homme a reçu de Dieu le dépôt de la foi parce qu’il est le fils d’Adam et un être responsable. Il est responsable non seulement de son groupe, de sa famille ou des siens mais aussi vis-à-vis de tout ce qui existe, de la Volonté qui régit l’existence de toutes les créatures.

C’est le cadre général de la responsabilité de l’homme, et en Islam le savant est celui qui porte la plus grande responsabilité.

Dans ce contexte le mouvement appelé « Islam » est apparu chez les arabes, qui avaient besoin de mujâhidin pour lutter contre les idolâtres, les ennemis et l’aristocratie agressive ; le chef de ce mouvement a lancé un appel aux mujâhidin en disant : « L’humanité, bien qu’elle ait atteint aujourd’hui une grandeur dans les domaines de la science et de la culture, reste défaillante. Ce qui lui manque, c’est une devise semblable à cette expression remarquable, qui jaillit d’une société illettrée où l’écriture et la lecture n’existaient pas… cette expression est formulé ainsi :

« L’encre des savants sera pesée avec le sang des martyrs, le jour du jugement dernier ; l’encre des savants l’emportera. »

Ne déduisons-nous pas de cette expression ce sens essentiel et clair : le sang et l’encre ont une responsabilité semblable… ?

Semblable, sinon que la responsabilité de l’encre est plus perceptible, manifeste, plus dense et plus considérable que celle du sang ! Le Coran a été révélé dans une société d’analphabètes. Il ne se trouvait dans la ville qu’un seul homme lettré. Pourtant le Coran a été révélé à un Prophète illettré, qui, par la suite, jura par le calame, l’encre et l’écriture : « Noun, par le calame et par ce qu’ils écrivent ». Le serment est fait ici par le calame responsable et par l’encre dont l’homologue le plus proche et le plus majestueux est le sang.

La science et le savant sont donc présents dans le Coran et en Islam. Il n’est pas question ici, comme le pensent les modernes, de la science dans l’absolu ou des scientifiques. Tout comme, il ne s’agit pas non plus, comme le pensent les anciens, des sciences religieuses, du droit, ou de la jurisprudence. A travers mes propos je désigne l’intellectuel et le penseur, exactement comme il est décrit dans les cultures, les sociétés, et les idéologies humanistes, révolutionnaires et responsables.
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